Une photo de Chrystia Freeland.
Hildenbrand / MSC / Wikimedia Commons

Dans le contexte actuel des déficits, le budget présenté lundi par la ministre des Finances, Chrystia Freeland, table ainsi sur une augmentation de 4 $ du prix d’une cartouche de 200 cigarettes et du droit d’accise sur les autres produits du tabac. Les changements entreront en vigueur dès mardi.

Sur cinq ans, cette mesure devrait se traduire par des entrées de fonds totalisant 2,1 milliards de dollars (G$). Les produits du vapotage sont également dans la mire d’Ottawa, mais le « nouveau cadre de taxation » ne viendra qu’en 2022.

D’après le document, un fumeur quotidien moyen dépense près de 3150 $ annuellement en cigarettes. Les nouvelles mesures devraient ainsi faire grimper sa facture d’environ 100 $.

Les voitures neuves et les avions privés de plus de 100 000 $ ainsi que les bateaux de plaisance dont le prix est supérieur à 250 000 $ feront également l’objet d’une taxe de luxe qui doit entrer en vigueur l’an prochain et venir s’ajouter aux taxes en vigueur au moment de la vente.

« Si vous avez été assez chanceux, assez intelligent ou assez travaillant pour vous permettre de dépenser (…) félicitations! Et merci de partager un peu de cette bonne fortune pour aider à réparer les blessures causées par la COVID et à investir dans notre prospérité collective future », est-il écrit dans le budget.

Les règles proposées dans le budget exempteraient les motocyclettes et certains véhicules hors route, comme les véhicules tout-terrain et les motoneiges, ainsi que les VR.

D’ici 2025-2026, c’est ainsi 600 M$ de plus qui devraient entrer dans les coffres du gouvernement. La taxe serait calculée d’après le montant le moins élevé des deux options suivantes: 20 % de la valeur supérieure au seuil ou 10 % de la valeur totale du produit.

Mais avant d’agir auprès des entreprises numériques étrangères comme les GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft), le gouvernement Trudeau continuera à miser sur un consensus à l’OCDE.

Autrement, le budget propose, à compter du 1er janvier 2022, l’application d’une taxe de 3 % sur les services numériques de grandes entreprises étrangères dont les revenus sont d’au moins 750 millions d’euros.

« Nous sommes optimistes sur le fait qu’une telle entente peut être conclue cet été, a expliqué Chrystia Freeland, dans son discours budgétaire. Entre-temps, ce budget réaffirme l’engagement de notre gouvernement d’imposer une telle taxe de façon unilatérale jusqu’à ce qu’une approche multilatérale acceptable entre en vigueur. »

Si le Québec a légiféré en la matière, les géants du web peuvent continuer à offrir leurs produits et services aux consommateurs sans percevoir la taxe sur les produit et service ou la taxe de vente harmonisée.

En plus d’avoir été dénoncée par des entreprises établies en territoire canadien, la pratique prive également Ottawa d’importantes recettes. Sur cinq ans, les revenus tirés de l’imposition d’une taxe de 3 % sont estimés à 3,4 G$, selon le budget.

Au moment où le gouvernement Trudeau souhaite mettre sur pied un programme permanent comme un réseau national de garderies, il est « décevant » de constater qu’il ne prend pas les moyens pour obtenir des « revenus permanents », a estimé la professeure à l’Université d’Ottawa Geneviève Tellier, qui se spécialise dans les politiques budgétaires.

« Ce n’est pas avec des taxes sur les yachts de luxe qu’on va y parvenir, a-t-elle observé. La réflexion sur la fiscalité passe par le numérique. On nous demande d’être patients jusqu’à l’été. On pourrait s’attendre à mieux que ça. »

Geneviève Tellier a également souligné que de se tourner vers de « vieilles taxes » comme le tabac peut se traduire par des effets pervers, comme une recrudescence de la contrebande en raison d’une augmentation des prix.