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Cependant, cette croissance «s’est faite de manière très ordonnée, avec discipline et travail, sans égard aux cycles et aux tendances», signale Philippe Le Blanc, président et chef des placements, et associé.

«Nous évoluons à l’extérieur des sentiers battus. Nous n’avons pas de terminal Bloomberg, nous ne sommes pas connectés sur CNBC et nous avons les cotes en différé de 20 minutes, illustre-t-il. Nous ne nous considérons pas comme un « trader », alors nous nous foutons pas mal de ce qui se passe à la seconde près, car ça ne change pas grand-chose pour les entreprises que nous suivons.»

Philippe Le Blanc évoque aussi des périodes où la firme a décidé de ralentir: d’augmenter le niveau minimum d’actif pour accéder à ses services et d’être davantage sélective face à sa clientèle.

Établie à Saint-Bruno-de-Montarville, en Montérégie, COTE 100 offre un service de gestion pour un ménage détenant un patrimoine supérieur à 300 000 $ à investir avec elle. La boutique sert plus de 500 familles, y compris des sociétés de portefeuille et quelques fondations. Pour chaque client, elle bâtit des portefeuilles sur mesure, qu’elle gère ensuite de façon active.

Son équipe croit que concentrer ses investissements dans ses meilleures idées de placement procure les meilleurs résultats à long terme. Elle est prête à accepter une sous-performance à court terme dans le but d’obtenir une surperformance à long terme.

«Nos rendements, c’est une chose sur laquelle on ne met pas l’accent», ajoute Philippe Le Blanc, qui qualifie COTE 100 de gestionnaire non traditionnel qui table sur la croissance à long terme.

COTE 100 se distingue aussi par son service. «Nous parlons à nos clients au moins tous les trimestres, qu’ils aient été bons ou mauvais. Lorsque les rendements sont bons, ça peut sembler moins important, mais lorsqu’il y a des périodes plus difficiles, et j’ai en tête 2008-2009, nous étions là pour parler aux clients.»

COTE 100 organise des conférences et des séminaires chaque année à l’intention des clients et de leurs enfants. De plus, sa lettre financière, qui est publiée mensuellement depuis 1988, nourrit les échanges.

«Au départ, la lettre financière s’adressait à des investisseurs autonomes et c’est comme ça qu’on s’est fait connaître. Si la croissance du nombre d’abonnés a bénéficié de l’essor du courtage à escompte au début des années 1990, sa publication répond toujours à un besoin et suscite encore beaucoup d’intérêt», constate Philippe Le Blanc.

Le système COTE 100

COTE 100 a été fondée en 1988 par Guy Le Blanc. «Mon père a bâti une entreprise vraiment exceptionnelle, avec des fondations particulièrement solides. Au fil du temps, il y a eu des ajustements dans notre offre, notre façon d’investir et de bâtir des portefeuilles, mais la philosophie d’investissement est demeurée identique», évoque Philippe Le Blanc.

Le système COTE 100 a été développé en 1986-1987 par Guy Le Blanc, qui l’utilisait pour gérer son propre portefeuille. «Ce système a été l’élément déclencheur de la firme, et nous l’utilisons encore aujourd’hui de façon systématique», ajoute-t-il.

Il se présente un peu comme un bulletin scolaire qui donne à chaque titre une cote sur 100, selon trois grandes catégories de ratios financiers, résume Philippe Le Blanc.

«La grille permet de cibler des entreprises qui sont en excellente santé financière, qui sont non seulement en croissance, mais qui génèrent des rendements intéressants sur le capital, et qui se vendent à des ratios d’évaluation raisonnables, explique-t-il. L’exercice permet donc de filtrer des entreprises. Ensuite, notre travail de recherche permet d’évaluer les aspects plus qualitatifs, par exemple l’attrait de l’industrie, la qualité de l’équipe de direction et le modèle d’affaires.»

À ses débuts, COTE 100 effectuait essentiellement de la gestion de portefeuille pour des clients institutionnels. Puis en 1992, la firme a lancé ses deux premiers fonds communs de placement (FCP). Aujourd’hui, la firme a toujours des FCP, mais les utilise surtout en paniers de fonds dans le cadre de solutions hybrides à la gestion privée pour plusieurs enfants de clients désireux d’investir également.

Du tennis à la finance

C’est à cette période, en 1992, que Philippe Le Blanc a rejoint COTE 100.

Il était de retour au Québec après avoir terminé ses études de baccalauréat en finance à l’Université du Minnesota, et mis fin au tennis de compétition. «J’ai commencé à travailler un été pour donner un coup de main à mon père et cela fait maintenant 24 ans.»

