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Active depuis plus d’une dizaine d’années, et ayant repris le cabinet de son père, Laurie Therrien a dû se faire une place et démontrer ses compétences à une clientèle un peu réticente au début. La jeune femme, qui est planificatrice financière, conseillère en sécurité financière et représentante en épargne collective, témoigne des difficultés qu’elle a rencontrées et juge que la maternité a été le plus grand défi de sa carrière, et l’est probablement pour la plupart des femmes dans l’industrie financière.

«Pour moi, le défi numéro un est la maternité, confie-t-elle. J’ai eu deux enfants, et ça implique que, pendant qu’on est enceinte, on rencontre nos clients qui s’inquiètent du fait qu’on va partir, pour combien de temps, et ce qui va se passer pour eux entre-temps. Donc, on les rassure en leur disant que ça va bien se passer, qu’on est préparé à ça, mais on a toujours cette peur de perdre des clients pendant le congé.»

Cette peur peut conduire les femmes à écourter leur congé de maternité ou même à garder certains liens avec le travail pendant le congé.

Laurie Therrien en a fait l’expérience. Pendant les premières semaines de ses congés de maternité, il lui arrivait de prendre des appels de clients ou d’envoyer des courriels, selon la nécessité, parfois en faisant ses tâches de jeune maman simultanément. Ses congés de maternité étaient aussi plus courts que la moyenne et duraient généralement de trois à quatre mois.

Pendant ces mois-là, plusieurs choses passent au second plan, notamment le développement des affaires. Donc, en plus de risquer de perdre la clientèle existante, les femmes ne peuvent pas prospecter, ce qui fait souvent stagner leur carnet de clients.

«Ceci étant dit, ça se fait bien et je suis très contente de l’avoir fait. Il faut juste avoir confiance en ses compétences et persévérer», note Laurie Therrien.

Toutefois, le travail effectué, les difficultés ne s’arrêtent pas là. En effet, les femmes ont souvent plus de barrières à l’entrée et plus de difficultés à accéder aux promotions que leurs collègues masculins. Et une différence de rémunération, qui demeure insurmontable dans la plupart des industries, s’ajoute.

«Je sais que ça s’est amélioré, mais on n’y est pas encore. Il faut qu’on en parle plus et que les femmes se forment davantage, notamment en profitant de formations données aux femmes par des organismes comme la chambre du commerce, dans le domaine de la gestion.»

Le piège qu’essayent d’éviter plusieurs dirigeantes est d’avoir un biais envers les femmes, que ce soit dans le recrutement ou dans la promotion d’un employé. C’est ce qui est souvent considéré comme de la discrimination positive, et qui peut parfois être déloyal, donc un défi de plus.

«Il y a de la place pour tout le monde, juge Laurie Therrien, qui fait face à ce même dilemme en tant que présidente et employeur. Il faut chercher l’équité plutôt qu’un favoritisme envers les femmes. Pour cela, il est important, en tant qu’employeur, d’avoir des outils de mesure de la performance qui sont très objectifs et qui incorporent le nombre d’années de service, l’évolution, l’expertise, etc.»

Les femmes et la crise du coronavirus

Depuis le début du confinement, le rythme de vie de la quasi-totalité de la population a été chamboulé. Cependant, plusieurs études montrent que les femmes sont plus pénalisées par les mesures de lutte contre le virus, tel que le confinement.

Elles se retrouvent à devoir gérer, pour la plupart, le télétravail ainsi que toute tâche reliée aux enfants. Un article du journal Le Monde révélait que les femmes assumaient, en moyenne, 70 % des tâches ménagères et familiales en confinement. Ceci laisse peu de temps pour l’accomplissement des tâches professionnelles, et certaines réunions virtuelles doivent être laissées de côté parce qu’il faut prendre soin des enfants. Inutile de dire quel impact ceci a sur la performance des employées et sur l’idée que s’en fait l’employeur.

Laurie Therrien conseille d’établir un emploi du temps clair, où les heures de travail de chacun sont fixées. Pendant ces heures, le partenaire doit assumer les tâches ménagères et celles reliées aux enfants.

«Il faut avoir une organisation rigoureuse de la planification des tâches ménagères et familiales et des tâches professionnelles, explique-t-elle. Il faut aussi que les employeurs comprennent la réalité de leurs employés et qu’ils s’adaptent en conséquence.»

Elle prône également une grande ouverture d’esprit de la part des dirigeants, afin qu’ils puissent comprendre les circonstances de chacun, et surtout d’être à l’affût de tout changement. Il faudrait de plus qu’ils lancent une consultation auprès de leurs employés afin d’établir si un retour dans les bureaux est possible et adéquat.