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Les ventes individuelles d’assurance invalidité se sont chiffrées à 89,4 M$ en 2017 au Canada, selon les données transmises par LIMRA.

«Le marché de l’assurance invalidité individuelle est très peu exploité. Et pourtant, il offre beaucoup de potentiel, car le risque d’invalidité est le plus important. Par exemple, un trentenaire a une chance sur trois de connaître une période d’invalidité avant sa retraite. Ses économies peuvent être anéanties, ce qui peut mettre l’avenir de ses enfants en péril», dit Eli Pichelli, auparavant vice-président aux ventes chez Penncorp et à La Capitale et maintenant consultant spécialisé en productivité des ventes.

En plus de 40 ans de carrière, il a maintes fois constaté qu’il est plus facile de vendre de l’assurance vie et des produits de placement que des produits de prestations du vivant.

«Bien des conseillers n’étudient les tenants et aboutissants de l’assurance invalidité qu’en vue d’obtenir leur permis. Trop souvent, ça s’arrête là», signale Eli Pichelli.

«Personne n’est invincible»

Vice-président assurances chez MICA Cabinets de services financiers, Louis Thibault ajoute qu’il n’y a pas si longtemps, bon nombre de conseillers se définissaient comme des spécialistes de l’assurance vie.

«Les choses ont changé, mais il reste des conseillers qui parlent peu d’assurance invalidité… et qui devraient en parler», dit-il.

D’après ce dirigeant de MICA, plusieurs conseillers font l’erreur de postuler que le client veut prioriser l’assurance vie aux dépens du reste.

«Cette erreur se base principalement sur la perception du prix. Les clients qui trouvent que l’assurance invalidité est trop dispendieuse sont aussi ceux qui se sentent invincibles. Il faut analyser concrètement leur situation particulière et leur démontrer, chiffres à l’appui, l’impact financier négatif d’une invalidité. Ça permet de comprendre que personne n’est invincible», dit Louis Thibault.

Président et chef de la direction de l’agent général AFL Groupe financier, Yan Charbonneau ajoute une autre explication.

«Si trop de conseillers n’ont pas le réflexe de proposer l’assurance invalidité à leurs clients, c’est peut-être qu’ils manquent de connaissances techniques. Les différences entre l’assurance invalidité et l’assurance vie sont presque aussi grandes qu’entre l’assurance de personnes et le monde du placement», avance-t-il.

Chose certaine, l’assurance invalidité recèle de nombreuses caractéristiques variant d’un produit à l’autre. Par exemple, comment l’invalidité est-elle définie ? Y a-t-il des clauses d’exclusion ? Quel pourcentage du revenu sera versé ? Quelle sera la durée des prestations ? Quel est le délai de carence ? La personne invalide devra-t-elle accepter toute possibilité d’emploi quelle que soit sa profession habituelle ? Optera-t-on pour un produit indexé sur l’inflation ? Y a-t-il remboursement de primes et à quelles conditions ?

«Le jeu en vaut la chandelle»

D’après Frédéric Perman, vice-président au développement d’affaires de l’agent général S_Entiel, ce produit est «vraiment complexe».

Afin de rendre ce produit compréhensible à ses clients, «il faut posséder la matière à fond et savoir la vulgariser. Mais le jeu en vaut la chandelle. Car tous ceux qui vendent de l’assurance invalidité de façon régulière ont du succès», dit Frédéric Perman.

Certes, il faut connaître le côté technique de la chose. Mais l’art d’établir une relation de confiance s’impose.

«Il faut avoir atteint un niveau de confiance suffisant entre conseiller et client, ce qui permet d’avoir des conversations difficiles. Ultimement, le secret de la vente se trouve dans la discussion. Et non pas dans le produit», dit Eli Pichelli.

Établi à Saint-Mathieu-de-Beloeil, le conseiller en sécurité financière et représentant en épargne collective Olivier Lapierre a mis au point une approche mettant l’assurance invalidité au premier plan.

«L’automobile de 30 000 $, on l’assure. Et pourtant, les gains annuels ne le sont pas. Qu’arriverait-il si on devenait invalide pendant trois ans ? C’est avec des images fortes de ce genre que j’approche certains clients par rapport à l’assurance invalidité. Je leur présente ce produit comme un moyen de protection du revenu», dit Olivier Lapierre.

Comment s’y prendre avec des gens qui croient qu’une assurance collective suffira à les couvrir ? «Dans certains cas, l’assurance collective peut suffire. Mais en raison de ses limites, c’est loin de s’appliquer à tous. Par exemple, certains clients ont besoin de générer des revenus mensuels de 6 000 $ ou 7 000 $, alors que leur assurance collective restreint leur couverture à 3 000 $ par mois», dit-il.

De plus, ajoute-t-il, bien des assurances collectives obligent d’éventuels bénéficiaires à accepter tout travail rémunérateur à la fin de la période d’invalidité prévue au contrat, qui peut être calculée en semaines. «Cette perspective n’est pas très attrayante pour un cadre d’entreprise ou un professionnel», constate Olivier Lapierre.

Experts recherchés

Selon Yan Charbonneau, «bien comprendre l’assurance invalidité exige beaucoup de formations individualisées de type one on one». C’est pourquoi il recommande aux conseillers désireux de mieux vendre ce produit de trouver un expert en la matière, par exemple, auprès de leurs agents généraux ou en s’alliant à d’autres conseillers ayant développé leur expertise en la matière.

Et il n’y a pas de doute, enchaîne Eli Pichelli, ils y trouveront leur compte. «Les produits d’assurance invalidité permettent de suivre les clients tout au long de leur vie professionnelle. Par exemple, si les revenus de l’un ont augmenté de 20 % en 2017, on pourrait alors lui proposer d’enrichir sa protection. Ce produit exige des ajustements continuels. En suivant ses clients de la sorte, on renforce ses liens. Et d’autres portes s’ouvrent !» dit Eli Pichelli.