Le président Donald Trump
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La rhétorique de Donald Trump telle qu’on nous la rapporte donne l’impression que les États-Unis sont sens dessus dessous. Or, pour les trois gestionnaires dont les fonds trônent au sommet de notre palmarès, l’économie et les marchés financiers américains ont grandement bénéficié d’un «effet Trump».

«Je ne suis certainement pas près de quitter le marché américain», dit David Sykes, directeur général, chef de l’équipe Gestion fondamentale des actions chez Gestion de placements TD.

Bon nombre d’investisseurs ayant quitté les États-Unis au moment de l’élection de Donald Trump ont raison aujourd’hui de s’en mordre les doigts. Jamais ils n’auraient anticipé que l’économie américaine, au dernier trimestre, croîtrait de 4,2 %, comme le souligne un rapport de Mawer Investment Management.

Le moteur économique américain tourne à plein régime, affirme Eric Benner, vice-président et gestionnaire de portefeuille chez Fonds Dynamique, à Toronto : «Les consommateurs se portent très bien, leurs bilans sont très bons, comme ceux des entreprises, où l’investissement est fort ; les dépenses gouvernementales battent leur plein et les exportations sont positives. On pourrait peut-être anticiper une récession et un marché baissier dans trois à cinq ans, mais on ne le voit pas à ce moment-ci.»

Ce tableau optimiste vaut pour les marchés financiers. Au deuxième trimestre, «les entreprises continuaient de battre les prévisions des analystes, dont les attentes étaient déjà élevées», note Jason Hans, gestionnaire de portefeuille chez BMO Gestion globale d’actifs, à Chicago.

«Au cours des dernières semaines, la volatilité s’est accrue», reconnaît-il, en ajoutant qu’«après la belle montée qu’on a connue, c’est normal».

Entre rhétorique et gestes concrets

L’«effet Trump» s’est exercé sur quatre axes. Le premier, le plus sensible, est l’énorme baisse d’impôt des entreprises – le taux d’imposition est passé de 35 % à 21 % -, qui a survolté les profits. «Elle a rehaussé de cinq à sept pour cent la rentabilité des entreprises», juge David Sykes.

Dans un deuxième temps, la baisse d’impôt a aussi provoqué un retour important de profits des entreprises qui sommeillaient à l’étranger. «Il n’y a pas eu un aussi important retour que ce à quoi on s’attendait», reconnaît Jason Hans, «il s’agit plutôt d’un retour progressif, qu’on pourrait voir s’étaler sur les prochaines années», ce qui continuerait à soutenir les dividendes payés aux investisseurs et l’investissement des entreprises.

Le troisième axe de l’«effet Trump» s’exerce de la façon la plus certaine : «Il s’agit du message de Trump aux entreprises selon lequel le gouvernement va leur laisser le champ libre» fait ressortir Bill McLeod, vice-président et gestionnaire de portefeuille chez Fonds Dynamique, à Toronto.

«Le coup d’éperon Trump tient à une confiance accrue que si vous faites des investissements, ils ne seront pas minés par un afflux de règlementation», ajoute-t-il.

Évidemment, l’«effet Trump» n’amène pas que du positif. Le débat sur les échanges commerciaux constitue le quatrième axe de l’«effet Trump». L’imposition réciproque de tarifs haussés tant par les États-Unis que par la Chine inquiète les marchés. Il n’y a pas encore eu d’effet perceptible sur les marchés, juge David Sykes, toutefois «si les investisseurs perçoivent des répercussions sur les chaînes d’approvisionnement mondiales, poursuit-il, cela pourrait influer sur les marchés, mais je ne crois pas que nous en sommes là encore.»

La résolution des négociations portant sur l’Accord États-Unis-Mexique-Canada donne raison d’espérer que les choses ne s’envenimeront pas. «Les marchés ne se sont pas préoccupés de l’enflure rhétorique et des menaces qui ont marqué les négociations, et ils ont eu raison ; les résultats sont moins négatifs que ce qui était anticipé», fait ressortir Eric Benner.

Rien n’est jamais parfait

Un autre vent contraire ne tient qu’en partie à Donald Trump ; il s’agit des deux menaces d’une inflation accrue (qu’une éventuelle guerre commerciale avec la Chine pourrait exacerber) et de taux d’intérêt haussés. «Évidemment, des taux en hausse jouent contre la Bourse, et c’est un risque, mais nous voyons encore du potentiel haussier dans les marchés», note Jason Hans.

Ce potentiel haussier tient à un marché boursier où les prix sont encore loin d’être surévalués, selon une opinion répandue. «À 16,8 fois les profits anticipés, alors qu’ils ont été historiquement d’environ 15, je dirais que le marché est évalué de façon juste, non pas surévalué», dit David Sykes, un avis que partage Bill McLeod.

Pour ces trois gestionnaires, il est essentiel de sélectionner des titres susceptibles de payer des dividendes et de les faire croître. Ils trouvent souvent ce genre de titres dans des secteurs plus conservateurs comme les financières, les soins de santé et l’énergie. «Pour un fonds de dividendes, des entreprises plus stables et arrivées à maturité présentent le territoire le plus attrayant à ce moment-ci», affirme Jason Hans.

Citigroup est un titre dans lequel Jason Hans trouve ces caractéristiques. De façon tout à fait inattendue, ce titre se négocie sous sa valeur comptable tout en fournissant un rendement en dividende de 2,6 %. «Citigroup est devenue beaucoup plus conservatrice [à la suite de la dernière crise financière], dit le gestionnaire. Elle a réduit son niveau de levier et s’est retirée de secteurs plus périphériques à sa mission centrale ; des taux plus élevés, s’ils surviennent, pourraient aider son activité.»

David Sykes ne répugne pas à aller du côté des technologies, à condition de privilégier des entreprises très mûres qui bénéficient de marchés où les obstacles à l’entrée sont formidables. C’est le cas de Microsoft, à qui la pénétration de 90 % de sa suite Office donne un quasi-monopole.

De plus, Microsoft est une entreprise dont les profits s’établissent régulièrement entre 10 et 12 % et qui a fait croître son dividende annuellement de 13 % au cours des cinq dernières années. «Je ne cherche pas un gros rendement en dividende de quatre ou cinq pour cent sans croissance, explique David Sykes. Je préfère un petit dividende qui croît fortement et qui va tirer le prix du titre à la hausse.»