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Lorsqu’ils rencontrent de nouveaux clients, les conseillers doivent adopter une position objective afin de bien comprendre la tolérance au risque, les objectifs et autres. Mais les préjugés, et notamment les préjugés implicites, se révèlent souvent être des obstacles à la bonne connaissance du client.

Nous avons tous des préjugés, et en être conscient peut vous aider à vous assurer que vous donniez des conseils appropriés à tous vos clients.

Les préjugés implicites, parfois appelés « préjugés inconscients », proviennent d’associations qui nous viennent automatiquement à l’esprit à propos des personnes en fonction de leur appartenance à un groupe social, explique Kate White, professeur de marketing et de sciences du comportement et doyenne associée principale de l’équité, de la diversité et de l’inclusion à la Sauder School of Business de l’Université de la Colombie-Britannique.

Ces associations peuvent être fondées sur des marqueurs d’identité, tels que le sexe, l’âge, la race et le milieu socioéconomique. Elles influencent la façon dont les conseillers abordent leur travail avec leurs clients.

Par exemple, on a appris à de nombreux conseillers à fonder l’évaluation du risque sur l’âge du client, rappelle Shari Hensrud, vice-présidente des risques et de l’analyse chez Riskalyze, une société de technologie financière située à Auburn, en Californie. Les clients plus jeunes prendraient plus de risques et les clients plus âgés en prendraient moins.

Toutefois, les conseillers doivent distinguer la capacité à prendre des risques de la volonté d’en accepter. Ainsi, si un jeune de 25 ans peut avoir une plus grande capacité à prendre des risques en raison d’un horizon temporel plus long, cela ne signifie pas nécessairement qu’il est prêt et disposé à prendre des risques importants.

« En général, les préjugés ne tiennent pas compte de l’aspect émotionnel, précis Shari Hensrud. Et ce sont les émotions qui conduisent les gens à commettre des erreurs en tant qu’investisseurs. »

En outre, il existe une idée fausse et courante selon laquelle les femmes sont plus réticentes au risque que les hommes.

« Si vous tapez sur Google « aversion des femmes pour les pertes en matière d’investissement », vous constaterez que de nombreux titres soulignent le fait que les femmes ne sont pas prêtes à prendre autant de risques en matière d’investissement, assure Alice Ambrosie, vice-présidente de la gestion des pratiques chez CI Global Asset Management à Toronto. D’après notre expérience, les femmes qui ont une compréhension claire de leurs objectifs d’investissement sont, en fait, prêtes à prendre des risques lorsque cela est nécessaire. »

Le plus grand impact que peuvent avoir les préjugés est que les clients peuvent recevoir de mauvais conseils ou des conseils qui ne sont pas adaptés à leurs besoins. Ce qui peut créer un manque de confiance envers le secteur de l’investissement dans son ensemble, avertit Alice Ambrosie.

« Chacun doit être suffisamment conscient de lui-même pour comprendre que nous avons tous une certaine forme de préjugé naturel », souligne-t-elle.

Le défi consiste à comprendre quels sont ces préjugés et comment ils entrent en jeu dans nos relations avec les clients.

Voici quelques stratégies pour vous aider à minimiser les préjugés lorsque vous traitez avec des clients :

Reconnaissez vos préjugés

Selon Alice Ambrosie, la première étape pour minimiser les préjugés est de reconnaître leur existence. « Nous ne pouvons pas changer si nous ne savons pas par où commencer », dit-elle.

Lorsqu’elle travaille avec des conseillers, elle constate souvent que leur première tendance est de dire qu’ils ont autant de bonnes relations avec les femmes qu’avec les hommes.

« C’est peut-être vrai pour les 10 % les plus importants de leur portefeuille d’affaires, mais quand on décortique vraiment la situation, on s’aperçoit souvent que les chiffres sont nettement biaisés en faveur des [hommes] en tant que relations principales », rapporte-t-elle.

Alice Ambrosie vous recommande de passer en revue votre portefeuille d’affaires et de déterminer avec qui vous entretenez des relations primaires lorsque vous servez des couples. En examinant vos interactions avec les couples hétérosexuels, vous découvrirez peut-être que vos relations avec les femmes sont plus faibles que vous ne le pensiez.

