Un homme d’affaires regarde vers la ville à l’horizon à travers une longue-vue.
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De nombreuses propositions fiscales demeurent en suspens en raison de l’absence de législation dans les derniers mois, des récentes élections fédérales et des vacances d’été du Parlement.

Lorsque l’ancien premier ministre Justin Trudeau a prorogé le Parlement le 6 janvier, tous les travaux législatifs en cours ont été abandonnés. Le 23 mars, le Parlement a été dissous avant les élections fédérales d’avril, qui ont donné lieu à de nouvelles propositions en matière de fiscalité. La Chambre des communes siégera du 26 mai au 20 juin avant le début d’une nouvelle session le 15 septembre, ce qui laisse peu de temps au gouvernement nouvellement élu pour éventuellement présenter un budget avant l’automne.

Présenter un budget au printemps pourrait s’avérer particulièrement difficile, selon Brian Ernewein, conseiller principal en fiscalité nationale chez KPMG à Ottawa. Il a fait cette remarque le 8 mai dernier, lors d’une présentation en ligne portant sur l’évolution des lois fiscales au Canada et à l’international.

Par exemple, comme le souligne Brian Ernewein, le ministre des Finances François-Philippe Champagne n’était en poste que depuis neuf jours lorsque les élections ont été déclenchées. Le nouveau premier ministre, Mark Carney, vient de nommer son cabinet. Parallèlement, les États-Unis débattent d’une réforme fiscale majeure, des discussions qui pourraient se prolonger tout au long de l’été.

« Il semblerait raisonnable que le Canada tienne compte de ces discussions [américaines] », affirme Brian Ernewein. Ainsi, le gouvernement fédéral « ne pourrait pas présenter le budget avant que le projet de loi américain ne soit arrêté, ce qui laisserait présager un budget pour l’automne ».

Néanmoins, certaines propositions fiscales pourraient être mises en œuvre avant le budget. En particulier, Mark Carney a déclaré lors d’une conférence de presse récente que la réduction d’un point de pourcentage de la tranche d’imposition fédérale la plus basse — à 14 % — proposée par les libéraux serait mise en place d’ici la fête du Canada.

Cette mesure « n’aura pas d’incidence sur les déclarations de revenus au 1er juillet », prévient Brian Ernewein, mais elle est pertinente pour les tableaux de retenue d’impôt pour les déductions à la source, par exemple. « Il se pourrait bien qu’une loi ou une motion de voies et moyens — au moins sur cette mesure particulière — soit présentée au Parlement au printemps ».

Toute législation supplémentaire avant les vacances d’été serait probablement « un objectif ambitieux » pour le gouvernement, soutient Brian Ernewein en entrevue.

Parmi les autres promesses électorales à caractère fiscal qui seraient relativement faciles à rédiger et qui ont une importance pour les décisions de planification, on peut citer :

Certaines mesures fiscales en suspens sont également simples. Par exemple, les libéraux ont abandonné l’augmentation proposée du taux d’inclusion des gains en capital dans le budget 2024, et ont maintenu l’augmentation proposée de l’exonération cumulative des gains en capital de 1 million de dollars (M$) à 1,25 M$ sur la vente d’actions de petites entreprises et de biens agricoles et de pêche. Cette augmentation est entrée en vigueur le 25 juin 2024, mais un projet de loi doit être présenté.

