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La gestion du risque de survie pour un retraité est un élément complexe. Un détenteur de REER/ fonds enregistré de revenu de retraite (FERR) peut tenter d’étaler ses retraits, mais il doit manœuvrer avec les retraits minimums, ainsi qu’une durée de vie et des rendements inconnus. Les retraits minimums des FERR ont été réduits lors du budget de 2015 afin de considérer l’espérance de vie plus longue et la baisse des taux de rendement observés.

En septembre 2018, l’Institut C.D. Howe publiait sur le sujet le texte «Making the Money Last: The Case for Offering Pure Longevity Insurance to Retiring Canadians». L’auteur réclamait des ajustements aux règles fiscales afin de permettre l’achat d’une rente viagère différée qui commencerait bien après 71 ans.

En fait, le principe général est qu’il est facile de gérer soi-même les premières années de retraits de son épargne retraite en raison des bonnes probabilités de survie. Toutefois, pour les âges plus avancés où l’incertitude est apparente, un besoin de mutualisation des risques devient plus pertinent. Ainsi, dans le cas où tous les retraités planifient en prévoyant un épuisement des sommes se rendant jusqu’à 100 ans, la majorité des gens décèderait avant et aurait réduit inutilement le niveau de leurs retraits annuels.

Le ministère des Finances du Canada a répondu à ce besoin, dans son budget fédéral, en permettant de consacrer une partie de l’épargne retraite enregistrée individuelle à ce type de rente différée dès 2020. Le plafond pour ce type de produit correspond au moindre de ces options, soit 150 000 $ à vie ou 25 % des régimes admissibles. Les régimes admissibles sont le REER, le FERR, le régime de participation différée aux bénéfices (RPDB), le régime de pension agréé collectif (RPAC) ou le régime de pension agréé (RPA) à cotisation déterminée.

Par ailleurs, le régime volontaire d’épargne-retraite (RVER) du Québec s’assimile au RPAC.

Le plafond de 150 000 $ sera indexé à compter de 2021, suivant l’inflation et arrondi au 10 000 $ le plus proche. Par exemple, à un taux d’inflation de 2 %, la limite atteindrait 160 000 $ en 2022, 170 000 $ en 2025… et 200 000 $ en 2034.

La rente peut être différée jusqu’à la fin de l’année pendant laquelle le rentier atteint l’âge de 85 ans. Elle peut bien entendu commencer avant, mais cet âge est notamment mentionné dans le texte de l’Institut C.D. Howe comme repère pertinent.

L’achat de rente viagère traditionnelle, disons dès 65 ans, avaient pour conséquence de mutualiser inutilement les premières années, alors que les taux de décès étaient peu élevés. Cette nouvelle approche permettra de mieux cibler la période réelle où le risque de longévité s’applique.

Bien entendu, en achetant une rente différée, le rentier peut prévoir ou non des prestations en cas de décès. Si une prestation de décès forfaitaire est choisie, elle ne peut pas excéder la prime payée pour la rente moins la somme de tous les paiements reçus. Lorsque cette prestation est versée au conjoint (ou à un enfant ou à un petit-enfant à charge admissible), elle peut être transférée avec report d’impôt au REER ou FERR. En l’absence de ces bénéficiaires, la prestation sera incluse dans les revenus du rentier décédé. La prestation peut également être une rente réversible (selon un pourcentage) au conjoint. Également, lors de l’achat, il est possible d’opter pour une prestation indexée selon la croissance de l’inflation ou à un taux fixe ne dépassant pas 2 % par année.

Dans la prise de décision sur les formes de prestation de décès, le rentier doit reconnaître que plus il exige une prestation de décès (par exemple s’il décède avant le début des versements), plus il réduit ses montants viagers. Rien ne se crée et rien ne se perd. À vouloir tout couvrir, on s’éloigne de l’objectif de couvrir son risque de longévité.

*Directeur principal, Centre d’expertise, Banque Nationale, Gestion privée 1859