Serge Lessard – Finance et Investissement https://www.finance-investissement.com Source de nouvelles du Canada pour les professionnels financiers Tue, 09 Apr 2024 15:25:23 +0000 fr-CA hourly 1 https://wordpress.org/?v=5.9.3 https://www.finance-investissement.com/wp-content/uploads/sites/2/2018/02/cropped-fav-icon-fi-1-32x32.png Serge Lessard – Finance et Investissement https://www.finance-investissement.com 32 32 Les subtilités du projet de loi sur l’union parentale https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/serge-lessard/les-subtilites-du-projet-de-loi-sur-lunion-parentale/ Wed, 10 Apr 2024 10:22:40 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=100124 Réponses à 10 bonnes questions sur ce projet de Québec.

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À l’occasion du jugement ultra médiatisé de la Cour suprême du Canada dans l’affaire Éric c. Lola1 en 2013, cette Cour avait jugé à 5 juges contre 4 que le fait d’attribuer des droits aux conjoints mariés et de ne pas en attribuer aux conjoints non mariés constituait de la discrimination. Cependant, un de ces 5 juges avait aussi conclu que cette discrimination était justifiée dans les circonstances. C’est dans ces circonstances qu’une réforme du droit de la famille a été entreprise.

La réponse du gouvernement du Québec

Le jeudi 28 mars 2024, le ministre de la Justice Simon Jolin-Barette a déposé le projet de loi 56 intitulé Loi portant sur la réforme du droit de la famille et instituant le régime d’union parentale. Essentiellement, le projet de loi vise à créer un nouveau régime de droit familial appelé « Union parentale » qui aura plusieurs effets, notamment la création d’un patrimoine d’union parentale, qui ressemble au patrimoine familial pour les couples mariés ou en union civile, avec toutefois une portée plus limitée, une prestation compensatoire et une protection pour la résidence familiale.

Bien sûr, il ne s’agit pour l’instant que d’un projet de loi, ce qui signifie qu’il n’a pour le moment aucune force. Ce projet de loi n’en est qu’à l’étape de la présentation c.-à-d. la première des 5 étapes nécessaires pour en faire une loi. Il pourrait être fortement modifié ou même n’être jamais adopté.

Nos commentaires ne visent qu’à expliquer les impacts potentiels du projet de loi tel que présenté. Ils ne visent nullement à évaluer la pertinence ou non des éléments du projet. De plus, le fait que le projet soit une nouveauté nous amène à dire souvent « il semblerait » dans le présent texte. Il faut donc prendre les informations qui suivent avec un grain de sel.

  1. Qui est visé ?

Ce nouveau régime de droit matrimonial, l’union parentale, vise les conjoints de faits, de mêmes sexes ou de sexes différents, dont un enfant commun naît, ou est légalement adopté, après le 29 juin 2025. Si le couple a déjà des enfants nés avant cette date, il n’est visé que si un nouvel enfant naît après cette date, et l’union parentale ne prendra effet qu’à partir du moment de cette nouvelle naissance, sans rétroactivité. Si les parents ont un enfant qui naît après le 29 juin 2025 et qu’ils ne sont pas conjoints de fait, mais le deviennent ou le redeviennent, l’union parentale s’appliquera à eux dès le moment où ils deviennent ou redeviennent conjoints de fait, après la naissance de cet enfant.

L’union parentale ne vise que les conjoints de fait. Selon le projet de loi, des conjoints de fait sont, uniquement pour les fins de ce projet de loi : « … deux personnes qui font vie commune et qui se présentent publiquement comme un couple, sans égard à la durée de leur vie commune. Sont présumées faire vie commune les personnes qui cohabitent et qui sont les père et mère ou les parents d’un même enfant. ». À première vue, il semblerait qu’une absence de vie commune ou une séparation alors que l’enfant est conçu, mais non encore né empêcherait l’assujettissement à l’union parentale.

La vie commune est une question de fait et n’est pas seulement reliée à la cohabitation. Pour déterminer si des personnes font vie commune ou non, la jurisprudence en général a déterminé que les éléments suivants doivent être pris en compte2 :

  • L’attachement
  • La cohabitation des parties
  • L’existence d’un projet commun de vie entre les parties
  • Le soutien affectif
  • Le secours mutuel
  • La mise en commun ou le partage des revenus, des actifs ou des dépenses
  • Le partage d’intérêts communs
  • La vie sociale
  • Les loisirs
  • Les sorties
  • La durée, la continuité et la stabilité de la relation
  • La notoriété de la vie commune

Aucun de ces éléments n’est déterminant à lui seul et l’absence de cohabitation, bien que fortement révélatrice, n’exclue pas automatiquement qu’il y ait vie commune.

Le ministre a déclaré que les personnes qui ne se qualifient pas pour l’union parentale alors qu’ils ont des enfants, mais qu’aucun n’est né après le 29 juin 2025 pourront effectuer un choix de s’assujettir volontairement à l’union parentale.

  1. Y a-t-il des exceptions aux personnes visées par l’union parentale ?

Des personnes qui sont l’une par rapport à l’autre un frère ou une sœur ne peuvent être assujetties volontairement ou par défaut à l’union parentale. Il en est de même pour des personnes qui sont ascendantes et descendantes l’une par rapport à l’autre. De plus, l’union parentale ne s’applique pas aux conjoints s’ils sont mariés (ou unis civilement) entre eux ou si l’un est marié (ou uni civilement ou en union parentale) avec une autre personne.

  1. Qu’est-ce que l’union parentale ?

L’union parentale est un régime de droit matrimonial. C’est un statut pour les conjoints de fait. À titre d’exemple, des conjoints qui choisissent de passer par le processus du mariage acquièrent le statut de conjoints mariés, ainsi que les droits et obligations qui viennent avec. Dans le cas de l’union parentale, il n’y a aucun processus juridique à suivre, à moins de s’assujettir volontairement lorsqu’on ne se qualifie pas. Dès la naissance d’un enfant après le 29 juin 2025, les conjoints de fait acquièrent automatiquement le statut de conjoint en union parentale.

Ce statut aura des effets sur certains aspects juridiques seulement à titre d’exemple, sur la création du patrimoine d’union parental. Ce statut de conjoint en union parentale ne changera pas le fait que, pour plusieurs autres aspects juridiques, les conjoints de fait garderont le simple statut de conjoint de fait (à titre d’exemples, aux fins de la réversibilité et de la priorité de paiement au conjoint au décès des régimes de retraite) pour autant qu’ils se qualifient selon les critères des lois pertinentes. Notez aussi qu’il ne semble y avoir aucun effet de l’union parentale sur les désignations de bénéficiaire d’assurance vie et de contrats de fonds distincts.

  1. Peut-on s’exclure de l’union parentale ?

Il semble que les conjoints de fait pourront se retirer volontairement des règles sur le patrimoine d’union parentale et non pas se retirer de l’union parentale elle-même. Elles pourront le faire en cours d’union, devant notaire. Si un tel retrait survient dans les 90 jours du début de l’union, le patrimoine d’union parentale est réputé n’avoir jamais existé.

Puisqu’il ne sera pas possible de se retirer de l’union parentale elle-même, les nouvelles règles sur la prestation compensatoire, la protection de la résidence principale et sur la dévolution légale seront maintenues.

 

  1. Qu’est-ce que le patrimoine d’union parentale ?

Dès que les conjoints acquièrent le statut de conjoints en union parentale, il y a création d’un patrimoine d’union parentale. Ce patrimoine vise la résidence familiale, les meubles et les véhicules automobiles. Le fonctionnement de ce patrimoine d’union parentale ressemble beaucoup, sans être complètement identique, au fonctionnement du patrimoine familial, ce dernier ne s’appliquant qu’aux personnes mariées ou unies civilement. Comme le patrimoine familial, il ne s’agit pas d’un patrimoine dont les deux conjoints deviennent propriétaires 50 %-50 % d’un bien. Dans les faits, si la maison appartient à 100 % à un des conjoints, elle demeure la pleine propriété de ce conjoint. S’il y a séparation, décès ou retrait, il y aura partage de la valeur des biens du patrimoine d’union parentale.

  1. Qu’est-ce qui fait partie du patrimoine d’union parentale ?

Le patrimoine d’union parentale inclus :

  • La résidence familiale (une seule résidence). La résidence familiale est celle choisie par les conjoints en union parentale. En l’absence de choix exprès, la résidence familiale est présumée être celle où les membres de la famille habitent lorsqu’ils exercent leurs principales activités. Il n’y a qu’une seule résidence familiale. Contrairement au patrimoine familial, les résidences secondaires ne sont pas incluses. Les droits qui confèrent l’usage de la résidence familiale sont aussi inclus. Ceci pourrait possiblement couvrir certains cas où la résidence familiale est détenue par une société ou par une fiducie.
  • Les meubles qui garnissent ou ornent la résidence familiale et qui servent à l’usage du ménage. Ceci exclurait potentiellement les objets de collection.
  • Les véhicules automobiles utilisés pour les déplacements de la famille. Ceci pourrait autant inclure une motoneige si elle sert à se rendre au chalet familial (déplacement de la famille), mais probablement pas si la motoneige ne sert qu’à faire de la randonnée (loisir de la famille).

On peut remarquer que, contrairement au patrimoine familial qui s’applique aux conjoints mariés ou unis civilement, le patrimoine d’union parentale n’inclut pas, entre autres, les Régimes enregistrés d’épargne-retraite (REER), les Fonds enregistrés de revenu de retraite (FERR), les régimes de retraite et les gains inscrits au Régime de rentes du Québec (RRQ).

Les conjoints pourront modifier ensemble, en cours d’union, le contenu assujetti au patrimoine d’union parentale pour en exclure ou y inclure certains types de bien. Les exclusions devront se faire par acte notarié en minute.

La valeur du patrimoine d’union parentale est constituée de la valeur des biens mentionnés, mais plus précisément de la valeur qui a été acquise pendant l’union parentale. À titre d’exemple :

  • Une maison détenue par un des conjoints et 100 % payée par ce conjoint avant le début de l’union parentale serait incluse dans le patrimoine d’union parentale, mais aurait une valeur partageable égale à zéro.
  • Une maison détenue par un des conjoints, 60 % payée (donc 40 % hypothéquée) avant le début de l’union parentale et dont 25 % de l’hypothèque (10 % de la valeur de la maison) est payée durant l’union parentale aurait une valeur partageable égale à 10 %.
  • Une maison détenue par les conjoints à raison de 50 % chacun est déjà partagée 50 %-50 %. Il faudra peut-être la vendre pour en obtenir la valeur au comptant.
  • La plus-value sur la portion non partageable détenue au moment du début de l’union parentale est elle-même non partageable.
  • À première vue (cet élément n’est pas clair), il semble que la valeur payée (pour l’achat ou le remboursement de l’hypothèque) durant l’union parentale à même des sommes détenues avant l’union parentale (incluant les revenus sur ces sommes) sera exclue du partage. Il nous semble que ceci diffère des règles du patrimoine familial.
  • Les apports provenant des biens possédés avant la constitution du patrimoine d’union parentale et les biens échus par donation ou succession et le remploi de tous ces biens (incluant les revenus sur ces sommes) seront déduits de la valeur partageable
  1. Quand l’union parentale se termine-t-elle ?

L’union parentale prend fin par la séparation, par le mariage ou l’union civile des conjoints ou d’un conjoint avec un tiers, ou par le décès. Elle entraîne le partage du patrimoine d’union parentale. Dans le cas de la séparation, il suffit de la manifestation expresse ou tacite de la volonté d’un ou des conjoints de mettre fin à l’union. Ceci met fin à l’union parentale immédiatement et il faudra procéder au partage de la valeur du patrimoine d’union parentale.

  1. Que se passe-t-il à la séparation ?

À la séparation, la valeur du patrimoine d’union parentale sera partagée 50 %-50 %. Cette valeur pourra être payée par le versement d’une somme au comptant (laquelle pourrait être étalée sur une période), par le transfert de la propriété ou d’une partie de la propriété du bien (dation en paiement) ou par le transfert de propriété d’un autre bien (si les ex-conjoints s’entendent là-dessus).

  1. Que se passe-t-il au décès ?

Au décès, le patrimoine d’union parentale est partageable dans les mêmes proportions que lors d’une séparation.

Le conjoint survivant à qui une somme est due en vertu de ce partage peut la réclamer de la succession de son défunt conjoint. Il s’agit d’une créance payable par la succession avant le paiement de tout legs.

