Surprises. «Depuis 1994, 17 entreprises étrangères ont quitté le Canada. Il ne reste que Transamerica, qui est la propriété du groupe mondial Aegon. Je m’attendais à ce que certains s’en aillent, mais pas autant que cela.»

«Ces départs ont deux causes possibles. Une crise économique, par exemple, pousse généralement les entreprises à protéger leur territoire de base. Ensuite, le Canada est peut-être victime de sa taille. Il ne représente que 3 % de l’économie mondiale, et les sociétés internationales n’ont peut-être pas consacré assez d’énergie à leurs filiales canadiennes et ont été insatisfaites de leurs résultats financiers.»

Moment fort personnel. «Je suis chez Industrielle Alliance depuis 35 ans. J’en suis le président depuis 14 ans. Ce qui me rend le plus fier, c’est que nous soyons devenus une société publique en 2000. Quand je regarde nos résultats sur la place boursière depuis 2000, nous sommes la compagnie d’assurance vie qui a connu la meilleure performance.»

Évolution de la presse. «La presse économique s’est améliorée, les connaissances du public sont aussi de plus en plus grandes, notamment grâce à la technologie. Pour les représentants, cela représente un défi supplémentaire. À mon avis, il devrait avoir plus de couverture sur les impacts du virage technologique et sur les initiatives dans ce domaine.»

Changements à venir. «On commence à observer les changements démographiques chez les clients et chez les employés. Il y a aussi un groupe de baby-boomers qui dirige les distributeurs avec qui nous faisons affaire, qui pourraient par exemple vouloir tirer profit de leur entreprise et partir à la retraite. C’est entre autres en raison du vieillissement de la population qu’il y aura une consolidation des opérations dans l’industrie. Il n’y aura pas suffisamment de gens pour les diriger.»

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Stephen A. Jarislowsky, président du conseil d’administration, Jarislowsky Fraser

Éléments marquants. «Il y a eu la bulle de la haute technologie qui a éclaté en 2000, suivie par la bulle immobilière des États-Unis en 2008-2009. Ces événements ont montré que la Réserve fédérale américaine (Fed) n’était pas à la hauteur quant au travail qu’elle aurait dû faire.

«Il y a également eu un assouplissement des lois aux États-Unis. Certains règlements qui avaient été instaurés pour rendre la Bourse plus sûre après le krach de 1929 ont été éliminés. Cela a donné l’occasion à beaucoup d’entreprises, particulièrement aux banques d’investissement, de faire de nombreuses spéculations qui n’étaient pas permises auparavant.

«Les employés de ces entreprises n’ont pas d’argent investi dans les titres qu’ils négocient. Donc, ils ne risquent rien personnellement. Ils jouent à des jeux dans lesquels ils ne se seraient pas aventurés avec leur propre argent.»

Surprises. «Je déplore que l’augmentation de la paye des cadres des banques d’investissement ait atteint des niveaux totalement injustifiés. Ce ne sont pas des génies. Ils ne sont pas meilleurs qu’ils l’étaient quand ils recevaient un dixième de ce qu’ils touchent maintenant. Il s’agit presque d’un vol d’argent, l’argent des investisseurs.»

Moments forts personnels. «L’accomplissement le plus important de ma vie, beaucoup plus que ce que j’ai fait à titre de gestionnaire de fonds, c’est d’avoir contribué à la création d’organismes de gouvernance au Canada comme la Coalition canadienne pour une bonne gouvernance (CCGG), l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques et la Fondation canadienne pour l’avancement des droits des investisseurs (Fair Canada).»

Évolution de la presse. «Je suis déçu que la presse économique soit en déclin. Il y a une perte en ce qui a trait aux critiques qu’on trouvait auparavant dans les journaux. On ne parle pas par exemple des rendements réels auxquels les investisseurs ont droit. Certains fonds leur promettent un rendement de 8 %, alors qu’à long terme, après les frais de gestion, les commissions de suivi, l’inflation et l’impôt, il n’est que de 0,5 %. Chez Jarislowsky Fraser, par exemple, grâce à notre style d’investissement à long terme, certains de nos clients imposables ont bénéficié d’un rendement annualisé brut de 9 % et d’un rendement réel à long terme de 4,5 %.»

Changements à venir. «Albert Einstein a dit : « Deux choses sont infinies, l’Univers et la bêtise humaine. En ce qui concerne l’Univers, je n’en ai pas encore acquis la certitude absolue ! » Ça répond à tout. Je ne crois pas que l’être humain apprenne beaucoup.»

