C’est généralement par voie d’échange d’actions ordinaires en contrepartie d’actions privilégiées, qui ont une valeur représentant la juste valeur marchande au moment du transfert, que s’effectue le gel sans impact fiscal immédiat pour son auteur.

Une fois le gel effectué, l’auteur peut conserver les actions privilégiées de gel jusqu’à son décès ou il peut les racheter au fil du temps afin de financer sa retraite.

Évidemment, s’il les conserve, aucune conséquence fiscale n’est à prévoir de son vivant. Ce n’est qu’au moment de son décès que le détenteur est présumé avoir disposé des actions privilégiées de gel à la valeur établie au moment du gel (et non pas la valeur au décès) générant ainsi un gain en capital imposable dans la déclaration fiscale finale du défunt.

Impact fiscal prévisible

L’un des grands avantages de procéder à un gel des actions est que la valeur de celles-ci demeure fixe dans le temps. La croissance de la valeur de l’entreprise à la suite du gel est attribuée aux nouvelles actions ordinaires participantes émises au profit des nouveaux actionnaires.

Ainsi, les impôts au décès du détenteur d’actions privilégiées sont prévisibles et faciles à estimer. Au besoin, une assurance vie peut être souscrite par la société pour générer les liquidités nécessaires pour l’acquittement de la facture fiscale au décès de l’actionnaire détenteur des actions privilégiées de gel.

Rachat pour financer la retraite

Bien que le gel permette d’arrêter en quelque sorte la croissance de la valeur des actions et les impôts qui en découlent, il est possible que cette valeur diminue dans le temps. Ce sera le cas lorsque le détenteur des actions privilégiées décide de racheter progressivement ses actions lors d’un transfert d’entreprise ou encore pour financer sa retraite.

Cette solution, généralement moins coûteuse et moins complexe que la mise en place d’une convention de retraite, ne se fera pas sans conséquence fiscale. Un rachat d’actions se traduit par un dividende imposable pour l’actionnaire dont le taux d’imposition peut atteindre 39,8 % selon l’ensemble de ses autres revenus personnels de l’année.

Afin de simuler adéquatement l’impact fiscal découlant du rachat des actions, il est important d’utiliser le bon taux d’imposition. Ce n’est qu’avec d’autres revenus de 138 586 $ que le dividende non déterminé sera imposable au taux marginal maximum. Et il ne faut pas non plus négliger le remboursement de l’impôt en main au titre de dividendes (IMRTD) dont l’entreprise pourra bénéficier. Autrement dit, cette simulation mérite une attention particulière, pas seulement une estimation approximative !

Combiner prêt et assurance vie

Lorsque les actions privilégiées de gel sont rachetées au fil des ans, la dette fiscale au décès de l’actionnaire sera réduite d’autant. Le rachat d’actions privilégiées progressif, combiné à l’utilisation de produits d’assurance vie exonérée, peut donner des résultats intéressants sur le plan fiscal.

La stratégie fonctionne généralement ainsi : au lieu de laisser des actifs croître dans la société et de prévoir des placements liquides ou des échéances pour racheter les actions privilégiées de l’actionnaire, un montant peut être investi dans une police d’assurance vie. Techniquement, dans un contrat d’assurance vie exonérée, l’accumulation des placements se fera plus rapidement que dans des instruments réguliers, en raison de l’exonération de la police.

Afin de répondre au besoin de liquidités pour racheter les actions privilégiées, il est possible d’effectuer des retraits des sommes accumulées dans la police.

Évidemment, dans un tel cas, il faut considérer l’impact fiscal qui peut en découler. Retirer la valeur de rachat en tout ou en partie peut générer un revenu imposable. Le montant imposable sera équivalent au retrait moins le coût de base rajusté de la police, et sera imposé au taux marginal maximum de la société qui détient la police.

Afin d’éviter à la société de devoir payer des impôts à la suite du retrait des liquidités nécessaires pour le rachat des actions privilégiées, le contrat d’assurance peut être donné en garantie auprès d’une institution financière en contrepartie d’un prêt ou d’une marge de crédit.

Si l’actionnaire a opté pour un prêt garanti par la police, le capital-décès servira à rembourser l’emprunt au moment de son décès et sera crédité au compte de dividende en capital (CDC) même si l’institution financière prêteuse est bénéficiaire de la police.

Dans le cas où toutes les actions privilégiées auraient été rachetées du vivant de l’actionnaire, il n’y aurait plus d’impôt à payer à son décès. L’assurance vie ne serait plus requise pour fournir les liquidités au décès. Néanmoins, si la société qui la détient décide de la conserver, le produit de l’assurance pourra servir à d’autres fins. L’héritage net d’impôt des bénéficiaires de l’actionnaire décédé sera plus important que si l’impôt dû au décès n’avait pas été réduit graduellement de son vivant par le rachat des actions.

Pour ceux qui préfèrent voir la protection d’assurance fondre au même rythme que le rachat des actions, il existe des produits d’assurance vie dont le capital décès diminue en fonction du rachat des actions privilégiées.

Un gel successoral permet d’atteindre plusieurs objectifs, et s’il est combiné à l’utilisation de produits financiers sophistiqués, il peut donner des résultats financièrement intéressants pour l’actionnaire, pour ses successeurs et pour sa succession.