Projet de loi 98: questions d'ordre
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FI a donc demandé aux responsables de ces deux organismes les réflexions que leur inspire le projet de loi 98, sur la Loi modifiant diverses lois concernant principalement l’admission aux professions et la gouvernance du système professionnel.

Le projet est l’occasion pour Jocelyne Houle-Lesarge, présidente et chef de la direction de l’IQPF, de rappeler l’importance de la création d’un ordre professionnel des planificateurs financiers.

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« Nous sommes un des premiers organismes où la formation continue a été obligatoire, bien avant la majorité des ordres, affirme-t-elle pour appuyer sa revendication. Nous nous sommes donné un code d’éthique et de déontologie spécifique aux planificateurs, poursuit-elle, mais on n’a pas le pouvoir de l’imposer. Nous pouvons décerner le titre, mais nous n’avons pas le pouvoir de l’enlever. C’est ce bout-là qui nous manque. »

Faut-il comprendre que l’IQPF souhaite se métamorphoser en ordre ? Jocelyne Houle-Lesarge s’en défend bien. « On demande au gouvernement de créer un ordre pour les planificateurs, s’empresse-t-elle de préciser ; on ne demande pas que l’IQPF devienne l’ordre. »

Même son de cloche du côté de l’APCSF. « Nous sommes en faveur d’un ordre, notre association en a souvent fait la proposition, dit Flavio Vani, président de l’APCSF. Nous voulons être reconnus en tant que professionnels des services financiers professionnels. »

Un tel ordre relèverait de l’Office des professions, non pas de l’AMF, conviennent tant Jocelyne Houle-Lesarge que Flavio Vani. Car, précise ce dernier, « un ordre s’occupe des individus, l’AMF supervise les cabinets de professionnels. »

De la Chambre à l’Ordre

Selon Flavio Vani, la voie à suivre la plus évidente serait de transformer la CSF en un ordre: « Elle a presque déjà tout d’un ordre, notamment le syndic et la code de déontologie».

Toutefois, il reconnaît que la CSF n’a jamais manifesté une telle intention. « Ils vont dire que le domaine financier est trop large, qu’il y a trop de différences entre les types de participants. Mais au fond, de quoi parle-t-on essentiellement ? D’hypothèques, de placements, de plans de retraite. Ce n’est pas si sorcier que ça. »

Par ailleurs, juge Flavio Vani, il y aurait tout un ajustement à faire du côté de la formation des représentants financiers pour faire de la CSF un ordre. « Elle n’exige pas de niveau de scolarité ni de cursus de cours fixes pour accéder à la profession, dit-il, et elle ne contrôle pas l’émission de licences. »

Selon nos deux interlocuteurs, toute formation des membres relèverait d’un ordre. Cela n’empêche pas que l’IQPF demeure un organisme distinct d’un ordre éventuel. « Il y a le Barreau et l’école du Barreau, » donne en exemple Jocelyne Houle-Lesarge.

Dans le cas d’un ordre de professionnels en conseil financier (soit une CSF transformée) la formation relèverait de celui-ci, reconnaît Flavio Vani, mais il faudrait qu’elle soit rendue beaucoup plus rigoureuse que les quelques cours et examens de l’AMF présentement requis.

Charité bien ordonnée

La question de l’accréditation des immigrants et du processus de leur accession à diverses professions est un enjeu majeur du projet de loi 98. C’est une question dont nos deux interlocuteurs reconnaissent l’importance cruciale.

« Trop de gens qualifiés se retrouvent à conduire des taxis et ne sont pas reconnus », lance Jocelyne Houle-Lesarge. Elle introduit toutefois un gros bémol : la question d’un ordre des planificateurs financiers aurait dû avoir priorité. « On a des professionnels, pourtant on ne les reconnaît pas à titre de membres d’un ordre professionnel. »

Un élément du projet de loi 98 qui soulève l’ire de Flavio Vani tient à la permission que le projet entend accorder au syndic des diverses professions d’accorder une immunité contre toute plainte devant le conseil de discipline à un professionnel impliqué lui-même dans une infraction.

Bien qu’un tel article reprenne une disposition du code criminel, Flavio Vani s’y oppose avec véhémence. « Nous sommes dans le domaine financier ; la vie de personne est en danger, ici », dit-il.

À l’heure actuelle, devant une telle plainte anonyme, un professionnel ne sait pas quelle accusation pèse sur lui ni d’où elle provient. « Je devrais savoir qui me poursuit, connaître la preuve qui pèse sur moi et avoir la possibilité de me défendre, insiste-t-il. Souvent, ces poursuites proviennent d’individus revanchards. Je ne veux pas vivre dans une société d’espions et de délateurs ! »