Jean-Guy Desjardins, président du conseil et chef de la direction, Corporation Fiera Capital

Éléments marquants. «Les outils de transfert d’informations financières tels que ceux offerts par Bloomberg ont assurément transformé l’industrie sur le plan de la rapidité et de l’efficacité. Tout se fait quasi instantanément. Le temps de réaction est beaucoup plus court que ce qu’il était avant. En fin de compte, cela rend les marchés plus efficients.»

Surprises. «L’évolution de la science du placement. La capacité d’adaptation des institutions financières à l’amélioration de l’efficience des marchés. Aujourd’hui, il est beaucoup plus difficile qu’il y a 15 ans d’apporter de la valeur ajoutée dans une activité financière. Il est aussi surprenant de voir à quel point l’industrie s’est bien acclimatée à la nouvelle réglementation concernant la gouvernance et la gestion du risque.»

Moments forts personnels. «La création de Fiera Capital par l’acquisition d’Élantis [filiale de placement du Mouvement Desjardins], en 2003, et l’acquisition de Natcan, la filiale de la Banque Nationale, en 2012.»

Évolution de la presse. «Elle a évolué et est bien meilleure qu’il y a 15 ans, mais la presse économique ne s’est pas développée au même rythme que l’industrie. Il y a du retard en ce qui a trait à la quantité et à la qualité de l’information financière sur la science du placement. Par exemple, on ne parle pas suffisamment des stratégies alternatives comme l’investissement en infrastructures, par rapport à ce qui existe déjà. L’information sur les fonds spéculatifs est aussi encore très superficielle.»

Changements à venir. «L’industrie de la gestion de portefeuille risque de se consolider de plus en plus, en raison des frais de fonctionnement associés notamment à l’adaptation technologique entraînée par les changements de réglementation. Cela fait en sorte que les entreprises de petite taille ne pourront pas survivre. Tout comme c’est le cas pour l’assurance maintenant, je crois qu’il sera difficile de partir de zéro une entreprise de gestion de portefeuille. Les marchés seront également de plus en plus efficients et la réglementation encore plus accrue.»

Monique F. Leroux, présidente et chef de la direction, Mouvement Desjardins

Éléments marquants. «L’évolution des nouvelles technologies, mais surtout, celle des services mobiles. Ces derniers ont entraîné à leur tour de profonds changements au sein de l’industrie des services de paiement. De plus, on interagit désormais avec son institution financière par l’intermédiaire de divers canaux : par Internet, en succursale, au moyen de son téléphone intelligent, de sa tablette.

«Le défi est de mieux intégrer chacun de ces canaux afin de créer une expérience fluide pour nos membres et clients, dont les attentes sont de plus en plus élevées.

«L’autre élément est sans contredit la crise financière de 2008-2009, qui a entraîné un renforcement de la réglementation partout dans le monde.»

Surprises. «La rapidité de l’impact, actuel et futur, des nouvelles technologies et des services mobiles sur notre industrie.

«L’ampleur de la crise financière m’a aussi surprise. Je m’attendais bien à ce qu’une vague nous frappe, les signaux d’alarme étaient là, mais lorsqu’on a vu des géants comme Lehman Brothers tomber, on a plutôt assisté à un véritable raz-de-marée.»

Moment fort personnel. «Mon élection à la présidence du Mouvement Desjardins, en 2008. Un moment très émotif, mais en même temps fort stimulant. Sans compter qu’il m’a fallu, dès mon entrée en poste, composer avec une importante crise financière…»

Évolution de la presse. «Comme pour l’industrie des services financiers, la presse, de façon générale, a aussi été obligée de se transformer. Le contenu est plus riche, les nouvelles plus détaillées et on a accès à tout cela presque instantanément. Les publications sont très présentes sur le Web et les plateformes mobiles. On sent qu’il y a eu un travail en profondeur pour mieux comprendre ce qui fait vibrer les professionnels du placement et les entrepreneurs.»

Changements à venir. «La concurrence ira en s’accentuant. La présence de plus en plus importante de nouveaux acteurs qui ne font pas partie de l’industrie des services financiers, comme PayPal ou Google Wallet, se fera ressentir davantage.

«Les nouvelles technologies nous permettront de nous rapprocher davantage de nos membres, et amènent en ce sens une redéfinition de la notion de collectivité. Voilà une avenue intéressante pour une institution coopérative comme Desjardins.

«Ultimement, le défi sera de nous différencier dans un monde où les services financiers seront de plus en plus banalisés.»