une petite boule sur lequel on retrouve le drapeau du Canada à côté d'un signe de dollar
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Pendant des décennies, les politiques ont favorisé l’ouverture des marchés, une mondialisation accrue et une diminution de la réglementation, de l’ère de Margaret Thatcher et Ronald Regan jusqu’à la crise financière de 2008, a expliqué l’économiste en chef chez Deloitte Canada, Craig Alexander.

Celui-ci a toutefois prévenu que le contexte a changé et qu’il est désormais moins favorable à l’ouverture des marchés ainsi qu’au libre-échange.

« Je pense que nous allons devoir vivre avec cela pendant un certain temps », a déclaré M. Alexander.

Les tensions liées au commerce, notamment les craintes que le Royaume-Uni quitte l’Union européenne (UE) sans accord ainsi que la guerre commerciale sino-américaine, se sont retrouvées parmi les principales manchettes de 2019.

Alors que l’année tire à sa fin, ces risques ont diminué.

Les chances sont plus grandes de voir le Royaume-Uni quitter l’UE de façon ordonnée, tandis que les États-Unis et la Chine semblent se diriger vers un accord commercial après l’annonce, plus tôt ce mois-ci, d’une entente entourant une première phase visant à réduire les tarifs.

En territoire canadien, le nouvel accord de libre-échange nord-américain semble de nouveau sur la bonne voie étant donné que le Canada, les États-Unis et le Mexique ont accepté de modifier l’entente signée l’an dernier. La ratification de l’accord avait été bloquée au Congrès américain.

Mais M. Alexander a indiqué que la politique sous-jacente à ces problèmes commerciaux persistait et qu’il y avait un risque de protectionnisme accru en Europe dans la foulée du Brexit.

« Aux États-Unis, nous allons assister à une élection présidentielle en 2020 et si le président Trump l’emporte, eh bien, nous savons qu’il aime le protectionnisme, a-t-il déclaré. Mais s’il perd et que les démocrates gagnent, les démocrates ne sont pas un parti favorable au commerce. »

L’économiste en chef chez Deloitte Canada a expliqué que les incertitudes politiques à l’échelle mondiale devraient continuer d’affecter l’économie canadienne.

« En tant que puissance moyenne, économie de taille moyenne, nous allons être secoués par ces vents politiques », a dit M. Alexander.

Des fluctuations

La croissance économique au Canada a été inégale cette année. L’économie a progressé à un rythme annuel de 0,8 % au cours des trois premiers mois de l’année avant d’afficher une croissance de 3,5 % au deuxième trimestre pour ensuite ralentir à 1,3 % au troisième trimestre.

Économiste principale au Conference Board du Canada, Alicia Macdonald a dit s’attendre à ce que la croissance de l’économie du pays demeure modeste.

Le Conference Board table sur une croissance de 1,8 % l’an prochain et de 1,9 % en 2021, notamment grâce à la vigueur du marché de l’emploi ainsi qu’à une croissance modeste des dépenses de consommation.

Alicia Macdonald ne croit pas que la Banque du Canada devra réduire son taux directeur l’an prochain pour relancer l’économie, mais affirme qu’une rupture des pourparlers commerciaux entre les États-Unis et la Chine pourrait changer la donne.

L’endettement des ménages et la façon dont les familles canadiennes gèrent ce fardeau pourrait représenter un autre problème pour l’économie canadienne, croit l’experte.

« Il existe un certain risque de baisse du côté des ménages », a déclaré Mme Macdonald, en notant que la croissance du crédit à la consommation non hypothécaire a ralenti.

Risques et incertitudes

Malgré les attentes d’une croissance modeste pour 2020, les plus récentes données économiques ne sont pas toutes bonnes. Le rapport sur l’emploi pour novembre est resté bien en deçà des attentes avec une perte de 71 200 postes au cours de cette période.

Le rapport mensuel sur l’emploi de Statistique Canada est notoirement volatil, de sorte que les économistes mettent en garde de ne pas accorder trop de poids aux résultats d’un mois, mais les données décevantes de novembre ont été publiées après un mois d’octobre n’ayant pas suscité l’enthousiasme.

Les cas d’insolvabilité sont également en progression.

Selon le Surintendant des faillites Canada, le nombre de cas d’insolvabilité, qui regroupent les faillites et les propositions, a augmenté de 13,4 % en octobre par rapport à la même période l’année précédente. Pour la période de 12 mois terminée en octobre, le nombre cas a grimpé de 8,9 % comparativement à la période correspondante d’il y a un an.

Doug Hoyes, un syndic autorisé en insolvabilité, a déclaré que le nombre d’insolvabilités personnelles était inférieur aux sommets atteints pendant la crise financière, mais que la tendance observée à l’heure actuelle survient au moment où l’économie continue de progresser et que le taux de chômage était près d’un creux record.

« Plus de gens ont des ennuis », a-t-il dit.

Doug Hoyes a déclaré que 80 % de ses clients travaillent, mais que leurs dépenses augmentent plus rapidement que leurs revenus.

« En conséquence, ils se tournent vers le crédit pour survivre et ils n’ont pas l’argent pour rembourser leur dette », a-t-il souligné.

Tout cela survient alors que la Banque du Canada est à la recherche d’un nouveau gouverneur puisque Stephen Poloz quittera son poste lorsque son mandat viendra à échéance, en juin.

Carolyn Wilkins, la sous-gouverneure principale, est considérée par plusieurs comme la favorite pour succéder à M. Poloz. Elle serait la première femme à occuper la fonction la plus importante au sein de la banque centrale. Toutefois, la personne dans le siège du numéro deux de la Banque du Canada ne semble pas avoir beaucoup de chance lorsque vient le temps de trouver un nouveau gouverneur.

Gordon Thiessen a été le dernier sous-gouverneur en chef à être promu gouverneur de la Banque du Canada lorsqu’il a pris ses fonctions en 1994.