Lorsqu’une somme est due par le conjoint survivant à la succession en vertu de ce partage, cette somme devra lui être versée. Elle servira d’abord à payer les éventuelles dettes de la succession et le reste de la succession ira aux héritiers. S’il n’y a pas de testament, deux tiers de la somme restante ira aux enfants et un tiers de la somme restante ira au conjoint. Notez que le projet de loi prévoit que le conjoint en union parentale qui faisait vie commune avec le défunt depuis plus d’un an se qualifie désormais pour ce tiers contrairement au conjoint en simple union de fait. Si un testament existe, la somme restante sera dévolue selon celui-ci. Et si l’héritier en vertu du testament (ou par dévolution légale (ab intestat)) est une personne autre que le conjoint survivant, ce conjoint survivant perdra une partie de ses actifs. Clairement, il faudra réviser les testaments existants !

  1. En quoi ce projet de loi peut-il avoir un impact sur le travail des conseillers ?

Si ce projet de loi est éventuellement adopté tel quel, le travail du conseiller pourrait être touché de plusieurs façons :

  • Le citoyen moyen a déjà de la difficulté à s’y retrouver parmi les règles actuelles du mariage, de l’union civile et de l’union de fait. Le conseiller pourrait avoir à faire de l’éducation auprès de leurs clients.
  • Le conseiller devra distinguer les différents statuts afin d’indiquer le bon statut dans les différents formulaires. Une adaptation sera nécessaire.
  • Le statut d’union parentale ne sera valide qu’au Québec puisqu’il s’agit d’un champ de compétence provinciale. Il faudra s’assurer d’indiquer le bon statut dans les documents fédéraux.
  • Le paiement de la créance du patrimoine d’union parentale pourrait être effectué par le transfert de presque tous genres d’actifs (y compris ceux qui ne font pas partie du patrimoine d’union parentale), tels REER, FERR, compte d’épargne libre d’impôt (CELI), régimes de retraite ou placements non enregistrés. Le conseiller pourrait avoir à gérer ces transferts.
  • Les conseillers pourraient offrir d’assurer la vie des conjoints en fonction du risque de perdre une partie de leur patrimoine au profit d’héritiers tiers ou au profit des créanciers du conjoint défunt.
  • Le planificateur financier devra revoir ses planifications existantes dans plusieurs cas.
  • Une assurance pourrait constituer une sûreté lorsque le paiement de la valeur du patrimoine parental se fait sur plusieurs années.
  • Les clients pourraient vouloir revoir leur testament afin d’y inclure une clause de renonciation au partage ou un legs des droits du patrimoine d’union parentale.
  • L’équité successorale souhaitée par certains clients pourrait ne plus être atteinte. La planification successorale pourrait devoir être révisée afin de considérer les droits du conjoint de fait en union parentale.
  • Les conseillers pourraient avoir à maintenir séparés les investissements faits avant le début de l’union parentale de ceux faits après le début de l’union parentale.

Une chose est certaine : nous suivrons l’évolution de ce projet de loi de près !

Serge Lessard, avocat, pl. fin., FLMI, Vice-président adjoint régional pour le Québec (Investissements), Service de fiscalité, retraite et planification successorale, Gestion de placements Manuvie

Cet article a été rédigé à titre informatif et il ne constitue pas une opinion juridique, fiscale, de placement ou de planification financière. Tout client ou conseiller qui est dans une telle situation devrait s’assurer de bien comprendre les notions applicables à sa situation propre. Il devrait aussi obtenir des conseils d’un professionnel pour savoir si le contenu s’applique ou non à sa situation. De plus, cet article est basé sur un projet de règlement non encore adopté. Les commentaires sont donc hypothétiques.

1 – Québec (Procureur général) c. A, 2013 CSC 5, [2013] 1 R.C.S. 61

2 – Voir le texte de la professeure Brigitte Lefebvre, notaire : « Conjoints de fait : Concept de vie maritale et autres problèmes », Congrès 2018, Collection APFF, 3 octobre 2018.

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Plafond de retrait des FRV : les effets sur vos clients https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/serge-lessard/plafond-de-retrait-des-frv-les-effets-sur-vos-clients/ Fri, 01 Mar 2024 11:16:41 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=99381 ZONE EXPERTS - Les changements possibles au règlement engendrent une série d’effets sur les clients, avant et après leur décaissement.

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La modification à la Loi sur les régimes complémentaires de retraite et le projet de règlement actuellement à l’étude créent une série de conséquences potentielles sur différents aspects juridiques et fiscaux des clients. Ces conséquences auraient même des effets sur la conformité des conseillers. Voici une analyse de ces effets, en lien avec le texte suivant : Abolition potentielle du plafond de retrait des FRV québécois.

Effets sur le FRV avant le décaissement

La portée de ces changements est majeure en planification financière, car ils touchent les autres domaines qui devront faire l’objet d’une analyse selon les besoins et les objectifs des clients.

  1. Les FRV fédéraux et les FRV des autres provinces

Les changements mentionnés ne concernent que les FRV sous juridiction québécoise, incluant aussi les FRV dont les sommes proviennent à l’origine d’un régime de retraite public (RREGOP, RRPE, etc.). Donc, les FRV des autres provinces ne sont pas concernés.

De plus, les Québécois qui exercent un emploi dans un champ de compétence fédérale (banques, télécommunication, lignes aériennes, etc.) soumis à la Loi de 1985 sur les normes de prestation de pension obtiendront en fin de compte un FRV fédéral (et possiblement un FRVR). Ces FRV fédéraux ne sont pas concernés par ces changements.

  1. Possibilité de retrait d’un FRV à partir de 55 ans

Oui, en effet, le titulaire du FRV québécois âgé de 55 ans ou plus pourra vider son FRV aussi rapidement qu’il le désire. Ceci s’applique autant pour le titulaire d’un FRV qui a participé au régime de retraite d’origine que pour le titulaire d’un FRV qui l’a acquis par divorce, séparation de corps, dissolution de l’union civile ou par entente relative à la fin de l’union de fait.

  1. L’imposition

Aucun changement. Chaque dollar retiré est imposable. Le choix d’un montant de retrait plus élevé pourrait cependant amener ceux-ci à être imposés à des taux effectifs marginaux d’imposition (TEMI) supérieurs (ce qui inclut l’impact sur les pertes de crédits, déductions ou prestations).

  1. La protection contre les créanciers

La protection contre les créanciers pour un FRV peut résulter de plusieurs éléments. Tout d’abord, étant donné qu’un FRV est un FERR, il bénéficie de la protection contre les créanciers de l’article 67 de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité (LFI), dans les situations où il y a faillite. Également, la LRCR, en vertu de son article 264, rend insaisissables les sommes transférées au CRI et au FRV. Veuillez toutefois noter que certains CRI et FRV créés avec des sommes en provenance des régimes publics (RREGOP, RRPE, etc.) ne bénéficient pas des effets de l’article 264 LRCR.

Ensuite, la disparition du plafond de retrait à partir de 55 ans a-t-elle pour effet de rendre les FRV plus vulnérables aux saisies? Les tribunaux devront certainement répondre à cette question tôt ou tard. Et leur réponse sera peut-être nuancée selon que le FRV émane de la LRCR ou d’un régime public offrant moins de protection. Voici des scénarios possibles (ces scénarios ne constituent pas une opinion juridique) :

  • La protection de la LFI s’applique en cas de faillite aux deux types de FRV, car l’article 67 couvre les FERR sans distinction. Il s’agit d’un scénario en faveur duquel il y aurait une protection contre les créanciers.
  • Dans le cas d’une saisie hors faillite (saisie exécution selon le Code de procédure civile du Québec), l’article 264 de la LRCR ne fait aucune distinction relativement au fait qu’il y ait limite de retraits du FRV à partir de 55 ans ou non. Il s’agit d’un scénario en faveur duquel il y aurait une protection contre les créanciers pour les FRV en provenance d’un régime de retraite privé.

Il est possible que ce scénario ne trouve pas son application pour un FRV en provenance d’un régime de retraite public qui n’accorde pas autant de protection que la LRCR. En effet, selon le principe en vertu duquel le créancier n’a pas plus de droits que celui qui se fait saisir, l’accès aux sommes par le titulaire donne-t-il le droit au créancier d’en faire autant? Encore une fois, les tribunaux nous le diront.

Quoi qu’il en soit, en matière de protection contre les créanciers, il est souvent plus facile de rajouter des couches de protection supplémentaires que de tenter de deviner les probabilités qu’une protection s’applique ou non. Pour les personnes qui sont préoccupées par cet aspect, il demeure toujours intéressant d’investir les sommes du FRV dans un contrat de fonds distinct ou dans un contrat de rente d’accumulation à intérêt garanti (et même, idéalement, un contrat qui combine les deux) avec une désignation de bénéficiaire appropriée.

  1. La permission du conjoint

Comme pour les autres retraits du FRV (et ceux du CRI), le paiement en un ou plusieurs versements à partir de 55 ans ne nécessite pas la permission du conjoint. Notez que la permission du conjoint est parfois nécessaire pour certains retraits de régimes fédéraux.

  1. La priorité de paiement au conjoint au décès

Au décès, les sommes accumulées dans un CRI ou un FRV sont versées directement au conjoint qui se qualifie à ce titre et non pas à la succession (il y a une exception en cas de jugement en séparation de corps). Cette règle ne s’applique généralement pas aux CRI et FRV acquis par l’ex-conjoint dans le cadre d’un divorce, d’une séparation de corps, d’une dissolution d’union civile, ni d’une fin de l’union de fait.

Visiblement, l’élimination de la limite de retrait des FRV pour les détenteurs de 55 ans ou plus ne touche en rien la priorité de paiement au conjoint. Rien ne change de ce côté.

  1. Régime d’accession à la propriété (RAP)

Il est possible d’utiliser le Régime d’accession à la propriété (RAP) pour les sommes se trouvant dans un REER. Une personne de 55 ans et plus pourrait en avoir besoin, particulièrement après une séparation. Cependant, le RAP ne peut pas être utilisé pour les sommes se trouvant dans un FERR. Or, un FRV est un FERR au niveau fiscal. Puisque la levée de la limite de retrait sur les FRV pour les 55 ans et plus est jumelée à l’impossibilité de transférer les sommes vers le REER (ou FERR), l’utilisation du RAP devient non accessible. Convertir le FRV en CRI n’aide en rien si l’on ne peut pas retirer directement du CRI.

  1. Régime d’encouragement à l’éducation permanente (REEP)

Les commentaires faits pour le RAP trouvent leur application pour le REEP, avec les adaptations nécessaires.

  1. Patrimoine familial

La portion du FRV accumulée durant le mariage fait partie du patrimoine familial, peu importe qu’il y ait des limites ou non sur le décaissement. L’abolition du plafond de retrait à partir de 55 ans ne change rien à l’inclusion ou non du FRV dans le patrimoine familial.

  1. Transfert à un Compte d’épargne libre d’impôt pour l’achat d’une première propriété (CELIAPP)

Le projet de règlement n’interdit pas le transfert à un CELIAPP. Cependant, la loi fiscale ne permet qu’un transfert d’un REER au CELIAPP (sans dépasser les droits de cotisations CELIAPP), et non le transfert d’un FERR à un CELIAPP. Le FRV étant un FERR, un tel transfert n’est pas possible.

Cependant, un retrait imposable du FRV et une cotisation déductible au CELIAPP (sous réserve du plafond annuel) peut permettre d’investir au CELIAPP dans l’objectif de l’achat d’une habitation admissible. Si le retrait FRV excède le minimum de retrait obligatoire, une retenue à la source sera applicable. Ainsi, une logistique de gestion de liquidité devra être prévue afin de contribuer au CELIAPP l’équivalent du montant brut du retrait FRV et la retenue sera récupérée via la déclaration de revenu.

  1. Ancienne technique de désimmobilisation du revenu viager entre le minimum et le maximum FRV

Depuis longtemps, les conseillers utilisent la technique de désimmobilisation par conversion. Cette technique consiste à convertir un CRI en FRV, retirer le maximum du revenu viager, non pas en espèce, mais plutôt par transfert direct vers un REER, et de finalement reconvertir le FRV restant en CRI. Une technique exigeante et qui comporte son lot d’erreurs administratives des conseillers, des clients et des autorités fiscales!

Le projet de règlement interdit clairement les transferts du FRV dans un REER ou un FERR, peu importe l’âge. Ceci devrait mettre fin à la technique de désimmobilisation par conversion.

Effets sur les sommes retirées du FRV

Retirer des sommes du FRV dans le but de réinvestir les sommes nettes dans un autre véhicule de placement apporte son lot de conséquences financières :

  1. Élimination potentielle de la priorité de paiement au conjoint

Généralement, la priorité de paiement au conjoint est une épine dans le pied de la planification successorale pour les clients qui souhaitent léguer leurs avoirs à leurs enfants ou à toute autre personne que leur conjoint (souvent des conjoints de fait depuis peu d’années).

