Le marché du travail risque d’accélérer l’inflation
iqoncept / 123RF Banque d'images

Le taux d’inflation continue de grimper. En juillet, l’indice des prix à la consommation (IPC) a en effet bondi de 3,7 % par rapport à la même période en 2020, selon Statistique Canada. En juin dernier, la hausse avait été de 3,1 %. Or, les tendances inflationnistes des derniers mois n’empêchent pas pour autant les investisseurs de dormir, semble-t-il.

« On n’a pas beaucoup d’appels de clients en panique qui s’inquiètent pour la portion obligataire de leur portefeuille. Les réactions sont beaucoup plus fortes et démesurées quand c’est la volatilité des actions qui est en cause, comme c’est le cas en période de perturbations économiques ou de récession », constate François Bélanger, conseiller en placement chez BMO Nesbitt Burns.

Kelly Trihey, gestionnaire de portefeuille au sein d’iA Gestion privée de patrimoine, fait écho à ces propos. « Ce n’est pas une source de stress ou d’inquiétude, comme lors des crises économiques, quand les investisseurs sont beaucoup plus nerveux. L’inflation pose certainement un risque potentiel, mais il n’y a pas d’impact immédiat dans les portefeuilles », note-t-elle également, en ajoutant suivre néanmoins la situation de près.

Inflation temporaire

Il y a d’autant moins lieu de s’inquiéter pour le moment de cette augmentation des prix, ou d’une hausse rapide et soudaine des taux d’intérêt, qu’il s’agit somme toute d’une situation normale et temporaire, estiment la plupart des observateurs.

La hausse de l’inflation s’explique en effet principalement par la baisse des prix survenue au début de la pandémie qui, de plus, a causé un déséquilibre dans divers secteurs, générant ainsi une forte augmentation des prix des produits de base, par exemple. En clair, les prix de nombreux biens et services semblent avoir augmenté très rapidement parce qu’ils sont comparés avec une base de prix plus faible qui avait cours il y a un an.

« On n’a pas de boule de cristal, mais la hausse de l’inflation ne devrait pas perdurer dans le temps », estime Kelly Trihey.

Il s’agit sans aucun doute d’une inflation temporaire, juge également François Bélanger. « Le gouvernement a inondé le marché d’argent et une majorité de consommateurs se sont retrouvés avec plus d’argent dans les poches pour dépenser. Le marché va retrouver son équilibre et on ne prévoit pas de hausses de taux d’intérêt dans un avenir rapproché », précise-t-il.

N’empêche: les obligations occupent une place prépondérante dans les portefeuilles de nombreux investisseurs. Et, en règle générale, l’inflation se répercute sur le marché obligataire et sur celui des titres à revenu fixe. Voilà pourquoi, en ces rares périodes de hausse inattendue de l’inflation, il importe néanmoins de rassurer les investisseurs en leur rappelant le rôle que joue la portion obligations dans leur portefeuille.

« Il y a des raisons pour lesquelles on inclut des obligations dans la construction d’un portefeuille. Ça permet de préserver le capital, d’avoir des revenus récurrents et aussi une diversification de ses actifs. On les aura donc dans les bons et les mauvais moments. Si la COVID revient en force et qu’on doit encore fermer des pans de l’économie, les investisseurs seront bien contents de détenir des obligations », fait valoir François Bélanger, en précisant que la gestion d’un portefeuille passe par une planification financière. « Peu importe ce qui se passe dans le marché, il faut s’en tenir au plan d’action établi. On ne doit pas prendre de mauvaises décisions en fonction des aléas du marché », rappelle-t-il.

Cela ne veut pas dire qu’il faut rester les bras croisés. « On a abordé le sujet de l’inflation avec nos clients en début d’année, en leur précisant comment on pourrait positionner le portefeuille pour en tenir compte », indique Kelly Trihey, qui a notamment adopté comme stratégie de réduire la duration du portefeuille des clients et d’opter pour des obligations à courte échéance.

La duration du portefeuille d’obligations est aussi dans la mire de François Bélanger afin de « diminuer les risques de hausses de taux », dit-il. En raccourcissant la durée entre l’achat d’une obligation et son échéance, les investisseurs réduisent ainsi leur exposition au risque de fluctuation des taux d’intérêt, notamment en raison de l’inflation.

Obligations en tout genre

François Bélanger s’intéresse également aux obligations de certaines entreprises qui, fortes de la reprise économique, « posent moins de risque de défaut de paiement et pourraient représenter un haut potentiel de rendement ». Certaines obligations de marchés émergents qui verseraient des intérêts plus élevés méritent aussi une attention particulière, relève-t-il.

Et qu’en est-il des obligations à taux variable, soumis aux fluctuations des taux d’intérêt? « On n’en détient pas dans nos portefeuilles. On préfère plutôt les obligations à court terme », répond Kelly Trihey, en ajoutant que les obligations à taux variable nécessitent une gestion plus active pour en tirer profit.

La surpondération des actions, au détriment de celle des titres à revenu fixe, permet aussi de se protéger d’une hausse de l’inflation et des taux d’intérêt, soulignent les deux professionnels.

Toutefois, « on en revient toujours à l’importance d’avoir une bonne planification financière et un portefeuille diversifié pour diminuer les risques », soutient François Bélanger.