«Si on agit aujourd’hui, la rente de longévité c’est un investissement, c’est de l’épargne, mais si on n’agit pas maintenant, demain ce sera une taxe», a-t-il plaidé en expliquant que le manque d’épargne des Québécois et l’effritement des régimes à prestations déterminées risquaient fort de coûter cher au gouvernement dans l’avenir si rien ne change dans le système de retraite.

Le comité D’Amours, qui a émis 21 recommandations sur l’avenir des régimes de retraite, propose d’ajouter un pilier au système québécois en créant la rente de longévité pour tous les travailleurs, encaissable à partir de l’âge de 75 ans. Cette rente représenterait une nouvelle charge financière pour certains employeurs et leurs employés, mais elle permettrait d’assurer des revenus décents aux personnes qui survivront à leurs épargnes.

«Elle vise deux buts : mutualiser le risque de longévité et faciliter la planification financière de tous les Québécois en vue de leur retraite, sachant que le risque de longévité sera pris en charge partiellement à partir de 75 ans», a expliqué l’ex-président du Mouvement Desjardins.

Le coût du régime de longévité s’établirait à 3,3% du salaire, jusqu’à concurrence du maximum des gains admissibles (51 100$), et il serait réparti à parts égales entre les employeurs et les travailleurs, soit 1,65% chacun.

La facture totale est évaluée par le comité à 4 G$, mais dans les faits ce devrait être la moitié de cette somme, car pour les deux millions de participants à un régime collectif, les coûts seraient nuls ou réduits en raison d’une réallocation de l’épargne. Il s’agirait en fait de réduire les cotisations au régime collectif proportionnellement aux nouvelles charges attribuables à la rente de longévité.

Tous les travailleurs âgés de 18 à 74 ans seraient couverts, mais personne ne serait obligé de travailler jusqu’à un âge déterminé pour y avoir droit. En fait, la rente de longévité serait attribuée en fonction des cotisations versées tout au long de la carrière. Le crédit de rente est fixé à 0,5% du salaire soumis à la cotisation et chaque année de cotisation donnerait droit à un crédit de rente, sans limite au nombre d’années cotisées. Elle profitera donc davantage à ceux qui contribueront le plus longtemps, les jeunes, suivant ainsi le principe de l’équité générationnelle cher aux membres du comité d’experts présidé par Alban D’Amours.

Ainsi, un jeune travailleur qui cotisera toute sa carrière, disons pendant 40 ans, paiera des cotisations de 421,58$ par année (et son employeur tout autant) pour un salaire de 25 550$ et il recevra à 75 ans une rente annuelle de 5110$ (20% de son salaire).

Un travailleur à mi-carrière qui cotisera pendant 20 ans et dont le salaire est de 51 100$ et plus (maximum admissible) paiera des cotisations de 843$ annuellement pour recevoir à partir de 75 ans une rente de longévité de 5110$ (10% de son salaire).

Cette rente de longévité s’ajoutera à ses autres revenus de retraite, comme les prestations de la Régie des rentes du Québec, la pension de la sécurité de vieillesse du gouvernement fédéral (à 67 ans) et d’éventuels revenus d’une caisse de retraite de travailleurs.

La rente longévité est entièrement capitalisée. En utilisant un taux de rendement réel de 3%, le comité d’experts vise une approche prudente afin de s’assurer d’une meilleure certitude de respecter la promesse.

Elle pourrait être mise en place graduellement sur une période de cinq ans afin de miniser l’impact de son financement sur les travailleurs et les entreprises. Dans un tel cas, l’actif accumulé serait moindre et les rentes ajustées en conséquence. Deux millions de travailleurs québécois ne participent actuellement à aucun régime d’épargne collectif.

Parmi les avantages de cette rente de longévité, le comité D’Amours estime que chaque travailleur pourra bénéficier d’une gestion professionnelle efficiente de son épargne, avec de faibles coûts de gestion puisque la RRQ s’en chargerait. Le risque de longévité se trouve aussi mutualisé.

«On a tout espoir de voir notre rapport pris très au sérieux. Aucun agenda politique responsable n’exclura nos recommandations de son action», a déclaré Alban D’Amours après avoir présenté son rapport aux journalistes.

Le comité D’Amours, mandaté par le gouvernement libéral de Jean Charest, a débuté ses travaux en novembre 2011. Il est formé des actuaires René Beaudry, Claude Lamoureux et Bernard Morency, ainsi que de l’économiste Maurice Marchon, du fiscaliste Luc Godbout et de l’avocat Martin Rochette.