Parfois, cette priorité est utile puisque les sommes ne passent pas par la succession et sont payées directement au conjoint. Ceci permet un versement après décès nettement plus rapide et le tient généralement à l’écart des créanciers de la succession. Sans l’établissement d’une fiducie ni la priorité de paiement au conjoint, ces deux effets sont quasi impossibles à réaliser avec des fonds communs de placement, des actions et des obligations, car ceux-ci tombent par défaut dans la masse successorale. Si la priorité est éliminée et qu’on veut retrouver ces deux derniers effets sans créer une fiducie, il faudra investir les sommes après impôt dans des contrats de fonds distincts et des contrats de rente d’accumulation à intérêt garanti en prenant soin de désigner un bénéficiaire.

Les sommes retirées du FRV ne sont plus sujettes à la priorité de paiement au décès. Le titulaire devient libre de ses choix successoraux.

  1. Élimination potentielle de la protection contre les créanciers

À partir du moment où les sommes du FRV sont retirées et mélangées aux autres actifs personnels, la protection contre les créanciers ne devrait plus s’appliquer. Si on veut retrouver une protection contre les créanciers sans conserver le FRV, il faudra investir les sommes après impôt dans des contrats de fonds distincts et des contrats de rente d’accumulation à intérêt garanti, en prenant soin de désigner un bénéficiaire qui qualifie le contrat aux fins de la protection contre les créanciers. Notez qu’il faut être solvable au moment où la désignation qualifiante est effectuée et au moment de chaque dépôt dans le contrat, à défaut de quoi la protection contre les créanciers pourrait être remise en question.

  1. Imposition

On pourrait penser, à tort, que les titulaires vont tous vider leurs FRV à 55 ans maintenant que le buffet est ouvert! L’interdiction de transférer les sommes du revenu viager et du paiement en un ou plusieurs versements dans un REER ou un FERR ne laissera pas d’autres choix au détenteur que de payer l’impôt sur les sommes qu’il désire retirer. En fait, c’est le principal régulateur de débit de retrait à partir du FRV.

Vider son FRV alors qu’on n’a pas immédiatement besoin des sommes nettes peut s’avérer coûteux. Prenons une situation hypothétique avec un taux de rendement de 10 % (trop élevé, mais facile à calculer) et un taux d’impôt de 50 %.

Exemple A : J’investis 1 000 $ dans un compte non enregistré, lesquels rapportent 100 $. Je retire l’impôt et il me reste un rendement net de 50 $.

Exemple B : J’investis 2 000 $ dans un compte REER. Je reçois un remboursement d’impôt de 1 000 $, ce qui ramène le coût net de mon investissement à 1 000 $, comme dans le cas du compte non enregistré. Les 2 000 $ rapportent un rendement de 200 $. Si je retire les 200 $ du REER et que je paie l’impôt, il me reste 100$ net.

À taux d’impôt égal dans le temps, et selon ces hypothèses, le rendement net du compte REER est le double de celui du compte non enregistré. Si on fait varier les hypothèses, cette différence variera aussi à la hausse ou à la baisse. Néanmoins, ceci démontre que le retrait des sommes du FRV, sans nécessité, peut être très coûteux du point de vue du rendement futur net.

Exemple C : J’investis 1 000 $ dans un compte CELI, lesquels rapportent 100 $. Puisque le rendement retiré n’est pas imposable, il me reste un rendement net de 100 $.

L’exemple C nous démontre qu’il y aura des cas où l’investissement des sommes dans le CELI pourrait afficher une rentabilité semblable au REER.

Remplaçons, dans ce qui précède, le terme « REER » par « FRV ». Nous pouvons conclure que, du point de vue du rendement net, en général, il sera désavantageux de vider son FRV si l’on n’a pas besoin des sommes immédiatement. Cependant, il est aussi possible, dépendamment des hypothèses utilisées relativement aux taux d’impôt lors de la déduction et de l’imposition, qu’une personne qui dispose d’espace CELI non utilisé et qui y investit les sommes nettes retirées du FRV puisse contrecarrer la perte de rendement futur et rentabiliser l’opération de retrait. Il faudra aussi tenir compte des autres avantages du CELI (retraits qui n’augmentent pas le revenu imposable et ainsi, n’engendrent pas l’impôt de récupération de la PSV ni la réduction du supplément de revenu garanti).

  1. Patrimoine familial

La portion des CRI et FRV cotisée durant le mariage fait partie du patrimoine familial. Une somme retirée du FRV n’en fait plus partie (mais elle pourrait faire partie de la société d’acquêts). Si ce retrait est effectué dans le but de priver l’autre conjoint de sa part du patrimoine familial, des règles de protection existent et, sous certaines conditions, le tribunal (dans le cadre d’une procédure de divorce, de séparation de corps ou de dissolution de l’union civile) pourrait ordonner à l’époux qui a effectué le retrait de verser un paiement compensatoire (à ne pas confondre avec une prestation compensatoire). Une personne qui se départit sciemment des biens du patrimoine familial pourrait être sujette à des saisies avant jugement afin de protéger l’autre conjoint.

Effets sur le conseiller

Je ne suis pas un spécialiste en conformité, mais je ne peux m’empêcher de me poser certaines questions auxquelles des spécialistes devront apporter des réponses :

  • Mon obligation d’information au client m’oblige-t-elle à l’informer des effets de retirer ou non sur la priorité de paiement au décès en faveur du conjoint, sur la protection contre les créanciers et sur le patrimoine familial?
  • La réponse change-t-elle selon que le client a demandé ou non de l’information sur ces sujets?
  • La réponse change-t-elle selon que le client a un(e) conjoint(e) ou non? Que ce(tte) conjoint(e) assiste aux rencontres ou non?
  • S’il a un(e) conjoint(e), la réponse change-t-elle selon que les deux soient mes clients ou non?
  • La réponse change-t-elle selon le type de permis que je détiens? Et si je suis planificateur financier?
  • Que dois-je faire si le client est sous tutelle ou sous un mandat de protection? Dois-je accepter sans questionnement les instructions du tuteur ou du mandataire qui décide de retirer du FRV plutôt que du FERR si je sais (et qu’il sait) qu’il est héritier, mais n’est pas le conjoint de l’administré qui a un(e) conjoint(e)? Ce choix ferait décroître la probabilité que le conjoint reçoive des sommes au décès plutôt que la probabilité que le tuteur ou le mandataire reçoive des sommes au décès.

Effets sur la séquence de décaissement

Un conflit dans l’ordre de décaissement entre les retraits des REER/FERR et des CRI/FRV peut apparaître, selon les objectifs des clients. Voici quelques commentaires selon les objectifs visés. Bien entendu, qu’on choisisse de décaisser de l’un avant l’autre, il faudra tout de même retirer le montant minimum obligatoire par compte.

  • Objectif successoral en faveur d’une autre personne que le conjoint

Il est possible que le titulaire (qui vit en couple) désire que son enfant hérite de ses actifs au décès.

Puisque les impacts fiscaux sont les mêmes, on aura tendance à vouloir retirer du FRV (un FRV affublé d’une priorité de paiement en faveur du conjoint au décès) avant de retirer du FERR, car cela diminuera la somme soumise à la priorité de paiement au conjoint au décès. On aura aussi tendance à vouloir conserver les actifs restants du FERR plus longtemps (pour qu’il reste des actifs aux héritiers), quitte à retarder moins longtemps le début des rentes RRQ et PSV. Cependant, il faudra faire une analyse comparative entre la perte de revenu nette du fait de retarder moins longtemps ces rentes et le coût d’une ou plusieurs assurances-vie (nouvelles, existantes ou converties) qui aideront à atteindre les objectifs successoraux.

Notez que si la priorité de paiement au conjoint ne s’applique pas au FRV du client (FRV acquis par partage avec l’ex-conjoint), le choix de décaissement entre le FERR et le FRV perd une partie de son importance.

  • Objectif de protection contre les créanciers du vivant

Si le FRV vient d’un régime de retraite privé et que la protection contre les créanciers du vivant est recherchée, on aura tendance à vouloir retirer du FERR avant de retirer du FRV, car cela fera durer la somme bénéficiant de plus de protection. Si le FRV vient d’un régime de retraite qui lui accorde moins de protection contre les créanciers (par exemple : le RREGOP), ceci pourrait être moins important. Par mesure de sécurité, investir dans un contrat de fonds distincts ou une rente d’accumulation à intérêt garanti avec des bénéficiaires appropriés pourrait aider.

  • Objectif de protection contre les créanciers au décès

À l’exception des CRI et FRV acquis par partage avec l’ex-conjoint, la priorité de paiement au conjoint au décès existe sur les CRI et FRV. Il est possible que l’on désire conserver cette priorité parce que la somme est payée directement au conjoint sans passer par la succession, ce qui constitue une forme de protection contre les créanciers au décès. Dans un tel cas, il est possible que l’on souhaite retirer du FERR en premier et conserver son FRV plus longtemps.

Bien entendu, d’autres objectifs pourront être poursuivis.

En conclusion, à la lumière de ces changements potentiels, le paysage québécois du décaissement à la retraite vient certainement de changer de façon importante. Nul doute qu’il faudra refaire la planification de décaissement à la retraite pour plusieurs clients!

* Serge Lessard, avocat, pl. fin., FLMI, Vice-président adjoint régional pour le Québec (Investissements), Service de fiscalité, retraite et planification successorale, Gestion de placements Manuvie

Cet article a été rédigé à titre informatif et qu’il ne constitue pas une opinion juridique, fiscale, de placement ou de planification financière. Tout client ou conseiller qui est dans une telle situation devrait s’assurer de bien comprendre les notions applicables à sa situation propre. Il devrait aussi obtenir des conseils d’un professionnel pour savoir si le contenu s’applique ou non à sa situation. De plus, cet article est basé sur un projet de règlement non encore adopté. Les commentaires sont donc hypothétiques.

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Abolition potentielle du plafond de retrait des FRV québécois https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/serge-lessard/abolition-potentielle-du-plafond-de-retrait-des-frv-quebecois/ Wed, 28 Feb 2024 13:01:06 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=99377 ZONE EXPERTS - Si elles sont adoptées telles que présentées, les nouvelles règles assoupliront le décaissement des sommes immobilisées.

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En général, les ex-participants à un régime de retraite privé sous législation québécoise peuvent, sous certaines conditions, transférer les sommes accumulées vers un compte de retraite immobilisé (CRI) ou un fonds de revenu viager (FRV). Généralement, en cas de rupture, leurs ex-conjoints mariés, en union civile ou de fait qui acquièrent des droits sur ces sommes — en raison d’une entente ou d’un jugement de partage — peuvent aussi le faire. Plusieurs régimes de retraite gouvernementaux québécois, tels le RREGOP1, le RRPE2, le RRAS3 et le RRMAN4 permettent aussi ce transfert à la cessation d’emploi, alors que presque tous le permettent en cas de rupture. Une énorme portion des sommes en provenance des régimes de retraite termineront ainsi leur parcours dans un FRV, avant d’être versées au rentier.

Le décaissement des avoirs d’un individu ou d’un couple est actuellement un casse-tête sans équivalent. Le résoudre de façon efficiente ou optimisée n’est pas à la portée du commun des mortels. Pour ce faire, l’aide d’un planificateur financier rompu à cette problématique est d’un grand secours. Parmi les solutions proposées, certaines reviendront souvent (lorsque la situation s’y prête), soit le report du début du versement des rentes du Régime de rentes du Québec (RRQ) et de la Pension de la sécurité de la vieillesse (PSV). Sans reprendre ici l’intégralité des arguments sur les bienfaits de ces reports (lesquels ont été abondamment traités par des actuaires, notamment Martin Dupras, Nathalie Bachand et Mélanie Beauvais), mentionnons que ces arguments convergent souvent vers un revenu de retraite global plus élevé et garanti qui réduit l’épargne nécessaire à la protection contre le risque de survie, lorsque les rentes du RRQ et de la PSV sont reportées le plus tard possible.

Il semble aussi que Retraite Québec voit d’un bon œil le report du début de la rente du RRQ, puisque le report de chaque mois après l’âge de 65 ans augmente maintenant la rente de 0,7 % (maximum de 58,8 % à 72 ans).

Lorsqu’une personne moyenne reporte le début de la rente du RRQ, elle doit souvent décaisser en premier ses placements pour combler le manque et financer sa retraite.

