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Bon nombre de firmes de courtage de l’industrie financière devraient en faire davantage afin de fournir des outils et un environnement de travail dans la langue de choix de leurs conseillers. En s’améliorant sur le plan du bilinguisme, elles éviteront d’accroître le sentiment d’injustice qui est actuellement présent chez un segment de conseillers de leur équipe.

Comme le montre le texte sur le sujet en une du présent numéro, il y a actuellement un problème perçu par une minorité de conseillers au sein de diverses firmes de l’industrie. Certains n’ont pas le soutien ou les outils nécessaires afin de bien servir leur clientèle en français et le déplorent. On retrouve également des cas, plus rares, de conseillers anglophones qui reprochent à leur courtier le manque de soutien dans leur langue de travail.

Ces situations sont loin d’être souhaitables et doivent être prises au sérieux par les directions des courtiers ainsi que par leurs actionnaires ou leurs entités mères.

Ce n’est pas la première année que ­Finance et Investissement enregistre ce genre de commentaires de la part des sondé(e)s dans le cadre du ­Pointage des courtiers québécois de plein exercice et du Pointage des courtiers multidisciplinaire. Cette année par contre, davantage l’ont verbalisé, et ce, même si nos questionnaires n’abordaient pas précisément ce sujet. Il est difficile de savoir pour quelle raison il en est ainsi cette année, mais une chose demeure : il y a un malaise chez certains conseillers et les courtiers devraient faire ce qu’il se doit afin de le dissiper.

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Les firmes doivent non seulement agir afin de respecter leurs obligations en vertu des lois et règlements touchant le français au ­Québec, mais également afin de témoigner leur respect et leur empathie envers leurs réseaux de conseillers et leur force de vente. Autrement dit, offrir un soutien et des outils adéquats fait partie du coût normal et auquel on s’attend lorsqu’on fait affaire dans le marché des clients francophones ou anglophones, selon le cas.

Ce ne sont pas toutes les firmes qui ont des problèmes perçus de bilinguisme, et les problèmes de chaque courtier lui sont propres. Toutefois, les principaux enjeux se résument à ceux décrits dans l’article : le soutien informatique ou d’experts n’est pas dans la langue de leur choix, c’est parfois le cas également avec la formation ou les interactions avec la direction. Certains outils ne sont pas accessibles en français ou y sont mal adaptés, et parfois, les lettres et communications aux clients et autres documents sont mal traduits ou dans la mauvaise langue.

Certains conseillers perçoivent ces enjeux comme une injustice et ainsi voient leur motivation baisser. À terme, les firmes qui ne feront pas d’efforts suffisants pour régler les problèmes risquent d’être moins compétitives, voire de perdre de bons conseillers ou de bons employés.

Soyons francs, certaines firmes ont probablement moins avantage à faire d’efforts en ce sens, car leur présence au Québec se limite à quelques bureaux situés dans les métropoles québécoises. Il n’est donc pas étonnant que les avocats et experts en fiscalité de ces firmes offrent un soutien minimal en français ou tardent avant de traduire certaines formations.

De plus, certaines firmes sont héritières de systèmes informatiques patrimoniaux et sont ainsi aux prises avec des outils informatiques et plateformes désuets, qui sont compliqués et coûteux à changer ou à adapter au fait français.

Pour ces raisons et probablement d’autres, trouver une solution à un problème qui est perçu par certains dirigeants comme marginal n’est pas une priorité, même s’il donne du fil à retordre aux directeurs régionaux ou de succursale du ­Québec.

La pénurie de ­main-d’œuvre spécialisée n’aide en rien ceux qui veulent s’attaquer réellement aux problèmes liés au bilinguisme.

Malgré tout, les directions de beaucoup de firmes doivent s’efforcer de s’améliorer sur ce plan et y investir les ressources pour ce faire. Il ne suffit pas d’en parler ou de se montrer « à l’écoute » : les courtiers doivent agir concrètement en ce sens pour être crédibles. Car comme quelques conseillers l’ont mentionné lors de nos sondages : les actions parlent d’elles-mêmes et résonnent davantage que les paroles.

Une chose est certaine : les efforts de bilinguisme des firmes doivent être continus dans le temps. Certains conseillers répondants aux sondages ont vu augmenter soudainement leur degré d’irritation envers leur firme parce que les nouveaux membres de l’équipe de direction étaient remplacés par des unilingues anglophones. Ou encore parce que les délais de traduction de documents importants, comme un résumé des mesures clés d’un budget fédéral ou provincial destiné aux clients, augmentaient soudainement.

De plus, la conception de nouveaux outils, y compris de nouvelles formations, et la mise à jour des processus de travail doivent réellement tenir compte des besoins des minorités linguistiques, au même titre qu’elles ne doivent pas discriminer les groupes minoritaires et racisés.

Une organisation est une entité en évolution dans le temps et certains changements peuvent être parfois tolérés en fonction du contexte, parfois non.

Faire de réels efforts afin de fournir des outils et un environnement dans la langue de travail préférée par un conseiller devrait faire partie de la culture même des organisations de l’industrie financière.