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Le premier, le Marijuana Opportunities Fund (MJJ) a été lancé par Redwood Asset Management le 1er février dernier. Il a été suivi, le 12 février, par l’Evolve Marijuana ETF (SEED), de Evolve Funds Group. Puis, le 14 février, Horizons Fonds négociés en Bourse y est allé de son Indice de producteurs émergents de marijuana (HMJR), le deuxième FNB lancé par cette société vouée au secteur de la marijuana.

Les deux premiers FNB, qui sont activement gérés, intègrent chacun une quinzaine de titres et réclament un frais de gestion de 0,75%. Celui de Horizons, pourtant passif puisqu’il suit l’indice du même nom, est composé de 26 titres de petite capitalisation et affiche un frais supérieur : 0,85%.

Depuis la légalisation au Canada de la marijuana pour usage médical en 2000, le marché n’a cru que modestement. Cependant, la légalisation prévue active les choses. «Tout se précipite et change rapidement avec le Canada, premier pays du G20 à légiférer, et le deuxième dans le monde après l’Uruguay, qui l’a fait il y a deux ans», lance Gregory Taylor, gestionnaire du FNB de Redwood.

Les projections de ventes balayent large, mais anticipent toutes des hausses substantielles. Gregory Taylor parle d’un marché de 7 ou 8 milliards de dollars (G$) au Canada en 2022, atteignant peut-être 120 G$ mondialement la même année. Raj Lala anticipe une croissance annuelle composée de 60% d’ici 2021. Chez Horizons, on mise plutôt sur un marché mondial de 24,5 G$US en 2021.

Un peu partout dans le monde, les choses bougent également, explique Gregory Taylor. Déjà depuis longtemps en Hollande, l’usage récréatif du cannabis est permis, tandis que l’Allemagne, l’Italie et l’Australie se préparent à légaliser son usage médical.

Au total, une vingtaine de pays considèrent différentes voies de légalisation. C’est sans compter qu’un plus grand nombre de pays a choisi de décriminaliser la marijuana. «De plus, avec l’exemple du Canada, on peut s’attendre à ce que le passage à la légalisation de l’usage récréatif s’accélère», ajoute le gestionnaire.

Tout cela compose un marché international naissant dans lequel les compagnies canadiennes ont pris une longueur d’avance. Par exemple, Canopy Growth Corporation, fondée en 2014, compte des ventes annuelles de 40 M$ et sa capitalisation boursière de 5,2 G$US, selon Marketwatch, «est probablement la plus importante au monde à l’heure actuelle», juge Gregory Taylor.

De plus, Canopy, en même temps que d’autres joueurs comme Aurora Cannabis et Aphria, est en voie d’implanter des surfaces de culture de cannabis en Europe, notamment une installation de 100 000 pieds carrés au Danemark.

Réserve chez les conseillers

Bien qu’ils reflètent un marché en pleine effervescence, les FNB du cannabis n’impressionnent pas les conseillers et gestionnaires à qui nous en avons parlé.

Des ratios cours/bénéfices de 506 pour Aurora et de 83 pour Aphria ne suscitent pas l’enthousiasme de Guillaume Desjardins-Tessier, conseiller associé chez Raymond James.

«On ne se porterait pas vers ce marché à ce moment-ci; c’est allé trop fort, trop vite, commente-t-il. L’évaluation des titres de compagnies est très forte quand on considère les ventes futures qu’on leur attribue.»

Sans tomber dans des pâmoisons psychédéliques, ce gestionnaire n’est pas sans trouver un attrait à ces FNB, notamment qu’ils permettent de diffuser le risque sur plusieurs titres. «Pour un secteur aussi risqué, c’est un avantage intéressant», note-t-il.

Cela dit, il n’écarte pas totalement l’idée : «On espère trouver un moment de repli qui nous offrirait un point d’entrée intéressant. Va-t-il se présenter? On ne sait pas. Si ce n’est pas le cas, on a bien d’autres opportunités qu’on peut poursuivre ailleurs.»

Pour Peter Guay, gestionnaire de portefeuille chez PWL Capital qui n’investit que dans des FNB, les trois offres présentes ne répondent nullement à ses besoins. «Je cherche une couverture des marchés mondiaux la plus efficace et la moins chère. Investir dans un FNB de marijuana impliquerait un pari dans un secteur très pointu. Je n’ai pas à prendre des paris de ce type dans mes portefeuilles.»

D’autres conseillers opposent au cannabis un refus catégorique. «C’est incroyable qu’on prenne une telle décision comme société de légaliser de la drogue!» s’exclame Sylvain de Champlain, président de De Champlain Groupe financier.

«J’ai vu des gens dans ma famille souffrir de ces produits, dit pour sa part Larry Bathurst, président de Planex Solutions financières. Je n’accepterais pas que de tels titres fassent partie de mes recommandations. Il s’agit de produits spéculatifs dont la valeur morale est questionnable. Si un client insistait pour en acquérir, je lui suggérerais de les acheter séparément via PEAK Transak.»