Contrairement à la croyance populaire, rien ne l’assure, soutient Mathieu Tanguay, conseiller principal, consultation en gestion de placements chez Mercer. Même que, selon ce dernier, «il pourrait très bien s’écouler encore près d’une décennie avant que les taux se remettent à augmenter.»

Depuis trente ans, soit depuis le début des années 80, les taux sur les titres à revenu fixe, comme les obligations, ont connu une baisse quasi-ininterrompue au Canada. De près de 18% au début des années 1980, le rendement sur les obligations long terme (10 ans et plus) du gouvernement du Canada a décliné jusqu’à un plancher de 1,80%, au 31 décembre dernier.

Il est donc logique de croire que le niveau plancher d’aujourd’hui sera appelé à remonter. Après tout, le sommet du début des 1980 était l’aboutissement d’une période ascendante qui aura elle duré tout aussi longtemps, soit une trentaine d’année, à partir des années 1950.

Le hic, explique le spécialiste, est qu’avant de se mettre à remonter, les taux sur les obligation de 10 ans et plus du gouvernement du Canada sont demeurés stables pendant une vingtaine d’année à entre 2% et 3%. Graphiques à l’appui, l’expert de Mercer montre en effet que les obligations du gouvernement du Canada ont dû produire des rendements anémiques pendant vingt ans, entre 1936 et 1956, avant de se mettre à grimper.

Or, la même situation pourrait se produire au cours des prochaines années, à son avis. Avant de remonter, les rendements des obligations pourraient, comme dans les années 30, demeurer faibles ou même se mettre à diminuer davantage pendant encore vingt ans. «Ce n’est pas le scénario de base, mais ce scénario est tout de même tout à fait plausible», prévient-il.

Surtout si le ralentissement de la croissance en Chine se poursuivait, si la zone euro continuait de s’enffoncer et que l’économie américaine se remettait à chuter… Une telle convergence d’événements risquerait d’entraîner une nouvelle récession qui n’aiderait évidemment en rien un retour espéré des rendements plus généreux.

Ce scénario défaitiste serait loin d’être que théorique, soutient M. Tanguay. Les Japonnais, par exemple, doivent composer depuis plus de 14 ans, avec des taux de moins de 2% sur les obligations de 10 ans. Il faut dire que depuis 1998, le Pays du soleil levant en est à sa cinquième récession !

Au Royaume-Uni, ajoute-t-il, le rendement des obligations 10 ans s’établi présentement à quelque 1,75%, son taux le plus bas depuis 1703. Enfin, une fois l’inflation prise en compte, le spécialiste de Mercer soutient que les détenteurs d’obligations, en Allemagne et en Suisse, doivent se composer avec un rendement réel négatif.

Comme quoi, si les Canadiens ne peuvent être certains de sortir prochainement de l’auberge, ces derniers ne sont pas les seuls à en souffrir.