Une main d'un homme avec un costume montrant des symboles technologiques.
peshkov / 123rf

Pour s’adapter, plusieurs régulateurs ont décidé de travailler ensemble à travers le Global Financial Innovatin Network (GFIN). Pas de normes mondiales en vue, mais des discussions régulières afin de mieux encadrer les risques spécifiques liés à l’émergence des fintechs.

Au début de 2018, la Financial Conduct Authority du Royaume-Uni (FCA) a ainsi mené des consultations sur l’idée de créer un « bac à sable mondial ». Rappelons qu’au Canada, le bac à sable réglementaire permet à des fintechs de s’inscrire ou d’obtenir une dispense des obligations prévues par la législation en valeurs mobilières afin de tester leurs produits ou services dans un laps de temps limité. En effet, de plus en plus d’entreprises novatrices présentaient des propositions qui transcendaient les territoires de compétence de chaque autorité.

Les principaux objectifs de ce bac à sable mondial étaient d’apporter un soutien à ces sociétés cherchant à mettre à l’essai des idées dans plus d’un territoire et d’encourager la coordination et la collaboration entre les régulateurs quant aux nouvelles tendances.

Il a ensuite été convenu de renommer l’initiative « Global Financial Innovation Network » afin de mieux refléter la portée élargie des activités proposées et d’inclure une plus grande variété d’autorités qui ne s’étaient pas dotées de bac à sable, mais qui souhaitaient adhérer au GFIN.

« Le résultat de cette collaboration, nous le voyons en ce moment, note Oumar Diallo, directeur, Fintech et innovation, à l’Autorité des marchés financiers (AMF). Les principaux acteurs du GFIN se réunissent cette semaine à Montréal et nous sommes présents aujourd’hui au Forum FinTech Canada. »

M. Diallo participait en effet mardi à un panel sur la réglementation mondiale aux côtés de représentants de la FCA, de l’Australian Securities and Investments Commission (ASIC) et de la Bermuda Monetary Authority, tous trois membres du GFIN.

Échange de bonnes pratiques 

« Entre autres objectifs, le GFIN vise à offrir aux fintechs la possibilité de tester leurs produits, services ou modèle d’entreprise novateur simultanément sur des marchés financiers assujettis à des lois et règlements différents », explique M. Diallo.

« Le changement est en marche, ajoute Nick Cook, directeur de l’innovation à la FCA. Le rôle du régulateur est de permettre ce changement et de le soutenir, tout en faisant en sorte que le public soit bien protégé. »

Ce partage des connaissances et de l’expérience du marché au moyen du GFIN est ainsi considéré comme une aide précieuse pour s’adapter à l’évolution des technologies novatrices qui transforment les marchés. Le GFIN offre aux autorités mondiales et au secteur une plateforme leur permettant de collaborer pour traiter rapidement de questions transfrontalières.

Tous les panélistes s’accordent en outre pour dire que ce réseau n’a pas pour objet de créer des normes de réglementation harmonisées entre les territoires, mais qu’il vise plutôt à fournir aux autorités un espace pour discuter, interagir et échanger de bonnes pratiques, ainsi qu’à offrir à des entreprises novatrices la possibilité de faire des essais internationaux.

À la jonction de finance et société 

Aqsa Zubair, conseillère principale, blockchain et fintech à la Bermuda Monetary Authority, a ainsi expliqué comment son employeur s’y prenait pour mesurer le degré de confiance que l’on pouvait attribuer à telle ou telle entreprise technologique.

« Nous avons la responsabilité de prévenir le crime financier, insiste-t-elle. Nous avons mis au point des formulaires, des questionnaires et des tests afin d’évaluer la crédibilité des projets qui nous sont soumis. »

En Australie, Cuihua Cartwright, conseillère principale du service de l’innovation à l’ASIC, raconte que le régulateur a récemment lancé un appel aux fintechs afin qu’elles utilisent une plateforme leur permettant d’obtenir par elles-mêmes leur droit d’exercer dans le domaine des services financiers.

« Nous sommes sur le point de lancer un appel d’offres afin de mettre au point un outil qui sera capable de fournir des conseils sur les exigences en matière de licences, ajoute-t-elle. Cela peut prendre la forme d’un robot conversationnel ou de toute autre application programmée en langage naturel, donc très accessible. »

De son côté, Oumar Diallo admet que tous ces changements représentent un grand défi pour les autorités telles que les leurs.

« Ces réunions, ces discussions nous apportent vraiment beaucoup, confie-t-il. Nous nous concertons sur des questions clés et avons la possibilité de nous interroger sur notre propre conception de l’avenir du système financier. Quelle sera la place de la monnaie, par exemple? Toutes ces questions sont à la jonction de la finance et la société. Les questions éthiques prennent notamment une grande place. Ces rencontres nous permettent d’avoir une conception holistique de notre secteur. »

Le GFIN constitue pour l’instant un terrain d’expérimentation, mais tous ses membres s’accordent déjà pour parler de succès. Les efforts ne doivent cependant pas être relâchés. L’accélération de l’évolution technologique oblige en effet les autorités à s’adapter au même rythme et à inventer de nouvelles façons de collaborer.