D’où viendra l’argent? De ses régimes enregistrés d’épargne-retraite (REER) ou de ses fonds enregistrés de revenu de retraite (FERR), de son régime de retraite à cotisation déterminée (sous forme de prestations variables), de son compte d’épargne libre d’impôt (CELI), ses comptes non enregistrés, de sa société de gestion ou de son FRV?

Tous les futurs retraités ne sont pas aussi bien pourvus et nantis et ces options ne sont donc pas toutes disponibles. Entre autres, une grande portion des actifs de retraite d’un individu est souvent détenue dans un régime de retraite à cotisation déterminée et dans des CRI et FRV. Les sommes contenues dans un CRI ou un FRV sous législation québécoise5, comme celles dans les régimes de retraite québécois, sont soumises à l’immobilisation, i.e. qu’elles ne peuvent en être retirées que sous certaines conditions assez restrictives. Bref, l’immobilisation de ces régimes peut entrer en conflit avec la volonté de l’État québécois de favoriser le report du début de la rente du RRQ.

Il y aurait donc lieu de réduire radicalement l’immobilisation de ces régimes.

Modification à la Loi sur les régimes complémentaires de retraite et projet de règlement actuellement à l’étude

Afin de permettre une plus grande flexibilité de retrait des sommes immobilisées, la Loi sur les régimes complémentaires de retraite (LRCR) (R-15.1) a été modifiée le 31 mai 2023 afin de permettre les retraits sans plafonds à partir d’un régime complémentaire de retraite à cotisation déterminée en mode prestation variable. Ces modifications à la LRCR sont entrées en vigueur le 31 mai 2023, mais ne peuvent pas être appliquées sans qu’un règlement qui traite aussi du sujet soit adopté.

De plus, un projet de règlement modifiant le Règlement sur les régimes complémentaires de retraite (RRCR) a été publié pour consultation le 27 décembre 2023. Ce projet de règlement n’est pas encore adopté et le sera possiblement, avec ou sans modifications, afin qu’il entre en vigueur le 1ier juillet 2024, du moins pour les articles qui nous intéressent.

Ce projet de règlement aurait pour effet, s’il est adopté tel quel et mis en vigueur, de modifier le RRCR sur ces plans :

  • Les changements introduisent un nouveau type de versement en provenance du FRV: le paiement de tout ou une partie du solde du fonds en un ou plusieurs versements. Les trois retraits normaux d’un FRV sont donc maintenant :
    • Le revenu viager, soit le retrait entre le minimum et le maximum, qui peut être fait à tout âge, mais pour lequel il n’est pas clair si un versement quelconque effectué à partir de 55 ans sera ou non qualifié comme tel);
    • Le revenu temporaire (pour les moins de 55 ans);
    • Le retrait en un ou plusieurs versements (pour les 55 ans et plus).

Ainsi, le titulaire d’un FRV, âgé de 55 ans ou plus, ne sera plus soumis à l’immobilisation. Ceci signifie qu’il pourra retirer du FRV la somme qu’il désire (à moins que le terme des certains types de placements ne soit pas échu (ex. CPG)), le tout en un seul ou plusieurs versements. Il devra tout de même retirer au moins le minimum requis (car un FRV est fiscalement un FERR et est en conséquence assujetti au minimum prescrit FERR prévu par la Loi de l’impôt sur le revenu). Le revenu viager maximum (le plafond) sera estimé sur son relevé. Soyons clairs : il ne s’agit que d’une estimation et le retrait du titulaire ne sera donc plus limité à ce montant.

  • Modifications corrélatives pour les personnes de 55 ans dues à l’abolition de la limite des retraits :
    • Le revenu temporaire pour les 55 ans et plus sera aboli, n’étant plus utile considérant qu’il n’y a plus de limite de retrait pour cette tranche d’âge.
    • Le retrait unique à 65 ans (valeur des comptes égale ou inférieure à 40 % du MGA6) est aboli pour le FRV.
  • Pour un participant (de 55 ans ou plus) non actif à un régime de retraite à cotisations déterminées, il sera possible de recevoir tout ou partie du solde en un ou plusieurs versements. L’immobilisation disparait.
  • Pour les 55 ans et plus, les sommes retirées du FRV ne pourront pas être transférées dans un REER, un FERR ou dans le compte non immobilisé d’un RVER.
  • Le revenu temporaire pour les moins de 55 ans sera légèrement augmenté (50 % du MGA au lieu de 40 % et 100 % du revenu estimé au lieu de 75 %). Notez que le revenu temporaire est une option et, de ce fait, n’est pas automatiquement incluse dans tous les contrats FRV.
  • Le retrait unique applicable à une personne qui est non-résident canadien depuis 2 ans ou plus est éliminé pour le FRV, mais est maintenu pour le CRI.
  • Pour les moins de 55 ans, les sommes retirées du FRV en revenu viager ou en revenu temporaire ne pourront plus être transférées vers un REER, un FERR ou dans le compte immobilisé d’un RVER. Par le passé, il existait une légère controverse concernant la possibilité de transférer en 12 fois les 12 versements mensuels du revenu temporaire de l’année dans un REER. Cette controverse n’en sera plus une!

L’immobilisation des sommes sous ses formes actuelle et nouvelle

Si le projet de règlement est adopté sans modification, les options de retrait passées et nouvelles seront les suivantes :

CRI sous législation québécoise

  1. Jugement de saisie pour dettes alimentaires (29(7.1°) RRCR6)
  2. Retrait unique à 65 ans si valeur des comptes égale ou inférieure à 40 % du MGA (sans permission du conjoint) (29(9.1°) RRCR)
  3. Retrait unique si non résident depuis 2 ans (sans permission du conjoint) (29(8.1°) RRCR)
  4. Transfert vers un autre régime de retraite ou un autre CRI ou FRV (sans permission du conjoint) (29(2° et 8°) RRCR)
  5. Retraits unique ou multiples si espérance de vie réduite par invalidité (sans permission du conjoint) (29(9°) RRCR)

FRV sous législation québécoise

  1. Revenu viager (sans permission du conjoint). Retrait soumis à :
    • Un plancher de décaissement (aussi appelé « le minimum FRV »), à savoir le plancher applicable aux FERR selon la législation fiscale, puisqu’un FRV est fiscalement un FERR). Le minimum de retrait obligatoire est de zéro l’année de l’établissement du FRV. (19(2°) RRCR)
    • Un plafond de décaissement (aussi appelé « le maximum FRV ») en vertu du RRCR. (En vertu du projet de règlement, le plafond obligatoire ne s’appliquera qu’au constituant de moins de 55 ans) ;
  2. Jugement de saisie pour dettes alimentaires (19(6.0.1°) RRCR)
  3. Transfert vers un autre régime de retraite ou un autre CRI ou FRV (sans permission du conjoint) (19(7°) RRCR)
  4. Revenu temporaire (payé mensuellement) pour les moins de 55 ans (sans permission du conjoint). Plafond (ramené sur base annuelle) du revenu temporaire : 40 % du MGA moins 75 % des revenus des 12 prochains mois. (19.2 RRCR) (modifié par le projet de règlement : le 40 % devient 50 % et le 75 % devient 100 %)
  5. Paiement de tout ou partie du solde du FRV en un ou plusieurs versements pour les détenteurs de 55 ans ou plus.
  6. Le projet de loi vient éliminer les éléments suivants :
    • Retrait unique à 65 ans, si valeur des comptes égale ou inférieure à 40% du MGA;
    • Retrait unique si non résident depuis 2 ans (sans permission du conjoint);
    • Revenu temporaire pour les 55 à 64 ans (sans permission du conjoint).

Nous verrons dans un autre texte (Plafond de retrait des FRV : les effets sur vos clients) les effets de ces ajustements sur les clients avant et pendant la période de décaissement.

* Serge Lessard, avocat, pl. fin., FLMI, Vice-président adjoint régional pour le Québec (Investissements), Service de fiscalité, retraite et planification successorale, Gestion de placements Manuvie

Cet article a été rédigé à titre informatif et qu’il ne constitue pas une opinion juridique, fiscale, de placement ou de planification financière. Tout client ou conseiller qui est dans une telle situation devrait s’assurer de bien comprendre les notions applicables à sa situation propre. Il devrait aussi obtenir des conseils d’un professionnel pour savoir si le contenu s’applique ou non à sa situation. De plus, cet article est basé sur un projet de règlement non encore adopté. Les commentaires sont donc hypothétiques.

1 – Régime de retraite du personnel employé du gouvernement et des organismes publics (RREGOP)

2 – Régime de retraite du personnel d’encadrement (RRPE)

3 – Régime de retraite de l’administration supérieure (RRAS)

4 – Régime de retraite des membres de l’Assemblée nationale (RRMAN)

5 – À moins de mention contraire, les CRI, FRV et régimes de retraite dont cet article fait l’objet sont sous législation québécoise et non pas sous législation fédérale.

6 – MGA = Maximum des gains admissibles en vertu du RRQ

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Utiliser la série T en détention par une société pour la retraite https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/serge-lessard/utiliser-la-serie-t-en-detention-par-une-societe-pour-la-retraite/ Fri, 15 Nov 2019 00:26:00 +0000 https://www.finance-investissement.com/?p=62352 Utiliser la série T n'est pas toujours une bonne idée pour l'actionnaire d'une Gesco.

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On sait que l’utilisation d’un fonds commun de placement de série T est très souvent avantageuse pour un individu à la retraite, car ce type de fonds lui permet de reporter le moment où le gain en capital sur les parts du fonds sera réalisé.

Cependant, qu’en est-il de son utilisation dans un contexte de société par actions ? Est-ce avantageux d’investir les actifs de la société de portefeuille d’un retraité dans un fonds de série T ? La réponse simpliste à cette question est «oui», mais la vraie réponse est : «Ça dépend !» Voyons ce qu’il en est.

D’abord, rappelons que la série T est un type de fonds doté d’un pourcentage de distribution cible aux détenteurs de parts.

La détention par une société

Dans le contexte de parts d’un fonds de série T détenues par une société par actions, il est normal de se demander comment sera traité le remboursement de capital (RC).

Le RC reçu par une société de portefeuille est bien un RC. Il n’est pas imposable, il réduit la valeur marchande de la part et il réduit le prix de base rajusté (PBR) du placement, et si le PBR tombe à zéro, la distribution excédentaire de RC sera imposée à titre de gain en capital.

Donc, la situation est la même que celle d’un individu si l’intention est de laisser la distribution de RC dans la société. Toutefois, c’est rarement le cas. En effet, l’objectif de la série T dans une société est presque toujours de verser à l’actionnaire la somme reçue par distribution de RC.

Comment verse-t-on à l’actionnaire des sommes en provenance des investissements de la société ? Les distributions de RC reçues par la société n’augmentent pas le compte de dividende en capital (CDC). Le solde de ce compte indique le montant maximum qui peut être versé sans impôt aux actionnaires. Il ne sera donc pas possible de bénéficier automatiquement d’un versement à l’actionnaire non imposable.

Cependant, si un solde de CDC existe déjà dans la société, on pourra payer ce CDC avec les dollars de RC reçus. Et c’est le cas de tous les autres types de versements à l’actionnaire : la distribution de RC servira uniquement d’outil d’accès à des liquidités pour effectuer le versement désiré.

À la retraite, le versement désiré (qui peut être effectué à même les liquidités du compte de banque ou du RC) sera généralement sous une (ou plusieurs) de ces formes :

En dividendes déterminés (DivD) avec remboursement au titre de dividendes (RTD) de 38,33 % ;

En dividendes déterminés (DivD) sans RTD ;

En dividendes non déterminés (DivND) avec RTD de 38,33 % ;

En dividendes non déterminés (DivND) sans RTD ;

En dividendes provenant du CDC (DivCDC) ou en remboursement d’un dû à l’actionnaire ;

En salaire ou en boni.

L’étape préalable au versement de sommes de la société à l’actionnaire consiste à vérifier les comptes fiscaux. On vérifie :

Le solde du Compte de revenu à taux général (CRTG), qui permet le versement de DivD ;

Le solde du Compte de dividende en capital (CDC), qui permet de verser des dividendes non imposables à l’actionnaire ;

Le solde du Compte d’impôt en main remboursable au titre de dividende déterminé (IMRTDD). Il s’agit du montant de remboursement d’impôt auquel la société a droit à raison de 38,33 % du montant des DivD qu’elle verse à son actionnaire ;

Le solde du Compte d’impôt en main remboursable au titre de dividende non déterminé (IMRTDND). Il s’agit du montant de remboursement d’impôt auquel la société a droit à raison de 38,33 % du montant des DivND qu’elle verse à son actionnaire ;

Les billets ou sommes dues à l’actionnaire (pas exactement un compte fiscal…). Ces sommes peuvent être remboursées à l’actionnaire sans impôt.

