La crainte numéro un des fraudeurs : se faire prendre
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Deux personnes sur trois seraient prêtes à violer une règle dans le cadre de leur emploi s’ils étaient certains de ne pas se faire prendre, soutient François Lavallée, premier vice-président aux affaires juridiques de la Financière Banque Nationale.

Intuitivement, on pourrait penser que la meilleure façon de dissuader un fraudeur est d’avoir des cas exemplaires obtenant des peines sévères.

« Il n’y a pas, et c’est prouvé et reconnu, que la sévérité de la peine qui ait un impact dissuasif. Que ça soit pour la dissuasion collective ou individuelle », a dit Anne-Marie Boisvert, professeure titulaire à la faculté de droit de l’Université de Montréal.

L’AMF possède d’ailleurs plusieurs outils pour dissuader les possibles fraudeurs qui sont inscrits auprès d’eux. Par exemple, elle peut les priver rapidement des profits qu’ils pourraient de leur fraude en bloquant les comptes bancaires, immeubles, maisons, etc.

Cependant, son champ d’action est plus limité pour ceux qui ne sont pas inscrits. Alors, le régulateur québécois doit communiquer et être plus transparent afin de s’assurer que les possibles fraudeurs prennent la bonne décision.

« Pour [eux], c’est un exercice de gestion du risque qui va se faire sur deux axes. Premier axe, quels sont les chances que je me fasse prendre et deuxième axe, quelles sont les conséquences si je me fais prendre », a expliqué Frédéric Pérodeau, directeur principal des enquêtes à l’AMF.

Selon les observations de l’AMF, il existe trois éléments susceptibles d’attirer un conseiller à poser un geste de fraude : la pression ou le besoin financier, une opportunité et la rationalisation.

« Généralement, ce sont des hommes de plus de 40 ans, qui occupe une fonction où il y a certaines opportunités », a-t-il dit.

Malgré tous les efforts d’éducation financière, Frédéric Pérodeau croit qu’une bonne partie de la responsabilisation incombe à l’investisseur.

« Si vous êtes capable de magasiner des heures et des heures sur Internet pour un barbecue à 400 $. Quand vient le temps d’investir une somme d’argent importante, renseignez-vous, a-t-il illustré. Si c’est trop beau pour être vrai, c’est trop beau pour être vrai. »

Un travail à l’international

Les plus récents travaux du comité quatre de l’Organisation internationale des commissions de valeurs (OICV) sur la dissuasion crédible identifient sept facteurs susceptibles d’avoir un effet dissuasif sur les fraudeurs dans l’industrie des valeurs mobilières.

« Ce rapport comprend pas moins de 121 exemples concrets d’exemples d’actions efficaces menées par les régulateurs à travers le monde en lien avec ces facteurs », a indiqué Jean-François Fortin, directeur général au contrôle des marchés à l’AMF.

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Les documents ne concernent que la dissuasion en matière de « mise en application »

Les sept facteurs ont été retenus par le comité « puisqu’individuellement ou collectivement, ils avaient un effet dissuasif positif et concret pour les régulateurs participants aux travaux du comité », a noté Jean-François Fortin lors du panel organisé par l’AMF.

Les facteurs identifiés sont :

– La sécurité juridique (des exigences réglementaires claires et compréhensibles)

– La détection (activités de surveillance des marchés ou mécanismes de dénonciation)

– La coopération et de la collaboration (autant locale et internationale entre les régulateurs et les organisations concernées)

– Enquêtes et poursuites (les pouvoirs inhérents aux régulateurs)

– Les sanctions (punitives, compensatoires, justes et imposées avec discernement)

– La transparence (les régulateurs doivent faire connaître leurs activités et leurs intentions)

– La gouvernance (formations et équipes spécialisées pour suivre l’évolution des nouvelles tendances)