Notons que la famille Le Blanc est étroitement liée au tennis. Philippe a déjà été classé numéro un mondial chez les 14 ans et moins, alors que son frère Sébastien a notamment remporté en 1990 les titres du double junior à Roland-Garros et à Wimbledon, en équipe avec Sébastien Lareau.

Philippe et Sébastien ont aussi décroché des bourses qui ont financé leurs études universitaires respectives en sol américain. Sébastien Le Blanc, qui est chef des opérations et associé de COTE 100, détient un baccalauréat en finance de l’Université de Californie à Los Angeles (UCLA) et de l’Université du Québec à Montréal. Philippe Le Blanc a pour sa part terminé sa formation en obtenant une maîtrise en administration des affaires (MBA) de l’Université McGill. Il détient également le titre de Chartered Financial Analyst (CFA) depuis 2003.

Il est d’avis que le sport est l’une des meilleures écoles. «Ça apporte une grande discipline, de la concentration, et ça apprend à faire face à l’adversité. J’ai eu beaucoup de succès très jeune au tennis, mais avec le temps, c’est devenu plus difficile. Dans le domaine boursier, c’est la même chose. Ça ne va pas toujours bien, mais il faut savoir relativiser les choses et rebondir.»

C’est d’ailleurs ce qu’a fait COTE 100 au tournant des années 2000. Portée par des rendements «exceptionnels» tout au long des années 1990, la firme a «frappé un mur à la fin de la décennie, parce qu’on n’a jamais investi dans la techno. Nous avons alors perdu des mandats institutionnels, beaucoup d’actif, et ce furent des années très difficiles», évoque Philippe Le Blanc.

En 2003, Marc L’Ecuyer s’est joint à la firme et avait pour mandat de développer l’axe de gestion privée. Il est aujourd’hui gestionnaire de portefeuille principal et chef de la conformité, et associé.

«Nous sommes partis de zéro, mais cette décision d’aller en gestion privée a été la meilleure qu’on pouvait prendre. Ça a changé complètement le modèle d’affaires de l’entreprise, de sorte qu’elle est plus robuste que jamais», analyse Philippe Le Blanc.

Guy Le Blanc, pour sa part, bien qu’il ait officiellement pris sa retraite, demeure toujours impliqué, tant au niveau de la gestion de l’entreprise que de la gestion des portefeuilles. «Une transition graduelle s’est amorcée en 2009 et elle a pris fin récemment, mais nous nous parlons tous les jours.»

Développement en Ontario

Depuis 2005, COTE 100 ne fait plus de gestion pour des clients institutionnels, à l’exception de certaines fondations.

«Nous pourrions développer à nouveau l’axe institutionnel, mais selon nos propres termes. Nous ne voulons pas avoir de trop gros clients institutionnels et nous retrouver dans une position où ce client devienne tellement important que ça puisse même nuire à la performance de nos autres clients, indique Philippe Le Blanc. Nous voulons essentiellement des clients institutionnels qui vont ressembler à nos clients privés.»

Philippe Le Blanc est convaincu qu’étant donné les rendements enregistrés depuis de nombreuses années par COTE 100, dont une surperformance par rapport à l’indice S&P/TSX depuis 2011, des investisseurs institutionnels vont démontrer leur intérêt.

COTE 100 s’est également enregistrée comme gestionnaire de portefeuille auprès des régulateurs de l’Ontario et du Nouveau-Brunswick. Elle a déjà quelques clients dans ces provinces, mais n’a pas encore fait d’efforts jusqu’ici pour développer ces marchés.

Cela risque toutefois de changer. «Nous croyons qu’il y a un potentiel intéressant, surtout en Ontario, mais ce n’est pas une course», explique Philippe Le Blanc.

Comme la lettre financière a toujours représenté sa meilleure vitrine, COTE 100 a entrepris de la traduire. Elle sera bientôt disponible pour le marché anglophone.

Philippe Le Blanc admet que la croissance de COTE 100 intéresse : «Nous sommes passés de petit acteur marginal à acteur qui commence à prendre sa place, alors oui, nous nous faisons approcher. Mais j’ai 45 ans, je suis le plus âgé des associés et je n’ai pas l’intention d’arrêter. Il n’y a pas de plus beau domaine, de plus beau travail, et notre qualité de vie est exceptionnelle».

Au total, les trois associés de COTE 100 comptent 12 enfants. «Ils sont encore jeunes, mais qui sait, peut-être que l’un d’eux voudra un jour s’impliquer pour une troisième génération ? Nous sommes des investisseurs à long terme dans nos portefeuilles, mais dans nos entreprises aussi», conclut-il.