Tel que mentionné ci-avant, le remboursement de capital d’un fonds de série T servira à se procurer les liquidités nécessaires à ces types de versement.

Penser à l’ordre de décaissement

La question qui suit et qui n’a aucun lien avec l’utilisation d’une série T ou non est : «Dans quel ordre décaisser la société ?» Nous avons mis un nom sur cette notion : «Meilleur type de versement de la société à l’actionnaire» ou «MTV».

J’ai conçu le tableau qui suit afin de vous aider à déterminer l’ordre de décaissement optimal pour un client retraité. Le tableau permet de déterminer la quantité de liquidités qu’il faudrait retirer de la société ou d’un placement personnel afin qu’un dollar se retrouve dans les poches de l’actionnaire. Cette quantité varie en fonction du palier d’imposition personnel de l’actionnaire et du type de fiscalité relié au versement. Cette information se retrouve dans la portion du bas du tableau.

Plus le coût est bas, plus il restera de placements investis, qui apporteront du rendement/revenu supplémentaire à la société ou à l’individu. Il faudra faire un choix concernant l’ordre de décaissement de ses actifs à la retraite. On consultera toutes les colonnes du tableau et on effectuera les retraits dans l’ordre le moins onéreux pour obtenir chaque dollar net à dépenser. Notez qu’il ne s’agit pas d’une méthode infaillible. Cependant, elle est certainement préférable à la «méthode du pif» et à celle largement répandue qui consiste à dire : «Versons le CDC d’abord !»

Voici les paliers d’imposition 2019 (pour le Québec) utilisés dans ce tableau, lesquels tiennent compte de la récupération de la pension de la sécurité de la vieillesse (PSV) :

N5a de 47 631 $ à 77 580 $

N5b de 77 581 $ à 87 575 $

N6 de 87 576 $ à 95 259 $

N7 de 95 260 $ à 106 555 $

N8a de 106 556 $ à 125 696 $

N8b de 125 697 $ à 147 667 $

N9 de 147 668 $ à 210 371 $

N10 210 372 $ et plus

De plus, «ENT > 500» signifie «Revenu d’entreprise supérieur à 500 000 $», «INT» signifie «Intérêts», «GCNI» signifie «Gain en capital non imposable» et «PD-CBR» signifie «Prestation de décès moins coût de base rajusté».

Par ailleurs, une explication complète du tableau nécessiterait beaucoup de temps et cette explication ne fait pas l’objet du présent article. Toutefois, sachez que la première portion présente le taux d’imposition marginal de l’actionnaire, et la deuxième, la perte de liquidité globale qui s’appliquerait sur la somme retirée (ce qui tient compte du RTD). Les six colonnes de droite présentent les options pour les actionnaires de société de portefeuille (Gesco).

Réaliser ou non du gain en capital

Le compte IMRTD augmente lorsque la société paye de l’impôt sur des revenus de placement. Lorsqu’il y a de l’IMRTD disponible dans la société, les versements des colonnes 1 et 3 seront souvent bénéfiques. Toutefois, notez qu’en l’absence d’IMRTD dans la société de portefeuille (colonnes 2 et 4), il est souvent préférable de réaliser volontairement du gain en capital (colonne 6) en vendant et en rachetant des placements que de verser des DivD ou des DivND sans RTD à l’aide des distributions de RC de la série T (colonne 4 «Capital»).

Ceci signifie que, dans un contexte de société, parfois, il est préférable d’utiliser la série T et d’éviter de réaliser du gain en capital inutilement, et parfois, il est préférable de mettre la série T de côté et faire exprès de réaliser du gain. Comme on le dit souvent : ça dépend !

Et ça dépend aussi d’un autre facteur : le revenu de placement total ajusté (RPTA). Il n’est pas dans l’objectif de cet article d’expliquer les notions relatives au RPTA. Nous tenons cependant à préciser que la société peut accéder principalement de trois façons à des liquidités afin de les verser à l’actionnaire pour la retraite :

Piger dans un compte (qui peut contenir le revenu d’entreprise) ou dans des placements qui n’ont pas pour effet de réaliser du gain (compte de banque, autres liquidités, versement de revenus en provenance des placements, etc.) ;

Réaliser du gain en capital par la vente de titres de placement (rachats de parts, etc.) ;

Obtenir du RC par la série T (non imposable).

Dans le contexte où l’actionnaire d’une société de gestion possède au moins une société associée qui produit du revenu d’entreprise, il est important que le RPTA ne dépasse pas un certain plancher (50 000 $ ou plus, selon le niveau du revenu d’entreprise). Dépasser ce plancher aura des conséquences financières que nous jugeons catastrophiques.

La distribution de RC dans la société n’augmente pas le RPTA, alors que 50 % du gain en capital provoqué par la vente de titres de placement augmentera le RPTA. Ceci pourrait être un élément important qui favoriserait l’utilisation de la série T plutôt que la réalisation volontaire de gain en capital, même dans les cas où la société n’a plus d’IMRTD.

En conclusion, l’utilisation de la série T est très souvent une bonne idée pour un individu, mais pas à tous les coups pour un actionnaire de Gesco. Assurément, on doit analyser les cas de société avec plus de profondeur.

* Avocat, Pl. Fin., FLMI, vice-président adjoint régional pour le Québec (Investissements), Service de fiscalité, retraite et planification successorale, Manuvie

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Le conjoint de fait désigné bénéficiaire et la protection contre les créanciers https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/serge-lessard/le-conjoint-de-fait-designe-beneficiaire-et-la-protection-contre-les-creanciers/ Tue, 29 Nov 2016 09:03:18 +0000 https://stg-avatar.finance-investissement.com/uncategorized/le-conjoint-de-fait-designe-beneficiaire-et-la-protection-contre-les-creanciers/ ZONE EXPERTS - Il est possible de protéger un contrat de fonds distincts contre les créanciers tout en désignant le conjoint de fait bénéficiaire.

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Les contrats de rente à capital variable basés sur des unités de fonds distincts (ci-après appelés « Fonds distincts » ou « CRCVFD ») sont, comme leur nom l’indique, des contrats de rente. À ce titre, il est possible de désigner un bénéficiaire qui recevra la somme accumulée au décès.

Cet article ne vise que les fonds distincts non enregistrés. Une chronique future traitera des REER.

Un avantage notoire de ces contrats de rente est la possibilité de les protéger contre une saisie des créanciers, généralement au même titre qu’une police d’assurance de personnes, en désignant le bon bénéficiaire au décès et de la bonne façon. Voici quelques points qu’il convient d’analyser.

Protection contre les créanciers au décès

1. Par défaut, i.e. en l’absence d’une désignation de bénéficiaire, au décès le capital du contrat de rente est payable au titulaire (propriétaire) du contrat. Puisque dans la majorité des cas la vie assurée de la rente (parfois appelée le rentier ou la vie sur laquelle le risque est pris) est aussi titulaire du contrat, ce droit du titulaire d’obtenir le capital de la rente sera transmis à sa succession. La succession recevra le capital et cette somme servira potentiellement à payer ses dettes. Cependant, lorsqu’un bénéficiaire est désigné (peu importe son lien de parenté avec le titulaire), la somme est payable directement à ce bénéficiaire par la compagnie d’assurance. La somme ne fait pas partie de la succession. Donc, sauf exception, il s’agit d’une forme de protection contre les créanciers puisque cette somme ne servira pas à payer les créanciers de la succession (voir l’exception décrite dans notre article « Comment contrecarrer l’effet d’une désignation de bénéficiaire valide ». Veuillez noter que lorsqu’on nomme à titre de bénéficiaire les héritiers légaux, les ayant droits, selon le testament, la succession, etc, ou une expression similaire (art. 2456 C.c.Q.), il ne s’agit pas d’une désignation de bénéficiaire (appelons-les des « faux bénéficiaires »);généralement, dans un tel cas, la somme sera versée au titulaire du contrat ou à sa succession s’il est décédé. Ceci aura pour effet de faire perdre l’avantage ci-dessus décrit puisque la somme fera partie de l’actif de la succession. Par définition, un bénéficiaire est une personne autre que le titulaire ou la succession de ce dernier.

2456. C.c.Q. L’assurance payable à la succession ou aux ayants cause, héritiers, liquidateurs ou autres représentants légaux d’une personne, en vertu d’une stipulation employant ces expressions ou des expressions analogues, fait partie de la succession de cette personne.

Protection contre les créanciers du vivant de la vie sur laquelle le risque est pris

2. Généralement, tous les conseillers savent qu’il est possible de protéger les valeurs de rachat d’un fonds distinct contre les créanciers du vivant de la vie sur laquelle le risque est pris en désignant un bénéficiaire approprié en cas de décès.

Le cas des bénéficiaires spéciaux révocables

a. L’article 2457 C.c.Q. prévoit une protection contre les créanciers lorsque le bénéficiaire est l’ascendant (parents, grands-parents, arrière-grands-parents, etc.), le descendant (enfants, petits-enfants, arrière-petits-enfants, etc.), le conjoint uni civilement (l’union civile n’est pas l’union de fait. L’union civile a presque toutes les caractéristiques d’un mariage sans en porter le nom.) ou le conjoint marié. Si un titulaire choisit de désigner un de ces bénéficiaires à titre irrévocable, cela n’ajoute rien au degré de protection contre les créanciers.

2457. C.c.Q. Lorsque le bénéficiaire désigné de l’assurance est l’époux ou le conjoint uni civilement, le descendant ou l’ascendant du titulaire ou de l’adhérent, les droits conférés par le contrat sont insaisissables, tant que le bénéficiaire n’a pas touché la somme assurée.

Le cas des bénéficiaires irrévocables

b. L’article 2458 C.c.Q. prévoit une protection contre les créanciers lorsque le bénéficiaire (peu importe le lien de parenté avec le titulaire) est désigné à titre irrévocable. Voir notre commentaire ci-dessus concernant les « faux » bénéficiaires. Cependant, il faut se placer dans le contexte d’un investissement. En effet, il est généralement admis qu’en présence d’un bénéficiaire irrévocable, il faudra la permission de ce dernier pour effectuer des retraits du placement. Il est très rare que cette contrainte soit acceptable dans le cadre d’un placement.

2458. C.c.Q. La stipulation d’irrévocabilité lie le titulaire de la police, même si le bénéficiaire désigné n’en a pas connaissance. Tant que la désignation à titre irrévocable subsiste, les droits conférés par le contrat au titulaire, à l’adhérent et au bénéficiaire sont insaisissables.

La problématique des conjoints de fait

Le conjoint de fait désigné à titre de bénéficiaire aura pour effet de protéger la prestation de décès contre les créanciers du titulaire au décès de la vie sur laquelle le risque est pris puisque la somme est versée au bénéficiaire et non pas à la succession.

Par contre, concernant la protection contre les créanciers du vivant de la vie sur laquelle le risque est pris, le conjoint ne se qualifie pas à titre de bénéficiaire spécial. Le fait de le désigner bénéficiaire révocable n’apportera pas de protection contre les créanciers.

De plus, toujours concernant la protection contre les créanciers du vivant, est-il pertinent de désigner le conjoint de fait à titre de bénéficiaire irrévocable? Bien sûr, la désignation à titre irrévocable crée une protection contre les créanciers. Cependant, cette situation n’est pas sans contrainte. Premièrement, la subordination de droit de retrait à la permission du bénéficiaire irrévocable n’est presque jamais acceptable du point de vue du titulaire. De plus, une séparation du couple n’annulera pas la désignation de bénéficiaire. Il faut se rappeler qu’un divorce (ou la fin de l’union civile) rend caduque (i.e. désuète et inopérante) la désignation du conjoint marié (ou du conjoint uni civilement) du titulaire, même lorsque cette désignation est irrévocable. Dans le cas des conjoints de fait, ils ne peuvent ni divorcer ni mettre fin à l’union civile puisque, par définition, ils ne sont pas mariés ni unis civilement.

Une solution pour les conjoints de fait?

Voici une solution potentielle. Disons cependant et d’entrée de jeu qu’aucune décision d’un tribunal quelconque ne la valide directement. Cependant, elle a du sens bien que son application soit à vos risques. Idéalement, vous devriez conseiller à votre client de la faire valider par son juriste préféré. Protégez-vous, on ne le dira jamais assez. Et ne donnez pas d’opinion juridique à vos clients si vous n’êtes pas avocat ou notaire!

La solution potentielle est tout de même simple.