Une façon de combattre ce déséquilibre est de rencontrer chaque partenaire séparément, ce qui pourrait changer la dynamique.

« Ils peuvent avoir des objectifs et des préoccupations différents de ceux de leurs conjoints, remarque Alice Ambrosie. Et si personne ne prend le temps de creuser cette question, cela présente le risque que les conseillers opèrent sur des hypothèses non fondées. »

Vous pouvez également bénéficier d’un sondage auprès des clients pour savoir s’ils sont satisfaits du niveau d’attention et de soins qu’ils reçoivent, y compris des questions démographiques concernant l’âge ou le sexe.

« Si vous constatez que certaines cohortes de clients ont des réponses différentes des autres, cela présente [la preuve] d’un biais », analyse Alice Ambrosie.

Posez des questions ouvertes

Lorsque les conseillers acquièrent de l’expérience, ils ont tendance à poser des questions moins structurées lors des réunions de découverte, explique Alice Ambrosie. Il est important d’évaluer continuellement votre processus, même si vous êtes plus avancé dans votre carrière.

Les questions ouvertes peuvent révéler des détails sur la planification à long terme et la tolérance au risque. Alice Ambrosie suggère de poser des questions telles que : « Quels sont vos objectifs de carrière pour les dix prochaines années ? » et « Avez-vous des problèmes de santé pour vous et votre famille dont nous devrions être informés ? ». Ces questions peuvent aider à entamer des conversations.

Jackie Porter, planificatrice financière agréée chez Carte Wealth Management à Mississauga, en Ontario, déclare avoir rencontré des femmes qui ont l’impression d’avoir été rabaissées par d’autres conseillers.

Dans ces cas-là, lorsque les conseillers leur disent : « Vous avez compris ? », les clientes répondent simplement « oui » parce qu’elles ne veulent pas se sentir gênées ou jugées parce qu’elles veulent des explications supplémentaires.

« Si vous prenez quelqu’un de haut, vous ne lui demandez certainement pas de comprendre, vous ne lui demandez pas s’il a besoin de plus de précisions et vous vous mettez en danger du point de vue de la connaissance du client », prévient Jackie Porter.

Les conseillers devraient toujours encourager les questions, vérifier la compréhension lors des rencontres de découverte et poser des questions qui nécessitent plus qu’une réponse par « oui » ou « non », commente Jackie Porter.

Ralentissez

Selon Kate White, les préjugés sont plus susceptibles de nous affecter lorsque notre cerveau fonctionne selon ce que les psychologues appellent le « système 1 », c’est-à-dire la pensée automatique et rapide. Elle décrit le système 1 comme une façon de prendre des raccourcis mentaux pour prendre des décisions rapides.

Lorsque nous sommes dans le système 2, nous sommes plus attentifs et nous réfléchissons de manière prudente et rationnelle. Les pensées biaisées sont moins susceptibles de se produire dans cette situation.

« Nous ne pouvons pas toujours réfléchir avec soin, constate Kate White. Nous faisons souvent les choses en pilote automatique et allons vite. Peut-être que nous sommes pressés par le temps ou que nous sommes un peu distraits. Toutes ces choses peuvent nous faire passer au système de pensée 1. »

Apprendre à être conscient de ces deux différents types de pensée et du moment où un biais peut se produire est un bon début. Si vous remarquez que vous vous dirigez vers le système 1, prenez un moment pour réfléchir et vous demander si la question mérite d’être examinée de plus près, suggère l’experte.

Démolissez les préjugés

Si vous pensez que vous traitez vos clients différemment en fonction de leur identité, souligne Kate White, envisagez de pratiquer « l’imagerie contre-stéréotypique ».

Si vous remarquez, par exemple, que vous avez servi des femmes avec le préjugé que leur principale priorité est d’épargner pour leurs enfants, une façon de briser ce préjugé est de vous rappeler un exemple qui remet en cause le stéréotype. Vous pourriez penser à une autre cliente qui accorde à d’autres objectifs une priorité bien plus grande que celle d’épargner pour ses enfants. L’objectif est d’évoquer un exemple qui va à l’encontre de votre préjugé implicite, conseille Kate White.