Vanguard Emerging Markets (VWO) et iShares MSCI Emerging Markets (EEM) ont affiché un rendement de – 12 % et de – 9,8 % depuis 12 mois (au 18 février), selon Bloomberg. En raison de la baisse du dollar canadien, leur rendement dans cette devise s’élève à – 4,3 et à – 2,1 %, respectivement.

La situation a été aggravée notamment par la baisse de la devise de plusieurs pays émergents, entre autres celles de la Turquie, de l’Afrique du Sud, de la Russie, de l’Argentine, de l’Inde, de l’Indonésie et du Brésil.

Pas si mauvaise

Toutefois, le rendement boursier des marchés émergents n’est pas particulièrement mauvais.

C’est plutôt par contraste à l’excellent rendement des actifs américains que les marchés émergents font mauvais effet, selon Laurence Bensafi, chef déléguée, Marchés émergents mondiaux chez RBC Global Asset Management, à Londres.

«La période a été volatile, mais les chiffres n’ont pas été catastrophiques. Cependant, par rapport au marché boursier américain, qui a gagné 30 %, il faut admettre que c’est une sous-performance importante», explique-t-elle.

Compte tenu de son ampleur et de son caractère exceptionnel, «l’écart entre les pays développés et les pays émergents pourrait s’amenuiser au cours des prochains trimestres», croit-elle.

Les entreprises des pays émergents sont en bonne position, soutient Sylvain Ratelle, vice-président et stratège chez Valeurs mobilières Banque Laurentienne.

«Au cours des dernières années, il y a eu beaucoup d’émissions d’obligations de sociétés à des rendements de 1, 2 ou 3 % pour les 30 prochaines années. Les bilans des sociétés sont donc très sains.»

Occasions à long terme

Malgré le mauvais rendement des derniers mois, les pays émergents pourraient représenter une occasion à long terme.

«Collectivement, les marchés émergents offriront des occasions d’investissement et de rentabilité bien plus importantes que ce qu’offriront les pays occidentaux au cours des dix prochaines années», fait valoir Marc Dalpé, conseiller et gestionnaire de portefeuille chez Richardson GMP.

Il insiste sur le rôle de modèle que la Chine jouera pour les pays émergents, en les entraînant vers des économies plus libéralisées.

«Le nouveau président chinois [Xi Jinping] est un réformateur qui croit au libre marché. Dans dix ans, la Chine ressemblera beaucoup plus à un pays capitaliste traditionnel que plusieurs ne le pensent», dit Marc Dalpé.

«Cela créera un environnement propice pour les pays émergents, et enlèvera les stigmates qu’il y a sur ce genre de marché», ajoute-t-il.

Il suggère à ceux qui n’ont pas d’actif dans les pays émergents d’en acheter progressivement au cours des deux prochaines années.

«Pendant quelques semaines, quelques mois, ce ne sera peut-être pas le moment d’investir dans les pays émergents, note toutefois Sylvain Ratelle. Il y a une valeur ajoutée à suivre le momentum du marché.»

«Les événements des derniers mois nous donnent souvent une idée de ce qui se passera au cours des prochains mois. Les marchés et les catégories d’actif montent ou baissent pour des raisons fondamentales qui ont habituellement une certaine durabilité», souligne Sylvain Ratelle.

Des pays plus risqués

Certains pays présentent une situation plus risquée que d’autres. C’est notamment le cas des Fragile Five.

«L’Indonésie, l’Inde, l’Afrique du Sud, le Brésil et la Turquie sont des pays qui affichent un fort déficit de leur balance commerciale et qui ont besoin de financement externe», précise Laurence Bensafi.

Comme ils sont des importateurs nets, ces pays ont énormément souffert de la chute de leur monnaie. «Pour cette année, nous conseillons d’être très sélectif en matière de pays», ajoute-t-elle.

Pour Sylvain Ratelle, la forte hausse des exportations américaines de pétrole et de gaz de schiste compte pour beaucoup dans la dégradation de la balance commerciale de certains pays émergents exportateurs de pétrole.

Ce phénomène pourrait avoir un effet persistant sur l’économie de ces pays : «La volatilité des marchés peut durer quelques jours, mais les problèmes de balance commerciale risquent de perdurer pendant un bon moment», ajoute-t-il.

L’influence de la Fed

À cette économie réelle parfois déficiente se sont ajoutés des phénomènes relevant davantage de l’économie financière, qui expliquent la fuite de capitaux qu’ont connue les pays émergents.

C’est le cas de la réduction des mesures d’assouplissement quantitatif de la Réserve fédérale américaine (Fed).

Cela a fait augmenter le rendement des obligations américaines et a rendu les investissements dans ce pays plus attrayants, au détriment des actifs des pays émergents, précise Laurence Bensafi.

La présence d’investisseurs peu aguerris a été un autre facteur négatif, selon elle. «Certaines personnes ont investi dans la dette des pays émergents, mais elles n’auraient jamais dû s’y trouver. Elles ont été extrêmement surprises d’avoir des rendements négatifs. Elles n’avaient pas compris qu’elles étaient exposées à des devises», explique Laurence Bensafi.