• Étape 1 : le titulaire désigne un bénéficiaire du fonds distinct directement auprès de la compagnie d’assurance dans la proposition (nouveau fonds distinct) ou sur un formulaire de désignation de bénéficiaire (fonds distinct existant) qui sera transmis immédiatement. Le bénéficiaire doit être un bénéficiaire spécial révocable (voir ci-dessus la liste des personnes qui se qualifient à titre de bénéficiaire spécial), par exemple l’enfant du titulaire.

• Étape 2 : au moment approprié après l’étape 1, le titulaire se rend chez son notaire et rédige son testament. Le notaire devra ajouter une clause de désignation de bénéficiaire (attention, pas un legs) directement dans le testament. Le bénéficiaire désigné sera le conjoint de fait.

Quel est l’effet recherché?

• Premièrement, la désignation qui sera valide au décès et qui déterminera qui recevra la prestation de décès sera la désignation la plus récente. C’est une question de date. Ainsi, le conjoint de fait recevra la somme au décès.

• Deuxièmement, la désignation qui aura un effet relativement à la protection contre les créanciers est celle faite directement auprès de la compagnie d’assurance. Dans notre exemple, l’enfant du titulaire ayant été désigné comme bénéficiaire sur le contrat, le contrat pourrait possiblement bénéficier de la protection contre les créanciers.

Évidemment, cette solution potentielle nécessite les efforts combinés du conseiller en sécurité financière et du notaire.
Personnellement j’ai bien hâte de voir cette solution testée par les tribunaux.

Veuillez noter que plusieurs exceptions peuvent s’appliquer au contenu de cet article, qu’il vous est fourni à titre informatif et qu’il ne s’agit pas d’une opinion juridique. Les clients et les conseillers doivent rencontrer leur propre conseiller juridique pour vérifier l’applicabilité ou non de ces informations à leur situation personnelle.

 

 

 

 

 

 

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Le rentier dites-vous? Mais de qui parlez-vous? https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/serge-lessard/le-rentier-dites-vous-mais-de-qui-parlez-vous/ Mon, 31 Oct 2016 08:04:23 +0000 https://stg-avatar.finance-investissement.com/uncategorized/le-rentier-dites-vous-mais-de-qui-parlez-vous/ ZONE EXPERTS - Le mot « rentier » a plusieurs significations et crée de la confusion.

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Je ne compte plus le nombre de questions que j’ai reçues contenant le mot « rentier » (en anglais « annuitant ») et qui concernaient les contrats de rente à capital variable basés sur des unités de fonds distinct (ci-après appelés « CRCVFD » ou « Fonds distincts »). Qu’est-ce qu’un rentier? Tout dépend du sujet…

• D’un point de vue juridique québécois, le crédirentier (en anglais « annuitant », la même traduction que « rentier ») est la personne qui a droit aux versements de la rente du vivant de la personne sur laquelle le risque est pris. (Voir 2367 C.c.Q.)

• D’un point de vue juridique de Common Law (au Canada mais ailleurs qu’au Québec), le rentier est la personne sur laquelle le risque de la rente est pris. (Voir à ce sujet, Norwood on Life Insurance Law in Canada, Third edition, 2002, Carswell, page 74)

• D’un point de vue fiscal aux fins des REER et des FERR, le rentier est la personne qui a droit aux prestations de retraite du régime i.e. celle qui a droit aux versements du vivant. (Voir 146(1) « Rentier » L.I.R.)

Il arrive donc fréquemment que toutes ces notions doivent être appliquées pour un même contrat, par exemple un fonds distinct émis au Québec par un assureur canadien et enregistré à titre de REER. Dans un tel cas, il est possible que le contrat contienne une première définition de « rentier » qui vise la vie sur laquelle le risque de la rente est pris (et qui vient indirectement éliminer l’utilisation du terme « crédirentier ») et une seconde définition de rentier dans un addendum REER qui vise « la personne qui a droit aux versements du vivant » mais qui n’est applicable qu’aux éléments fiscaux du contrat.

En conclusion, lors de vos communications, il est toujours préférable de bien identifier dans quel contexte le mot « rentier » est utilisé si on veut éviter d’obtenir la bonne réponse à la mauvaise question!

Veuillez noter que plusieurs exceptions peuvent s’appliquer au contenu de cet article, qu’il vous est fourni à titre informatif et qu’il ne s’agit pas d’une opinion juridique. Les clients et les conseillers doivent rencontrer leur propre conseiller juridique pour vérifier l’applicabilité ou non de ces informations à leur situation personnelle.

 

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L’actionnaire désigné bénéficiaire d’un fonds distinct : point de vue juridique https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/serge-lessard/l-actionnaire-designe-beneficiaire-d-un-fonds-distinct-point-de-vue-juridique/ Mon, 03 Oct 2016 08:37:46 +0000 https://stg-avatar.finance-investissement.com/uncategorized/lactionnaire-designe-beneficiaire-dun-fonds-distinct-point-de-vue-juridique/ ZONE EXPERTS - La société détentrice d'un contrat de fonds distinct qui désigne l'actionnaire bénéficiaire de ce contrat commet peut-être une erreur.

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Prenons l’exemple de la Société de gestion X inc (ci-après appelée « SGX ») dont 100% des actions appartiennent à Monsieur X (ci-après appelé « l’actionnaire »). SGX souscrit un contrat de rente à capital variable basé sur des unités de fonds distincts (CRCVFD) (ci-après appelé « Fonds distinct). Le titulaire du fonds distinct est SGX, la vie sur laquelle le risque est pris (parfois aussi appelé « rentier » ou « vie assurée ») est l’actionnaire, la personne (personne morale dans ce cas-ci) qui a droit aux versements du vivant (parfois appelée « rentier » ou « crédirentier ») de la vie sur laquelle le risque est pris est SGX et le bénéficiaire au décès de la vie sur laquelle le risque est pris est l’actionnaire.

En résumé :

Titulaire du fonds distinct: SGX

Vie assurée du fond distinct : l’actionnaire

Droit aux versements du vivant : SGX

Bénéficiaire au décès : l’actionnaire

Que pensez-vous de cette situation?

Le premier réflexe est de se dire que le bénéficiaire est l’actionnaire. Mais est-ce vrai? Si on pousse l’analyse un peu plus loin, on se rend compte que l’actionnaire est bénéficiaire au décès de…l’actionnaire! On sait pourtant qu’un bénéficiaire doit être vivant au moment du décès de la vie assurée pour avoir droit à la prestation de décès.

Dans le présent cas, le bénéficiaire est nécessairement décédé au moment où la vie assurée est décédée parce qu’il s’agit de la même personne. Il n’est donc pas possible pour l’actionnaire de recevoir quelque chose à titre de « bénéficiaire ». En l’absence d’un bénéficiaire valable, la prestation de décès sera payable au titulaire (SGX).

Évidemment, dans le cas où la vie assurée du fonds distinct serait une autre personne que l’actionnaire (par exemple Mme X), la désignation de bénéficiaire en faveur de l’actionnaire aurait son effet normal. Mais attention! C’est sous réserve des problèmes fiscaux sous-jacents!

Cette chronique étant essentiellement juridique et non pas fiscale, nous limiterons nos commentaires fiscaux au minimum. Ainsi, lorsque le bénéficiaire d’un contrat de fonds distinct détenu par une société n’est pas la société, on considère souvent qu’il y a annuellement un avantage imposable conféré à l’actionnaire selon 15(1) L.I.R. si lui ou ses proches sont bénéficiaires. Il y aurait peut-être lieu de contester l’application de 15(1) L.I.R. dans le cas où l’actionnaire a été désigné bénéficiaire alors qu’il est la vie assurée du contrat de fonds distinct puisqu’au décès il ne peut bénéficier de rien…

Veuillez noter que plusieurs exceptions peuvent s’appliquer au contenu de cet article, qu’il vous est fourni à titre informatif et qu’il ne s’agit pas d’une opinion juridique. Les clients et les conseillers doivent rencontrer leur propre conseiller juridique pour vérifier l’applicabilité ou non de ces informations à leur situation personnelle.

 

 

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Doit-on appliquer les règles des placements présumés sûrs ? https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/serge-lessard/doit-on-appliquer-les-regles-des-placements-presumes-surs/ Tue, 06 Sep 2016 08:27:05 +0000 https://stg-avatar.finance-investissement.com/uncategorized/doit-on-appliquer-les-regles-des-placements-presumes-surs/ ZONE EXPERTS - Le conseiller doit savoir reconnaître les situations où les règles des placements présumés sûrs s'appliquent afin de ne pas engager sa responsabilité.

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Il arrive assez fréquemment qu’une personne administre des sommes pour d’autres. Il peut s’agir notamment du liquidateur d’une succession, du tuteur d’un enfant mineur (qui peut être le parent), d’un administrateur du bien d’autrui ou du fiduciaire d’une fiducie.

Lorsque vient le temps de prendre des décisions en matière de placements, quelles règles cet administrateur doit-il suivre? Peut-il choisir les placements qu’il juge appropriés, à sa seule discrétion? Le Code civil du Québec prévoit deux régimes différents qui peuvent s’appliquer à l’administrateur : la simple et la pleine administration.

Dans le cas de la simple administration il faudra appliquer les règles des placements présumés sûrs que l’on retrouve aux articles 1339 à 1344 du Code civil du Québec (C.c.Q.) Cette obligation n’existe pas dans le cas de la pleine administration.

1301 C.c.Q. Celui qui est chargé de la simple administration doit faire tous les actes nécessaires à la conservation du bien ou ceux qui sont utiles pour maintenir l’usage auquel le bien est normalement destiné.

1304 C.c.Q. L’administrateur est tenu de placer les sommes d’argent qu’il administre, conformément aux règles du présent titre relatives aux placements présumés sûrs.

Il peut modifier les placements faits avant son entrée en fonctions ou ceux qu’il a faits.

Dans le cas de la pleine administration, l’administrateur est beaucoup plus libre de ses choix et son obligation consiste à tenter de faire fructifier le patrimoine géré. Ceci ne l’autorise cependant pas à prendre des risques inconsidérés. Il a toujours l’obligation de prendre des décisions dans l’intérêt de la personne dont il gère les biens.

1306 C.c.Q. Celui qui est chargé de la pleine administration doit conserver et faire fructifier le bien, accroître le patrimoine ou en réaliser l’affectation, lorsque l’intérêt du bénéficiaire ou la poursuite du but de la fiducie l’exigent.

1307 C.c.Q. L’administrateur peut, pour exécuter ses obligations, aliéner le bien à titre onéreux, le grever d’un droit réel ou en changer la destination et faire tout autre acte nécessaire ou utile, y compris toutes espèces de placements.

Il peut cependant limiter considérablement sa responsabilité s’il choisit d’investir seulement dans des placements présumés sûrs.

1343 C.c.Q. L’administrateur qui agit conformément à la présente section est présumé agir prudemment.

Dans les situations où les règles des placements présumés sûrs s’appliquent, une des contraintes majeures est que la rente en accumulation, la rente en service et le contrat de rente à capital variable (communément appelé « contrat de fonds distincts ») n’en font pas partie.

Ils ne pourront donc pas être offerts comme solution à l’administrateur. De plus, même dans le cas des fonds communs de placement, le conseiller devra analyser chaque fonds afin de s’assurer personnellement qu’il se qualifie. Nous référons le lecteur à notre article précédent « Fonds distincts et placements présumés sûrs ».

Voici les principales situations qui impliquent les règles d’administration des biens d’autrui :

Tuteur à l’enfant mineur émancipé

Le mineur simplement émancipé est un mineur qui est autorisé à exercer ses droits civils lui-même. Le mineur simplement émancipé peut effectuer seul les actes de la simple administration. Il doit être assisté de son tuteur pour poser tous les actes excédant la simple administration. CEPENDANT, le manque de clarté des articles du Code civil du Québec concernant la simple émancipation et la rareté des cas nous empêchent de conclure avec certitude que le mineur simplement émancipé peut effectuer un placement qui n’est pas présumé sûr s’il est assisté de son tuteur. La prudence nous suggère donc de s’en tenir aux placements présumés sûrs des articles 1339 à 1344 C.c.Q. (à moins d’obtenir un avis juridique contraire).

Le mineur pleinement émancipé est celui qui est pleinement capable d’exercer ses droits civils, comme un majeur. La pleine émancipation survient généralement par le mariage du mineur. Il peut effectuer tous types de placement.

Simple émancipation :

172 C.c.Q. Outre les actes que le mineur peut faire seul, le mineur émancipé peut faire tous les actes de simple administration; il peut ainsi, à titre de locataire, passer des baux d’une durée d’au plus trois ans ou donner des biens suivant ses facultés s’il n’entame pas notablement son capital.

