Occasions parmi les Next Eleven

Selon lui, c’est dans ces marchés, que se concentrerait le meilleur potentiel de croissance au cours des 20 prochaines années.

Aujourd’hui, les pays du BRIC ont perdu la faveur.

En effet, les investissements dans les fonds de marchés émergents aux États-Unis ont souffert de rachats nets de 2,1 G$ US pendant les huit premiers mois de 2013, selon une analyse de Bank of America Merrill Lynch.

Cependant, tout n’était pas perdu, car il y a eu un regain par la suite, selon Lipper : 1,1 G$ US d’achats nets en septembre, et 2,1 G$ US en octobre.

Et cela, malgré le fait que l’indice phare du secteur, l’indice MSCI Emerging Markets, ait fléchi de 6,14 % en 2013 (en date du 16 décembre). Le MSCI BRIC, pour sa part, avait cédé 7,16 %.

Avenir radieux

Au même moment, le portrait du côté des pays frontières était nettement plus radieux.

D’abord, le groupe s’est élargi et a dépassé les 11 pays originaux cernés par Jim O’Neill.

L’indice MSCI Frontier Markets compte maintenant 26 pays, ayant greffé aux Next Eleven des pays comme l’Argentine, la Jordanie, le Koweit, la Slovénie, la Tunisie et l’Ukraine.

Les fonds de pays frontières ont reçu des entrées nettes de 1,5 G$ US aux États-Unis en 2013, tandis que le l’indice MSCI Frontier Markets a crû de 20 % (en date du 16 décembre).

«On pense que les pays frontières deviendront les pays en développement de demain, au même titre que les pays émergents qui sont à l’avant-scène aujourd’hui», prévoit Serge Pépin, spécialiste de produits, marchés émergents mondiaux, chez Lloyd George Management (Europe), à Londres.

«Dans ces pays, la croissance annuelle varie de 5 à 15 %, par rapport à une croissance 5 à 8 % dans les pays émergents, et de 0 à 2 % dans les pays industrialisés.»

Les Bourses de certains de ces pays manifestent un dynamisme à l’avenant, selon des chiffres que rapporte Christine Tan, gestionnaire de portefeuille, marché émergents, chez Excel Funds, à Toronto.

Alors qu’à New York, l’indice S&P 500 affichait un rendement total de 43,1 % du 1er janvier 2008 au 31 octobre 2013, les Bourses des Philippines, d’Indonésie et de Turquie explosaient de 123,1 %, 88,5 % et 63 %, respectivement.

Démographie favorable

Pourquoi ces pays frontières sont-ils si dynamiques ?

Au premier chef, ils bénéficient d’une démographie favorable, jugent les analystes interrogés.

«Environ 18,5 % de la population du G7 a plus de 65 ans, par rapport à 8,3 % dans les pays frontières», note Derek Thieme, analyste principal chez Boston Company Asset Management.

Dans les pays sub-sahariens, l’âge médian est souvent de moins de 20 ans, souligne dans son blogue Mark Mobius, président exécutif du conseil chez Templeton Emerging Markets Group.

Les finances publiques de plusieurs de ces pays sont maintenant assainies. Le ratio d’endettement du Nigéria, par exemple, est passé de 88 % à 18 % du PIB entre 2001 et 2012, précise Derek Thieme.

Plusieurs gouvernements entreprennent des réformes importantes de leurs marchés intérieurs.

«D’autres cherchent encore comment être de bons gouvernements, constate Christine Tan. Ce qui les aide, c’est de compter sur une population jeune. Cela veut dire qu’ils ont 30 ans pour mettre au point leurs systèmes sociaux.»

Ce sont d’ailleurs ces futurs consommateurs qui intéressent des investisseurs comme Serge Pépin et Christine Tan.

«On croit que ces pays bénéficient de ces consommateurs jeunes qui s’enrichissent de plus en plus et dont le pouvoir d’achat croît, indique Serge Pépin. On n’achète donc pas des titres industriels ou d’énergie ; on s’intéresse plutôt à ce qui touche le consommateur : santé, finance, consommation.»

Marchés risqués

Évidemment, ces pays sont risqués pour l’investisseur.

Les récents troubles sociaux en Égypte et en Turquie le montrent bien. Dans plusieurs pays, la corruption est omniprésente, les politiques gouvernementales peuvent être instables, et les infrastructures sont déficientes.

De plus, les marchés manquent souvent de liquidités. L’achat ou la vente d’un titre peut prendre plusieurs jours.

«Liquider une position de 100 M$ pourrait exiger jusqu’à 10 jours», indiquait Chris Philips, analyste principal chez Vanguard Group, dans un article paru le 30 août 2013 dans le Wall Steet Journal.

Le même article faisait valoir que les 141 sociétés de l’indice MSCI Frontier Markets ont une valeur totale de 123 G$ US, soit même pas le tiers de la capitalisation d’Apple.

Un autre danger lié à ces pays subsiste à l’extérieur de leurs frontières : la nervosité des investisseurs occidentaux, qui peuvent très rapidement retirer leur argent.

On l’a constaté en mai dernier quand la Réserve fédérale américaine a annoncé son «intention» de réduire ses mesures d’assouplissement monétaire. Les pays émergents en ont lourdement pâti, tandis que les marchés frontières ont beaucoup mieux résisté, fait remarquer Christine Tan.

Par exemple, le fonds négocié en Bourse iShares MSCI Emerging Markets a fléchi de 17 % en moins d’un mois, tandis que le FNB MSCI Frontier 100 ne s’est replié que de 11 %.

À l’avenir, juge Christine Tan, les pays frontières résisteront sans doute mieux aux mouvements des investisseurs occidentaux.

Une raison importante tient au fait que ces pays sont de moins en moins dépendants des places financières des pays industrialisés pour financer leur croissance. Ils peuvent compter sur la Chine, par exemple.

De plus, dans leurs échanges, ils se tournent souvent davantage vers les réseaux commerciaux des pays émergents.

Les pays frontières ne sont pas une terre promise pour les investisseurs impatients, avertit Derek Thieme.

«Ils sont dans l’enfance et représentent un thème d’investissement de plusieurs années, et même de plusieurs décennies.»