Un homme d'affaires explique quelque chose dans un comité.
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Depuis la mort de George Floyd, la discrimination raciale est au centre de l’actualité, car journalistes et citoyens partagent des vidéos montrant la violence à l’encontre des communautés noires et autochtones.

Toutefois, l’injustice raciale ne se limite pas à ces démonstrations de violences. La discrimination emprunte de nombreuses formes et peut se trouver également dans bien des entreprises dans lesquelles vous investissez peut-être, souligne Dustyn Lanz dans une chronique d’Investment Executive.

Une étude sur la diversité et l’inclusion dans les entreprises canadiennes réalisée fin 2019 par le Boston Consulting Group révèle que 34 % des personnes de couleur et 40 % des répondants autochtones ont été victimes de discrimination sur leur lieu de travail. Sans compter que les membres de ces communautés sont nettement sous représentés dans les postes de direction d’entreprises.

Les sociétés cotées en bourse constituées en vertu de la Loi canadienne sur les sociétés par actions ont maintenant l’obligation de divulguer la proportion d’autochtones et de membres de minorités visibles au sein de leur conseil d’administration et de leur direction.

Un cabinet d’avocats, Norton Rose Fullbright, a analysé les divulgations de diversité de près de 200 sociétés et les chiffres sont pour le moins décevants, souligne Dustyn Lanz. Plus de la moitié des émetteurs (64,8 %) confirment ne pas avoir de représentation des minorités visibles dans les postes de cadres supérieurs, et un pourcentage encore plus grand d’émetteurs (75,4 %) signalent ne pas en avoir au sein de leur conseil d’administration (CA).

Ces chiffres explosent quand on regarde la représentation des autochtones, grimpant à respectivement 96,5 % pour la représentation dans les CA et 97,5 % pour la représentation dans les postes de cadres supérieurs.

Après analyse de ces chiffres, Norton Rose Fullbright calcule que la représentation moyenne des minorités visibles est de 4,7 % au niveau du conseil d’administration et de 7,4 % au niveau des cadres supérieurs. Ces pourcentages contrastent avec les données de Statistique Canada qui montrent que les minorités visibles constituent 22,3 % de la population canadienne, tandis que les autochtones représentent 4,9 % de plus.

Il semble donc clair que les entreprises canadiennes ont encore du chemin à faire en matière de diversité.

La diversité, synonyme de valeur

Il y a une valeur intrinsèque à avoir un lieu de travail diversifié et inclusif, ce qui signifie que les inégalités raciales sont synonymes d’opportunités perdues pour les entreprises et les investisseurs. Les arguments en faveur de la diversité et de l’inclusion sont assez convaincants en matière d’investissement.

Selon une étude de McKinsey, les entreprises dont les équipes de direction sont les plus diversifiées sur le plan ethnique ont 33 % de chances de surpasser leurs pairs en termes de rentabilité, tandis que les entreprises dont les conseils d’administration sont les plus diversifiés sur le plan ethnique dans le monde ont 43 % de chances de réaliser des bénéfices plus élevés.

Un autre rapport réalisé au Canada par le Centre pour l’innovation dans la gouvernance internationale affirme qu’une augmentation de 1 % de la diversité ethnoculturelle était associée à une augmentation moyenne de 2,4 % des revenus et à un gain de 0,5 % de la productivité sur le lieu de travail.

À l’inverse, un incident raciste peut avoir de graves conséquences, comme Starbucks l’a appris à ses dépens en 2018. La société a perdu près de 16,7 millions de dollars américains (M$ US) de ventes en raison d’un tel incident. L’entreprise a également vu sa réputation ternie par une couverture de presse négative à la suite de l’incident, que l’Apex Marketing Group a évalué à près de 16 M$.

Un besoin d’agir

On sent que le monde a besoin de changements et veut que la discrimination raciale cesse. En juin, le nouveau Conseil canadien des chefs d’entreprise contre le racisme systémique anti-Noir a annoncé sa création et lancé l’initiative BlackNorth pour accroître la représentation des Noirs dans les conseils d’administration et les bureaux de direction au Canada. BlackNorth a initié un engagement des chefs d’entreprise à prendre une série de mesures pour promouvoir la diversité raciale et l’intégration au sein de leurs organisations, que certaines entreprises ont déjà signé, dont le Mouvement Desjardins et Manuvie.

En plus de l’initiative BlackNorth, on constate que de nombreux aux mouvements et institutions  veulent que les choses changent. Certaines institutions se sont engagées à augmenter leur nombre d’employés issus des minorités dans les postes de direction comme la Banque Scotia et CIBC. RBC a quant à elle décidé de donner 1,5 M$ pour apporter son soutien direct aux communautés noires.

Une coalition de chefs d’entreprise noirs a récemment lancé le Black Opportunity Fund, un fonds qui soutiendra les organisations et les entreprises dirigées par des Noirs dans tout le pays.

Raven Indigenous Capital Partners, le premier intermédiaire financier social canadien dirigé et détenu par des autochtones, a lancé le Raven Indigenous Impact Fund en 2019 pour fournir du capital d’amorçage et une expertise technique aux entreprises autochtones en phase de démarrage.

De tels initiatives joueront un rôle important dans l’élimination du racisme systémique et la promotion des entreprises dirigées par des Noirs et des autochtones au Canada.

Il est également possible d’investir pour la justice raciale sur les marchés publics. Impact Shares a développé un fonds négocié en Bourse (FNB), appelé NAACP Minority Empowerment ETF. Ce fonds suit l’indice Morningstar Minority Empowerment Index, offrant une exposition aux entreprises américaines ayant de solides politiques de diversité raciale et ethnique. Impact Shares, qui est une organisation à but non lucratif, fait don de tous les bénéfices nets des frais de gestion du fonds à la National Association for the Advancement of Colored People, ce qui donne aux investisseurs un niveau supplémentaire d’impact social.

En conclusion, les investisseurs ont maintenant la possibilité d’agir et de contribuer à mettre un terme à des siècles d’injustice raciale en faisant progresser la diversité et l’inclusion dans leurs portefeuilles.