173 C.c.Q. Le mineur émancipé doit être assisté de son tuteur pour tous les actes excédant la simple administration, notamment pour accepter une donation avec charge ou pour renoncer à une succession.

L’acte accompli sans assistance ne peut être annulé ou les obligations qui en découlent réduites que si le mineur en subit un préjudice.

174 C.c.Q. Les prêts ou les emprunts considérables, eu égard au patrimoine du mineur émancipé, et les actes d’aliénation d’un immeuble ou d’une entreprise doivent être autorisés par le tribunal, sur avis du tuteur. Autrement, l’acte ne peut être annulé ou les obligations qui en découlent réduites, à la demande du mineur, que s’il en subit un préjudice.

Pleine émancipation :

176 C.c.Q. La pleine émancipation rend le mineur capable, comme s’il était majeur, d’exercer ses droits civils.

Tuteur à l’enfant mineur

Le tuteur à l’enfant mineur n’a que la simple administration. Il peut choisir seulement les placements présumés sûrs au sens des articles 1339 à 1344 C.c.Q.

208 C.c.Q. Le tuteur agit à l’égard des biens du mineur à titre d’administrateur chargé de la simple administration.

Administrateur désigné de biens d’un mineur

Il arrive qu’une personne donne (ou lègue) une somme d’argent à un mineur mais qu’elle veuille désigner une personne pour administrer cette somme. Il faut savoir qu’à défaut de nommer un tel administrateur, le tuteur remplira ce rôle.

Un administrateur désigné pour gérer un bien spécifique d’un mineur jouit de la simple administration de ce bien. Cependant, le donateur peut choisir d’accorder la pleine administration à l’administrateur – qui doit être un tiers par rapport au tuteur – dans un acte de donation ou, dans le cas du défunt, dans le testament. Encore une fois, la pleine administration permettra de passer outre aux règles des placements présumés sûrs des articles 1339 à 1344 C.c.Q.

210 C.c.Q. Les biens donnés ou légués à un mineur, à la condition qu’ils soient administrés par un tiers, sont soustraits à l’administration du tuteur.

Si l’acte n’indique pas le régime d’administration de ces biens, la personne qui les administre a les droits et obligations d’un tuteur aux biens.

Liquidateur de succession

Le liquidateur est chargé de la simple administration lorsqu’il administre les biens de la succession i.e. avant que ces biens soient dévolus aux héritiers. Étant soumis aux règles des placements présumés sûrs des articles 1339 à 1344 C.c.Q., le liquidateur ne peut généralement pas acheter une rente en accumulation ou en service ni un contrat de fonds distincts.

Cependant, dans le cas d’une succession en présence d’un testament, il faut prendre soin de lire celui-ci. En effet, le testateur a la capacité de modifier les pouvoirs du liquidateur et de lui accorder la pleine administration ou tout autre régime créé de toutes pièces, pour autant que les clauses de ce régime ne soient pas autrement prohibées par la loi. Le liquidateur peut donc se retrouver avec le droit d’investir dans un placement non mentionné à l’article 1339 C.c.Q.

Notons toutefois qu’un liquidateur, même affublé de la pleine administration, pourrait difficilement se justifier d’avoir pris une décision dans l’intérêt des héritiers de la succession s’il souscrivait une rente en service non rachetable d’une durée de 15 ans! À moins bien sûr que le testament ne lui ordonne/permette de poser un tel acte. Chaque cas doit être analysé selon les circonstances et le droit applicable.

802 C.c.Q. Le liquidateur agit à l’égard des biens de la succession à titre d’administrateur du bien d’autrui chargé de la simple administration.

778 C.c.Q. Le testateur peut modifier la saisine du liquidateur, ses pouvoirs et obligations, et pourvoir de toute autre manière à la liquidation de sa succession ou à l’exécution de son testament. Toutefois, la clause qui a pour effet de restreindre les pouvoirs ou les obligations du liquidateur, de manière à empêcher un acte nécessaire à la liquidation ou à le dispenser de faire inventaire, est réputée non écrite.

Fiduciaire d’une fiducie

Le fiduciaire d’une fiducie est chargé de la pleine administration. Il a donc une grande latitude en matière de placement. Dans le document créant la fiducie, le constituant peut prévoir une augmentation, une diminution ou autre modification des pouvoirs du fiduciaire.

1278 C.c.Q. Le fiduciaire a la maîtrise et l’administration exclusive du patrimoine fiduciaire et les titres relatifs aux biens qui le composent sont établis à son nom; il exerce tous les droits afférents au patrimoine et peut prendre toute mesure propre à en assurer l’affectation.

Il agit à titre d’administrateur du bien d’autrui chargé de la pleine administration.

Curateur au majeur

Lorsqu’une personne majeure est inapte de façon totale et permanente, on lui nomme généralement un curateur. Le curateur a la pleine administration des biens du majeur inapte. CEPENDANT, exceptionnellement, la loi l’oblige à se confiner aux règles des placements présumés sûrs prévues aux articles 1339 à 1344 C.c.Q.

282 C.c.Q. Le curateur a la pleine administration des biens du majeur protégé, à cette exception qu’il est tenu, comme l’administrateur du bien d’autrui chargé de la simple administration, de ne faire que des placements présumés sûrs. Seules les règles de l’administration du bien d’autrui s’appliquent à son administration.

Tuteur au majeur

Lorsqu’une personne majeure est inapte de façon partielle ou temporaire, on lui nomme généralement un tuteur. Le tuteur a la simple administration.

286 C.c.Q. Le tuteur a la simple administration des biens du majeur incapable d’administrer ses biens. Il l’exerce de la même manière que le tuteur au mineur, sauf décision contraire du tribunal.

Conseiller au majeur

Le tribunal nomme un conseiller au majeur si celui-ci, bien que généralement ou habituellement apte à prendre soin de lui-même et à administrer ses biens, a besoin, pour certains actes ou temporairement, d’être assisté ou conseillé dans l’administration de ses biens. Le conseiller n’a pas l’administration des biens du majeur protégé. En matière de placements, le majeur protégé doit être assisté de son conseiller pour les actes que le tribunal a déterminé ou, à défaut d’une spécification quelconque, il doit être assisté de son tuteur pour poser des actes qui excèdent la capacité d’un mineur simplement émancipé. Il a donc besoin de l’assistance de son conseiller au majeur pour effectuer un placement qui n’est pas un placement présumé sûr au sens des articles 1339 à 1344 C.c.Q.

Mandataire d’un mandat de protection (anciennement appelé « mandat en cas d’inaptitude »)

Le mandant (i.e. celui qui confie le mandat de protection), peut spécifier que son mandataire en cas d’inaptitude aura la simple ou la pleine administration de ses biens. Il est donc nécessaire de lire le mandat pour savoir si le mandataire est soumis aux placements présumés sûrs des articles 1339 à 1344 C.c.Q.

2135 C.c.Q. Le mandat peut être soit spécial pour une affaire particulière, soit général pour toutes les affaires du mandant.

Le mandat conçu en termes généraux ne confère que le pouvoir de passer des actes de simple administration. Il doit être exprès lorsqu’il confère le pouvoir de passer des actes autres que ceux-là, à moins que, s’agissant d’un mandat de protection, il ne confie la pleine administration.

2168 C.c.Q. Lorsque la portée du mandat est douteuse, le mandataire l’interprète selon les règles relatives à la tutelle au majeur.

Si, alors, des avis, consentements ou autorisations sont requis en application des règles relatives à l’administration du bien d’autrui, le mandataire les obtient du curateur public ou du tribunal.

Exception

L’administrateur soumis à l’application des règles de placements présumés sûrs n’est pas obligé de se départir des placements non présumés sûrs existant au moment où il endosse sa charge d’administrateur.

1342 C.c.Q. L’administrateur peut maintenir les placements existants lors de son entrée en fonctions, même s’ils ne sont pas présumés sûrs.

Il peut aussi détenir les titres qui, par suite de la réorganisation, de la liquidation ou de la fusion d’une personne morale, remplacent ceux qu’il détenait.

Conséquences

Il est important pour le conseiller de bien distinguer les situations où le choix de placements qu’il peut offrir est restreint afin d’éviter d’engager sa propre responsabilité en conseillant erronément l’administrateur.

1343 C.c.Q. L’administrateur qui agit conformément aux dispositions de la présente section est présumé agir prudemment.

L’administrateur qui effectue un placement qu’il n’est pas autorisé à faire est, par ce seul fait et sans autre preuve de faute, responsable des pertes qui en résultent.

Veuillez noter que plusieurs exceptions peuvent s’appliquer au contenu de cet article, qu’il vous est fourni à titre informatif et qu’il ne s’agit pas d’une opinion juridique. Les clients et les conseillers doivent rencontrer leur propre conseiller juridique pour vérifier l’applicabilité ou non de ces informations à leur situation personnelle.

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Fiducie et enfant mineur : ce qu’il faut savoir https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/serge-lessard/fiducie-et-enfant-mineur-ce-qu-il-faut-savoir/ Thu, 01 Sep 2016 00:00:00 +0000 https://stg-avatar.finance-investissement.com/uncategorized/fiducie-et-enfant-mineur-ce-quil-faut-savoir/ La désignation d'un fiduciaire à un bénéficiaire mineur ne s'applique pas au Québec. Passer outre peut être dangereux.Les produits d'assurance de personnes et les contrats de rente, y compris les contrats de rente à capital variable basés sur des unités de fonds distincts (ci-après appelés «fonds distincts»), permettent la désignation d'un bénéficiaire en cas de décès.

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Sur les formulaires de plusieurs compagnies d’assurance, à la case «bénéficiaire», on retrouve souvent une mention du genre : «Veuillez désigner un fiduciaire si le bénéficiaire est mineur, sauf au Québec».

Pourquoi nous demande-t-on d’inscrire un fiduciaire pour un enfant mineur ?

Dans les autres provinces

Hors Québec, la désignation d’un bénéficiaire mineur sans fiduciaire aura généralement pour effet que la compagnie d’assurance déposera la prestation de décès à la cour. Par la suite, une personne se présentera au tribunal pour se faire nommer tuteur aux biens (guardian of property).

Il semble que les règles touchant la gestion des biens par le tuteur aux biens soient assez contraignantes. Si personne ne fait la demande pour être nommé tuteur aux biens, le Bureau du tuteur et curateur public (Office of the Public Guardian and Trustee) (l’équivalent du Curateur public du Québec) se chargera de l’administration.

Cependant, la désignation d’un bénéficiaire mineur avec fiduciaire créera une fiducie informelle (informal trust). Elle est dite informelle parce qu’aucun acte de fiducie ne détermine les conditions auxquelles le fiduciaire doit se soumettre.

Dans un tel cas, le fiduciaire doit, pour connaître ses obligations, se référer à la Loi sur les fiduciaires (Trustee Act) de sa province.

Par contre, la désignation d’un bénéficiaire mineur avec fiduciaire pourrait aussi viser une fiducie formelle. Une fiducie formelle (formal trust) est une fiducie mise en place à l’aide d’un acte de fiducie (trust deed), c’est-à-dire un document établissant les règles à suivre et les pouvoirs du fiduciaire.

Il peut s’agir d’un acte de fiducie proprement dit ou d’un testament fiduciaire. Dans un tel cas, la désignation de bénéficiaire devrait indiquer clairement la fiducie visée par cette désignation. La fiducie formelle ne prendra effet qu’au moment de recevoir les sommes prévues.

On peut donc comprendre pourquoi la compagnie d’assurance demande d’indiquer un fiduciaire pour l’enfant mineur hors Québec. En effet, il s’agit de la méthode la plus simple pour qu’elle puisse payer le capital-décès rapidement et à la bonne personne.

Les particularités du Québec

Au Québec, il faut éliminer de notre vocabulaire toute utilisation des termes «fiducie formelle» et «fiducie informelle». Ces termes et les concepts qu’ils représentent dans les provinces de Common law n’existent pas ici.

Selon le Code civil du Québec, une fiducie est créée par la remise d’un bien, du constituant de la fiducie au fiduciaire : «La fiducie résulte d’un acte par lequel une personne, le constituant, transfère de son patrimoine à un autre patrimoine qu’il constitue, des biens qu’il affecte à une fin particulière et qu’un fiduciaire s’oblige, par le fait de son acceptation, à détenir et à administrer» (article 1260).

On ne peut pas créer une fiducie au Québec par une désignation de bénéficiaire pour la raison suivante : l’article 1260 du Code civil exige que le constituant de la fiducie transfère un bien de son patrimoine au patrimoine fiduciaire.

