wittaya / 123rf

Il existe plusieurs type de fiducies, qui ont chacune des caractéristiques bien précises. D’un point de vue administratif, il est important de bien comprendre le type de fiducie ainsi que les enjeux légaux et fiscaux pour ne pas la contaminer et pour éviter des erreurs pouvant mener à des factures fiscales indésirables. Voici quelques éléments clés à considérer.

D’abord, il faut prendre connaissance de l’acte de la fiducie pour bien saisir de quel type de fiducie il s’agit et quelle est l’étendue des pouvoirs de ses principaux acteurs. La plus commune est la fiducie familiale de fractionnement qui, dans bien des cas, détient des actions de sociétés privées.

Généralement, ce genre de fiducie ne détient aucun autre actif que les actions d’une société privée jusqu’au jour où se présente une transaction. Il peut arriver parfois que la fiducie doive ouvrir un compte bancaire pour souscrire aux actions des sociétés privées dont elle sera l’actionnaire. Dans certains cas, la fiducie devra emprunter pour avoir les liquidités dans son compte bancaire, ou encore l’institution financière devra accepter un découvert jusqu’à ce qu’un dividende soit payé sur les actions qui seront acquises par la fiducie. Le dividende permettra de transférer des liquidités à la fiducie. Pas question d’accepter un simple dépôt de l’un des principaux acteurs pour renflouer le compte. Un compte bancaire avec des frais mensuels pourrait aussi causer des problèmes fiscaux si, par exemple, un des bénéficiaires transfère des fonds de son compte bancaire pour couvrir le découvert.

Trop souvent surexcités d’avoir vendu, les clients veulent aller trop vite. Lors de la vente d’actions admissibles à la déduction pour gains en capital (DGC) par une fiducie, au moins 50 % du montant de la DGC demandée par bénéficiaire admissible de la fiducie doit être réellement versé de la fiducie au bénéficiaire en question avant le 31 décembre de l’année de la vente. Ainsi, en 2021, la fiducie devra payer au moins 446109 $ au bénéficiaire particulier qui réclamera la DGC en 2021. Il est important de s’assurer que la somme est réellement payée à un compte appartenant au bénéficiaire en question et investie (ou dépensée) par ce dernier. Ces transactions sont de plus en plus scrutées à la loupe par l’Agence du revenu du Canada.

Par ailleurs, lorsque la fiducie émet à l’un de ses bénéficiaires un billet payable sur demande, il sera préférable de payer le billet dans les trois ans. Aux fins des lois civiles, le billet pourrait s’éteindre par prescription trois ans après la signature, surtout si aucun intérêt n’est payé et autre geste n’est posé. La signature d’un nouveau billet pourrait être requise pour éviter tout problème légal ou fiscal. Le versement régulier des intérêts sur le billet peut éviter la prescription. Techniquement, le Curateur public devrait être informé lorsqu’un billet de 25000 $ et plus est payable à un enfant de moins de 18 ans.

Lorsque la fiducie a plutôt reçu un dividende en capital au cours de l’année, il n’y a pas d’urgence à verser ce dividende en capital à un individu bénéficiaire de la fiducie avant le 31 décembre de l’année. Si le dividende en capital n’est pas distribué avant la fin de l’année,

il devient du capital appartenant à la fiducie qui pourra être versé à n’importe quel individu bénéficiaire selon les volontés des fiduciaires. Toutefois, la distribution devra se faire avant la fin de l’année lorsque le dividende en capital doit être versé à une société par actions qui est bénéficiaire de la fiducie.

Lorsqu’un prêt au taux prescrit est accordé à une fiducie afin de fractionner ses revenus de placements avec ses bénéficiaires, y compris des enfants mineurs, il est généralement souhaitable de ne pas utiliser une fiducie familiale existante qui détient des actions de sociétés privées. Dans le cas contraire, la gestion de l’interrelation des différentes règles fiscales propres à chacune des stratégies pourrait s’avérer difficile. L’utilisation d’une fiducie distincte facilite la gestion des règles de l’impôt sur le revenu fractionné (IRF) dans le cadre de la stratégie de prêt au taux prescrit. De plus, lorsque des liquidités sont investies en fiducie, il faut se référer à l’acte pour savoir s’il ne contient pas de restrictions quant aux types de placements dans lesquels la fiducie peut investir. Il faut aussi faire attention aux pertes en capital qui sont emprisonnées en fiducie, ne pouvant pas être distribuées directement aux bénéficiaires.

Considérant que, pour certaines fins de la loi, chaque bénéficiaire d’une fiducie discrétionnaire est réputé détenir la totalité des actions de sociétés qui sont détenues par la fiducie, une trop longue liste de bénéficiaires peut causer des problèmes fiscaux indésirables. Par exemple, elle pourrait résulter en l’association de sociétés par actions et faire que le plafond du petit taux soit partagé ou réduit, voire perdu avec l’application des mesures relatives aux revenus passifs. La renonciation des bénéficiaires, disons, indésirables ou problématiques par acte notarié est généralement la solution. Toutefois, cette solution n’aura les effets escomptés que l’année suivante.

Avec les nouvelles mesures de divulgation, il est grand temps de faire le ménage dans la liste des bénéficiaires des fiducies. Tant qu’à y être, il est sage de consulter le testament des clients lorsqu’on lit l’acte de fiducie. Une omission classique est que le testament ne soit pas révisé en conséquence de la fiducie qui précise de se référer au testament en cas de décès ou d’invalidité.

Bref, une administration et une gestion adéquates de la fiducie sont importantes pour en tirer tous les avantages légaux et fiscaux, et pour éviter de vivre des cauchemars avec le fisc.

Annie Boivin est directrice générale, planification fiscale et successorale chez Samara bureau multifamilial