La LVM édicte ainsi que les documents boursiers produits lors d’appels publics à l’épargne doivent être déposés en français pour être accessibles aux investisseurs québécois.

Ainsi, «le français n’est pas protégé et promu, puisque les émetteurs hors Québec évitent la province et ne traduisent pas leurs documents, plaide en substance Richard Morin. Si on modifie l’article pour faire en sorte que seuls des résumés de prospectus ou des prospectus simplifiés sont traduits, il y aura davantage de documents en français accessibles aux investisseurs québécois.»

Pour l’industrie québécoise, les émetteurs qui évitent le Québec lors d’un premier appel public à l’épargne (PAPE) cha-que année représentent un manque à gagner de quelque 3 G$ pour l’industrie locale, indiquent les statistiques compilées par l’Autorité des marchés financiers (AMF).

Le problème fait mal, surtout aux petits courtiers qui font affaire exclusivement au Québec. L’accès restreint à un plus vaste éventail d’émissions mine, à terme, la qualité de la négociation.

«Les petits courtiers, les petites entités, tout le monde perd, selon Richard Morin. Nous avons besoin de toutes les composantes de l’écosystème financier» pour former les entrepreneurs et pour innover, estime Richard Morin. «S’il y a un bris dans la chaîne, l’ensemble de l’industrie peut en souffrir.»

Dérivés

Un autre sujet de préoccupation est la réglementation des produits dérivés négociés de gré à gré (OTC, Over The Counter). Depuis 2008, les régulateurs du monde entier insistent pour que tous les produits financiers soient compensés pour diminuer le risque de contrepartie.

Selon ce qu’on comprend de la consultation 91-407 lancée par les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) à ce sujet, il s’agit d’exiger l’inscription de tous les produits OTC négociés au pays. «Dans les engagements pris par les pays du G20 concernant les dérivés de gré à gré, on parle de référentiel central et de contrepartie centralisée, et non pas d’inscription», rétorque Richard Morin.

Les ACVM s’inspirent du modèle américain, où la Commodity Futures Trading Commission (CFTC) réglemente l’en-semble de ce marché. Au Canada, «le marché n’a pas l’ampleur du marché américain», poursuit Richard Morin, selon qui différents cadres de réglementation existent déjà pour gérer cette problématique.

«Nous sommes d’avis que lorsque les recommandations du G20 sur la compensation et le référentiel central seront implantées, nous serons en mesure de voir» si des lacunes persistent dans la réglementation, explique Richard Morin.

L’Europe s’applique à suivre les recommandations du G20, sans réglementer davantage les dérivés de gré à gré. «Nous croyons aussi que le système actuel convient parfaitement au Canada.»

Le sort des petits

Nouveau venu, Richard Morin n’a évidemment pas eu le temps de se familiariser avec tous les dossiers qui occupent son industrie. L’ancien entrepreneur qui a quitté le portefeuilliste Landry Morin l’an dernier est évidemment sensible aux doléances des petites boutiques en cette période de consolidation.

Selon les données de l’ACCVM, la faiblesse du marché des actions, l’augmentation du fardeau de la réglementation et la consolidation sont autant de tendances lourdes au sein de l’industrie.

À la fin de 2012, le bénéfice net de 55 sociétés de détail, soit la moitié des courtiers au détail canadiens indépendants, était négatif. C’est 30 % de plus qu’en 2010. Un constat similaire s’impose pour les firmes spécialisées, notamment celles qui servent le marché institutionnel.

Pour tenter d’enrayer ce déclin, l’ACCVM estime que les régulateurs peuvent prendre certaines mesures. Un ralentissement du rythme de production des règles serait nécessaire pour donner aux petites sociétés le temps de s’adapter aux nouvelles exigences, par exemple.

Pour l’ACCVM, il faut que les régulateurs définissent exactement le besoin de réglementation lorsqu’ils veulent instaurer de nouvelles mesures, qu’ils clarifient la politique nécessaire pour pallier ce besoin, et surtout, qu’ils se livrent à l’analyse des coûts et des bénéfices.

«Une telle approche est indispensable pour garantir la mise en place d’un cadre de réglementation efficient et pour justifier les ressources consacrées au processus d’établissement des règles», écrit le lobby.