Dans le cas d’une désignation de bénéficiaire, la prestation de décès ne provient pas du patrimoine du constituant, mais plutôt de celui de la compagnie d’assurance.

De plus, l’article 1262 prévoit qu’il doit y avoir un contrat : «La fiducie est établie par contrat, à titre onéreux ou gratuit, par testament ou, dans certains cas, par la loi. Elle peut aussi, lorsque la loi l’autorise, être établie par jugement.»

Le contrat d’assurance ne crée pas de patrimoine fiduciaire et il ne constitue pas un contrat entre le constituant et un fiduciaire.

Au risque de me répéter, désigner un fiduciaire dans une désignation de bénéficiaire au Québec ne crée pas de fiducie ! Ce point de vue a été confirmé dans la décision Massouh (http://bit.ly/2aabdsJ).

Un administrateur du bien d’autrui ?

Cependant, pourrait-on nommer un administrateur du bien d’autrui par la désignation de bénéficiaire ?

Un administrateur du bien d’autrui est semblable à un tuteur aux biens, mais il n’est responsable que de la gestion des biens spécifiés, lesquels sont soustraits à l’administration du tuteur de l’enfant.

L’article 210 précise qu’il est possible de le faire pour des biens donnés ou légués à un mineur : «Les biens donnés ou légués à un mineur, à la condition qu’ils soient administrés par un tiers, sont soustraits à l’administration du tuteur. Si l’acte n’indique pas le régime d’administration de ces biens, la personne qui les administre a les droits et obligations d’un tuteur aux biens.»

Dans la décision Massouh, le juge a précisé avec raison que la prestation de décès d’une police d’assurance vie (et bien sûr d’un fonds distinct) n’est pas un don ni un legs.

Ainsi, il n’est pas possible pour le titulaire de ces produits de nommer un administrateur de la prestation de décès qui gérera l’argent jusqu’à la majorité du bénéficiaire. Le tuteur de l’enfant s’en chargera (le tuteur sera le parent survivant s’il y en a un).

Voici ce qu’indique l’article 192 du Code civil : «Outre les droits et devoirs liés à l’autorité parentale, les père et mère, s’ils sont majeurs ou émancipés, sont de plein droit tuteurs de leur enfant mineur, afin d’assurer sa représentation dans l’exercice de ses droits civils et d’administrer son patrimoine.

«Ils le sont également de leur enfant conçu qui n’est pas encore né, et ils sont chargés d’agir pour lui dans tous les cas où son intérêt patrimonial l’exige.»

Le bémol, c’est que le tuteur (et même l’administrateur du bien d’autrui s’il avait été possible d’en nommer un) perd sa charge à la majorité de l’enfant. Cela peut provoquer des situations où, à titre d’exemple, un jeune de 18 ans se retrouve avec 500 000 $ dans son compte de banque.

Donc, il n’est pas possible de nommer un administrateur de la prestation de décès d’une police d’assurance vie ni d’un fonds distinct par désignation de bénéficiaire, dans le but de confier la gestion de la prestation de décès à une autre personne que le tuteur de l’enfant jusqu’à 18 ans.

Désigner l’enfant mineur

Si le bénéficiaire désigné est l’enfant mineur, purement et simplement, les sommes seront la propriété de l’enfant. Du fait de sa minorité, il peut jouir de son droit de propriété sur la somme reçue, mais il ne peut exercer son droit de propriété seul. C’est pour cette raison que le chèque sera généralement libellé au nom de «Mme X, ès qualité de tutrice aux biens de Y».

À 18 ans, l’enfant devient majeur et prend d’office le contrôle de son argent. Le tuteur perd ses pouvoirs.

Par ailleurs, souvent, le titulaire de l’assurance ou du fonds distinct désire nommer directement son enfant pour des raisons de protection contre les créanciers. Mais il souhaite aussi empêcher que son enfant n’obtienne l’accès à une somme colossale pour son âge lorsqu’il atteint 18 ans.

Certains assureurs offrent donc la possibilité de prévoir dans la police d’assurance ou de fonds distincts que la prestation de décès sera payable sous forme de rente, laquelle peut avoir une durée dépassant les 18 ans.

Désigner la succession

Le titulaire de l’assurance ou de la rente peut aussi choisir de désigner la succession pour recevoir la prestation de décès. Par testament, il aura choisi possiblement l’une des solutions suivantes :

Le liquidateur devra effectuer la remise de la somme à l’enfant à des dates prévues, lesquelles peuvent être postérieures à 18 ans.

La somme sera versée à une fiducie testamentaire au profit de l’enfant.

Le liquidateur aura l’obligation d’acheter une rente pour l’enfant, laquelle rente peut avoir une durée dépassant l’âge de 18 ans de l’enfant.

À retenir

En conclusion, au Québec, tenter de contrôler la prestation de décès reçue par le bénéficiaire en nommant un fiduciaire (lorsqu’aucune fiducie n’est autrement créée) ou un administrateur du bien d’autrui dans une désignation de bénéficiaire n’est pas une solution.

Cela pourrait même faire croire faussement au client que cette désignation sera valable légalement. Gare à votre responsabilité !

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Fonds distincts et placements présumés sûrs https://www.finance-investissement.com/zone-experts_/serge-lessard/fonds-distincts-et-placements-presumes-surs/ Mon, 08 Aug 2016 08:57:32 +0000 https://stg-avatar.finance-investissement.com/uncategorized/fonds-distincts-et-placements-presumes-surs/ ZONE EXPERTS - Les fonds distincts ne font pas partie de la liste des placements présumés sûrs de l’article 1339 C.c.Q. même s'ils sont souvent plus sûrs que d'autres placements qui en font partie.

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Il vous arrive régulièrement dans votre pratique de traiter des dossiers de personnes qui ne sont pas légalement habilitées à prendre des décisions elles-mêmes. Dans plusieurs de ces cas, le régime de la simple administration s’applique. Ces cas feront l’objet d’un prochain article. Pour le moment, retenons que la personne qui administre les biens de la personne inapte (ex.: le tuteur) doit, lorsque le régime de la simple administration s’applique, choisir des placements faisant partie de la liste des placements présumés sûrs du Code civil du Québec. Cette obligation se retrouve à l’article 1304 C.c.Q. :

1304. L’administrateur est tenu de placer les sommes d’argent qu’il administre, conformément aux règles du présent titre relatives aux placements présumés sûrs.

Cette liste des placements présumés sûrs se retrouve à l’article 1339 C.c.Q. Voici le texte reproduit au long :

1339. Sont présumés sûrs les placements faits dans les biens suivants:

1° Les titres de propriété sur un immeuble;

2° Les obligations ou autres titres d’emprunt émis ou garantis par le Québec, le Canada ou une province canadienne, les États-Unis d’Amérique ou l’un des États membres, la Banque internationale pour la reconstruction et le développement, une municipalité ou une commission scolaire au Canada ou une fabrique au Québec;

3° Les obligations ou autres titres d’emprunt émis par une personne morale exploitant un service public au Canada et investie du droit de fixer un tarif pour ce service;

4° Les obligations ou autres titres d’emprunt garantis par l’engagement, pris envers un fiduciaire, du Québec, du Canada ou d’une province canadienne, de verser des subventions suffisantes pour acquitter les intérêts et le capital à leurs échéances respectives;

5° Les obligations ou autres titres d’emprunt d’une société dans les cas suivants:

a) Ils sont garantis par une hypothèque de premier rang sur un immeuble ou sur des titres présumés sûrs;

b) Ils sont garantis par une hypothèque de premier rang sur des équipements et la société a régulièrement assuré le service des intérêts sur ses emprunts au cours des 10 derniers exercices;

c) Ils sont émis par une société dont les actions ordinaires ou privilégiées constituent des placements présumés sûrs;

6° Les obligations ou autres titres d’emprunt émis par une société de prêts constituée par une loi du Québec ou autorisée à exercer son activité au Québec en vertu de la Loi sur les sociétés de prêts et de placements (chapitre S-30), à la condition que cette société ait été spécialement agréée par le gouvernement et que son activité habituelle au Québec consiste à faire soit des prêts aux municipalités ou aux commissions scolaires et aux fabriques, soit des prêts garantis par une hypothèque de premier rang sur des immeubles situés au Québec;

7° Les créances garanties par hypothèque sur des immeubles situés au Québec:

a) Si le paiement du capital et des intérêts est garanti ou assuré par le Québec, le Canada ou une province canadienne;

b) Si le montant de la créance n’est pas supérieur à 80% de la valeur de l’immeuble qui en garantit le paiement, déduction faite des autres créances garanties par le même immeuble et ayant le même rang que la créance ou un rang antérieur;

c) Si le montant de la créance qui excède 80% de la valeur de l’immeuble qui en garantit le paiement, déduction faite des autres créances garanties par le même immeuble et ayant le même rang que la créance ou un rang antérieur, est garanti ou assuré par le Québec, le Canada, une province canadienne, la Société canadienne d’hypothèques et de logements, la Société d’habitation du Québec ou par une police d’assurance hypothécaire délivrée par une société titulaire d’un permis en vertu de la Loi sur les assurances (chapitre A-32);

8° Les actions privilégiées libérées, émises par une société dont les actions ordinaires constituent des placements présumés sûrs ou qui, au cours des cinq derniers exercices, a distribué le dividende stipulé sur toutes ses actions privilégiées;

9° Les actions ordinaires, émises par une société qui satisfait depuis trois ans aux obligations d’information continue définies par la Loi sur les valeurs mobilières (chapitre V-1.1), dans la mesure où elles sont inscrites à la cote d’une bourse reconnue à cette fin par le gouvernement, sur recommandation de l’Autorité des marchés financiers, et où la capitalisation boursière de la société, compte non tenu des actions privilégiées et des blocs d’actions de 10% et plus, excède la somme alors fixée par le gouvernement;

10° Les titres d’un fonds d’investissement ou d’une fiducie d’utilité privée, à la condition que 60% de leur portefeuille soit composé de placements présumés sûrs et que le fonds ou la fiducie satisfait depuis trois ans aux obligations d’information continue définies par la Loi sur les valeurs mobilières.

(1991, c. 64, a. 1339; 2002, c. 19, a. 7; 2002, c. 45, a. 159; 2004, c. 37, a. 90; 2006, c. 50, a. 112; 2007, c. 16, a. 4.)

Une question qui revient régulièrement est celle de déterminer si les fonds distincts sont des placements présumés sûrs. Nous allons tenter d’y répondre. Notez qu’il ne s’agit que d’une opinion personnelle et que d’autres juristes peuvent avoir une opinion différente.

La question n’est pas de savoir si un fonds distinct est un placement sûr ou non. Ceci est une question purement financière relevant directement de la compétence d’un conseiller en sécurité financière.

La question est plutôt de savoir si l’article 1339 C.c.Q. vise les fonds distincts. L’article 1304 C.c.Q. oblige l’administrateur à choisir parmi les placements énumérés à l’article 1339 C.c.Q. Si un placement n’y est pas, on ne peut pas le choisir. Que le placement soit financièrement sûr ou non n’est pas pertinent; il ne peut pas être choisi s’il n’est pas mentionné à l’article 1339 C.c.Q. Un point c’est tout.

Une lecture rapide de l’article 1339 C.c.Q. nous permet de constater que les contrats de rente ne sont pas mentionnés. Or, les fonds distincts sont juridiquement des contrats de rente à capital variable basés sur des unités de fonds distincts (CRCVFD) (appelés communément « fonds distincts »). Les fonds distincts ne font donc pas partie de la liste de l’article 1339. Les « CPG » des compagnies d’assurance (aussi appelés « CIG ») sont des rentes d’accumulation à intérêts garantis. Elles sont aussi absentes de la liste. Toutes les rentes en service sont également absentes de la liste.

Les conseillers me disent souvent : « Pourtant, les rentes en service sont très sûres! », « Un CIG d’un assureur n’est pas moins sûr qu’un CPG d’une banque! », « Ben voyons donc! Plusieurs fonds communs de placement peuvent se qualifier en vertu de cette liste et vous ne viendrez pas me dire qu’un fonds commun de placement est plus sûr qu’un fonds distinct! Bien au contraire! ».

Quelle est la logique derrière tout cela me direz-vous? Aucune! Ce qui n’est pas visé par la liste de l’article 1339 C.c.Q. ne peut pas être vendu. Est-ce un oubli du législateur? Nous l’ignorons.

La solution réside dans une éventuelle modification de l’article 1339 C.c.Q. Le soussigné espère qu’une telle modification se fera le plus tôt possible.

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