Une femme d'affaire devant une fenêtre qui regarde la ville depuis un bureau dans un building.
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Les actionnaires de la Banque Laurentienne ne connaîtront pas le montant de l’indemnité de départ de son ancienne dirigeante, Rania Llewellyn, mise à pied en octobre 2023 dans la foulée d’une panne informatique sans précédent.

La femme d’affaires et la banque régionale montréalaise ont pris plusieurs mois pour arriver à une entente l’an dernier.

La Laurentienne reste muette sur le montant versé, dans des documents réglementaires envoyés aux actionnaires récemment, contrairement à la pratique habituelle pour une société cotée en Bourse. « Les détails, à la suite de cette entente, demeureront toutefois confidentiels », répond la porte-parole de l’institution, Frédérique Lavoie-Gamache, dans une déclaration écrite.

Si divulguer le montant des indemnités de départ versées à ses principaux dirigeants est une pratique courante, les sociétés cotées en Bourse n’ont pas l’obligation légale de le faire, précise la professeure de l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal, Saidatou Dicko.

« C’est sûr qu’il faut donner des informations sur la structure de rémunération, mais ces informations-là, il n’y a pas un cadre ultra-détaillé sur ce qu’il faut dire », explique l’experte en gouvernance.

Le litige entre Rania Llewellyn et son ancien employeur a vraisemblablement porté sur la question de savoir si son renvoi a été fait sous un motif valable.

Selon les conditions prévues à son contrat, l’ex-PDG n’aurait eu droit à aucune indemnité de départ si son contrat avait pris fin pour des motifs valables. Pour une cessation d’emploi sans motif, elle aurait toutefois droit à une indemnité de départ, qui comprendrait notamment deux ans de son salaire de base et une prime de cessation d’emploi.

La réponse à cette question peut être sujette à interprétation. Sous la gouverne de Rania Llewellyn, la banque a réussi à rattraper son retard technologique et l’institution a atteint certains indicateurs de rentabilité.

Ces efforts ont toutefois été ralentis par un contexte difficile pour l’industrie bancaire en 2023. L’institution a même essayé de se mettre en vente, mais n’est pas parvenue à trouver un acheteur. La panne informatique d’octobre 2023 a mené à un changement de garde à la tête de la Banque Laurentienne, maintenant dirigée par Éric Provost.

Il n’a pas été possible d’obtenir une réaction de Rania Llewellyn, que nous avons tenté de joindre.

Saidatou Dicko croit que la banque et la femme d’affaires peuvent avoir intérêt à garder secrets les montants versés si le processus était judiciarisé, surtout si les informations permettaient de voir qu’il y avait effectivement un problème.

« En fin de compte, cette entente-là, ni l’employé, ni la banque ne voudraient vraiment qu’on en connaisse les détails, croit Saidatou Dicko. Parce que ces détails-là pourraient aussi bien incriminer la banque que l’employé en question. »

Une hausse des indemnités

La Banque Laurentienne a toutefois laissé des traces dans son rapport annuel qui permettent de constater que les sommes versées en indemnité de départ ont augmenté, souligne le directeur général de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques (IGOPP), François Dauphin.

La société a rajusté à la hausse de 6,6 millions de dollars (M$) les montants qu’elle avait précédemment dévoilés en 2023 pour les sommes versées à ses principaux dirigeants après leur emploi.

En 2024, elle a versé 4,7 M$ à ses principaux dirigeants après la fin de leur emploi. Avant la révision du montant de l’année 2023, cette somme avoisinait les 750 000 $ en 2023 et 2022.

Ces montants ne sont pas uniquement liés au départ de Rania Llewellyn. L’ex-chef de l’exploitation Sébastien Bélair a reçu une indemnité de 1,6 M$ après son départ en septembre 2024, selon la circulaire d’information envoyée aux actionnaires.