Une calculatrice et un tas de pièces sur une table. Devant un graphique financier qui monte et descend, derrière des feuilles de chiffres.
Baramee Chongchaeng / 123rf

Le secteur des fonds d’investissement alternatifs est encore jeune. La plupart des 37 produits qui composaient l’offre de tels fonds en juillet sont sur le marché depuis moins d’un an. Dans une note envoyée à des clients en juillet, une équipe d’analystes financiers de Marchés mondiaux CIBC, qui comprend Paul Holden, dresse un bilan de ce secteur.

L’actif sous gestion du secteur équivalait à 3,4 G$ lors de la parution de la note, par rapport aux quelque 1 500 G$ investis en fonds d’investissement. Le manufacturier 1832 Asset Management mène la parade sur le plan de l’actif, avec plus de 800 M$ d’actif, suivi par la Financière CI et Placements Mackenzie. Ces trois sociétés cumulaient 60 % de l’actif de ce secteur.

Les fonds alternatifs axés sur les actions représentent environ la moitié du total des actifs sous gestion avec 1,76 G$. Les fonds multistratégies sont l’autre grande catégorie de produits en importance avec 33 % des actifs sous gestion (1,14 G$).

Environ la moitié des fonds avaient un seuil d’investissement minimum de 500 $, ce qui favorise la croissance de ce secteur. L’autre moitié a un seuil d’investissement supérieur à ce montant.

Les frais de gestion de base moyens sur un fonds de série F sont de 0,91 %, d’après les analystes de Marchés mondiaux CIBC. La majorité des produits ont des frais qui varient de 0,9 % à 1,0 %. «C’est à peu près là où nous verrions la plupart des nouveaux produits de fonds d’actions. Le produit le moins coûteux a des frais de gestion de 0,45 % (CC&L Alternative Income Fund), et le produit le plus cher, de 1,25 % (Dynamic Alpha Performance II Fund)», lit-on dans la note.

La majorité des fonds vont facturer des frais de performance. Les frais de performance typiques varient de 15 à 20 %, même si quelques frais de performance de mandats de gestion de titres à revenu fixe s’établissent à 10 %.

Performance

Bien que leur feuille de route soit de très courte durée, les analystes de fonds ont tout de même analysé la performance des fonds à rendement absolu, des fonds d’actions visant à générer de l’alpha, et des fonds d’obligations qui visent à générer de l’alpha.

«Les fonds à rendement absolu génèrent des types de rendements que nous considérons comme intéressants. Le rendement moyen est sur le point d’atteindre un taux annualisé de l’ordre de 6 % à 8 %, un résultat normal ressemblant à un rendement des actions, et ces fonds réalisent ce rendement avec une volatilité qui ressemble davantage à celle d’un indice obligataire qu’à celle d’un indice boursier. La fourchette des rendements et de la volatilité des fonds suggère qu’il n’y a pas de prise de risque excessive», précise-t-on dans la note. Les rendements par les fonds de cette catégorie en 2019 variaient de 1,8 % à 6,9 %, avec une moyenne de 3,3 %.

«La performance des fonds de la catégorie des fonds d’actions visant à générer de l’alpha est également encourageante. Les fonds sont généralement conçus pour avoir un biais acheteur (bêta positif), mais avec une volatilité inférieure à celle du marché. Ils répondent à cet objectif», écrivent les auteurs de la note. Les rendements des fonds de cette catégorie en 2019 variaient de – 1,3 % à 17,8 %, avec une moyenne de 5,7 %.

Les conclusions pour les fonds de titres à revenu fixe visant à générer de l’alpha sont similaires à celles des fonds d’actions visant à générer de l’alpha. Les rendements par les fonds de cette catégorie en 2019 variaient de 3,3 % à 5,8 %, avec une moyenne de 4,3 %.

Vents favorables

Plusieurs facteurs favorisent une croissance de ce secteur, qui pourrait atteindre de 50 à 100 G$ en actif d’ici cinq ans, estiment les analystes financiers.

D’abord, un large éventail de sociétés de fonds ont attaqué le marché des fonds d’investissement alternatifs. Puis, certains fonds alternatifs sont déjà inclus dans des produits gérés, comme des fonds de fonds, observent les analystes de Marchés mondiaux CIBC : «Nos travaux suggèrent que les stratégies de placement alternatives avec une corrélation faible, voire nulle, avec les stratégies traditionnelles repoussent la limite d’efficacité pour les portefeuilles diversifiés. Nous pensons que cela devrait être très attrayant pour les produits gérés. Une allocation de 5 % en fonds communs alternatifs dans des solutions gérées représenterait 28 G$ d’actifs.»

En outre, l’expérience américaine avec les fonds alternatifs liquides a montré que la demande était la plus forte après une correction significative des marchés, et les auteurs de l’étude s’attendent à ce que ce scénario se produise aussi au Canada.

Vents contraires

Cependant, des vents de face pourraient ralentir la croissance de ce secteur. D’abord, les conseillers en épargne collective qui souhaitent offrir des fonds alternatifs devront suivre une formation supplémentaire, par exemple obtenir la note de passage pour le Cours sur le commerce des valeurs mobilières au Canada. «Il est possible que les exigences de compétence soient assouplies», d’après les analystes.

Puis, les courtiers sont réticents à ajouter les fonds alternatifs à leur liste de produits autorisés, leur attribuant une cote de risque plus élevée que ne le font les manufacturiers. «Il existe un décalage entre une cote de risque élevée et le mandat de placement de nombreux fonds communs alternatifs. Ce problème pourrait être résolu avec le temps, à mesure que les fonds alternatifs constitueront un historique de performance de trois ans. Peut-être qu’une solution à court terme peut être trouvée», écrivent les auteurs.

Par ailleurs, le processus sera graduel et lent, mais les émetteurs de fonds devront prendre le temps d’expliquer aux conseillers les avantages de l’ajout de fonds alternatifs dans leur offre de produits. Les conseillers devront à leur tour vulgariser auprès des clients les nouveaux concepts découlant des fonds alternatifs.

En outre, déjà des conseillers en placement offraient des fonds alternatifs du marché dispensé à des investisseurs accrédités. La venue des fonds alternatifs n’est donc pas une percée majeure.