Par ailleurs, pour les entreprises, les libéraux ont proposé d’étendre les crédits d’impôt pour l’économie propre. Il s’agit notamment des crédits d’impôt proposés pour l’électricité propre et les investissements dans la chaîne d’approvisionnement des véhicules électriques. Pour les entreprises qui envisagent « des investissements qui dépendent […] d’une combinaison de ces crédits, il serait utile que cette législation aille de l’avant », explique Brian Ernewein. « Une grande partie de cette législation a été rédigée. »

Législation à surveiller dans les mois à venir

Parmi les autres promesses électorales liées à la fiscalité, citons :

  • une augmentation de 5 % du Supplément de revenu garanti pendant un an ;
  • une nouvelle prestation de formation pouvant atteindre 15 000 $ pour les travailleurs en milieu de carrière dans les secteurs de la fabrication, de la construction, des soins de santé et de la technologie ;
  • une subvention à l’apprentissage pouvant atteindre 8 000 $ ;
  • une extension de la déduction fiscale pour la mobilité de la main-d’œuvre (pour les travailleurs qui parcourent plus de 120 km entre leur domicile et un site de travail) ;
  • une révision du système d’imposition des sociétés ;
  • une révision du processus de demande du crédit d’impôt pour personnes handicapées ; et
  • l’introduction d’actions accréditives pour les entreprises technologiques en démarrage.

Le plan fiscal des libéraux publié pendant les élections prévoyait des recettes provenant de l’augmentation des pénalités et des amendes fiscales, mais aucun détail n’a été fourni à ce sujet. « Je me demande ce que cela signifiera, s’il s’agira ou non d’efforts supplémentaires pour examiner les affaires fiscales des grandes entreprises ou des contribuables fortunés, dit Brian Ernewein. C’est très vague. »

Plusieurs mesures fiscales en suspens ont été abordées dans le projet de loi déposé le 12 août 2024, notamment des modifications techniques à la législation sur la déclaration des fiducies, le projet d’incitation des entrepreneurs canadiens, qui est entré en vigueur le 1er janvier 2025, et les nouveaux pouvoirs de vérification proposés pour l’Agence du revenu du Canada en ce qui concerne le non-respect des demandes de renseignements.

En ce qui concerne les pouvoirs d’audit proposés, « si je devais deviner, ce ne serait pas ce qu’un nouveau gouvernement essayant de donner un bon visage aux choses pourrait proposer » lorsque le Parlement siégera à la fin du mois, déclare Brian Ernewein. Cependant, « il est probable que cela se produise, peut-être plus tard cet automne ».

Dans l’ensemble, « je pense que le gouvernement adoptera la plupart des mesures qui restent en suspens, mais [les mesures] seront des points de discussion pour le nouveau ministre des Finances et les fonctionnaires des finances », soutient-il.

Il faut également s’attendre à des progrès concernant les annonces faites dans la déclaration économique d’automne, telles que l’exonération d’impôt de la prestation d’invalidité du Canada, qui sera distribuée à partir de juillet 2025.

Propositions n’ayant pas fait l’objet de mises à jour majeures depuis notre dernière vérification

Vieillir à domicile

Trois promesses du programme électoral des libéraux en 2021 ont été soulignées dans le rapport final du Conseil national des aînés sur le vieillissement à domicile, qui a été commandé par les ministres des Aînés et de la Santé et publié en 2024 :

  • une prestation pour le vieillissement à domicile ;
  • une augmentation permanente du Supplément de revenu garanti ; et
  • une modification du crédit canadien pour aidants naturels afin de le rendre remboursable.

Les deux dernières promesses figurent dans les lettres de mandat des ministres concernés, et aucune des trois promesses n’a été proposée dans les budgets ou les lois fédérales.

Autres promesses libérales en suspens

La mise en œuvre d’un crédit d’impôt pour la prolongation de la carrière des travailleurs âgés a été promise dans le programme électoral des libéraux en 2019 et mentionnée dans la lettre de mandat de l’ancienne ministre des Finances Chrystia Freeland en 2021. Il figurait dans le rapport prébudgétaire de 2024 du Comité permanent des finances, mais pas dans le budget lui-même.

Rien n’a été annoncé concernant ces autres promesses électorales de 2019 :

  • augmenter la prestation canadienne pour enfants de 15 % pour les enfants de moins d’un an ;
  • exonérer d’impôt les prestations de maternité et les prestations parentales de l’assurance-emploi ; et
  • doubler la prestation pour enfants handicapés.