Une salle de réunion.
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Robert Prichard s’est plutôt connecté à une diffusion sur le web depuis le confort de son domicile, où il a expliqué que le changement était attribuable aux mesures de confinement liées à l’épidémie de COVID-19 et à une ordonnance du tribunal, obtenue en avril, accordant aux principales banques et compagnies d’assurance du pays le droit de tenir virtuellement de telles réunions.

« C’est une période extraordinaire, a observé M. Prichard à l’ouverture de la webdiffusion. Nous regrettons d’avoir dû prendre cette décision car il est important pour nous de rencontrer en personne les actionnaires et de leur donner la possibilité de prendre la parole en personne. »

Cette façon de faire sera reproduite par d’autres banques au cours des prochaines semaines. Le changement présente de nouvelles occasions et de nouveaux défis pour Bay Street et les entreprises d’un peu partout dans le monde.

Richard Leblanc, professeur de gouvernance, de droit et d’éthique à l’Université York, a estimé qu’il s’agissait d’un « changement important », mais a averti que les assemblées générales en ligne uniquement ne satisfaisaient pas tout le monde.

Les sociétés de services aux investisseurs Institutional Shareholder Services et Glass, Lewis & Co. ont depuis longtemps signalé qu’elles n’appuyaient pas un tel changement.

« Les investisseurs sont toujours préoccupés par le fait que la direction conduit l’autobus et qu’elle contrôle le tableau de bord. Elle a donc la possibilité de manipuler ou de supprimer les préoccupations d’une manière qui affecte négativement les investisseurs et cela, selon les investisseurs, ne se produirait pas à lors d’une réunion en personne », a expliqué Richard Leblanc.

« À cela je répondrais que la direction peut également manipuler les réunions en personne. »  À titre d’exemple, Richard Leblanc a signalé les assemblées qui ont lieu dans des endroits éloignés.

« Pas la même sensation »

Bien qu’une assemblée virtuelle présente certains aspects pratiques, en particulier dans des circonstances comme une pandémie, elle présente aussi certains inconvénients.

« Je disais à mon équipe que l’interaction avec nos actionnaires me manque », a indiqué jeudi le président et chef de la direction de TD, Bharat Masrani, lors d’une conférence téléphonique avec les journalistes après la tenue de la première assemblée générale virtuelle de la banque.

« Ça ne procure pas la même sensation. »

Bharat Masrani a promis que la Banque TD reviendrait aux assemblées en personne une fois que la pandémie sera terminée.

Bien avant la COVID-19, les assemblées générales virtuelles souffraient d’une adoption lente, a observé la vice-présidente de la gouvernance d’entreprise chez Meridian Credit Union, Brigitte Catellier.

Les assemblées virtuelles ont commencé au début des années 2000 avec des entreprises américaines, mais il n’y en a pas eu au Canada avant 2017, a-t-elle expliqué.

Des actionnaires plus à l’aise

Brigitte Catellier a remarqué que les assemblées hybrides, les rassemblements en personne avec une certaine participation électronique, sont plus populaires que les options uniquement virtuelles, mais ces dernières ont tout de même leurs avantages.

Plus de questions sont abordées dans les assemblées virtuelles car le temps est mieux géré. Et quand vient le temps de prendre la parole, de nombreux actionnaires sont plus à l’aise, a observé Brigitte Catellier.

« Vous pouvez imaginer que, pour un actionnaire, se présenter au micro dans une grande salle avec des centaines de personnes devant la scène peut être intimidant », a-t-elle expliqué.

« Dans un monde virtuel, où les questions sont tapées au clavier dans une boîte de discussion, c’est beaucoup moins intimidant et beaucoup plus accessible. »

Pour mettre les actionnaires à l’aise et garantir que même les personnes ayant des compétences informatiques limitées peuvent participer, Brigitte Catellier a indiqué que Meridian prévoyait de tenir son assemblée par l’entremise d’une téléconférence vocale cette année.

Les entreprises qui passent à une assemblée virtuelle devraient pour leur part s’efforcer d’imiter autant que possible les assemblées annuelles habituelles, estime M. Leblanc.

Il leur recommande de faire plusieurs répétitions avant leur assemblée, avec tous les membres de leur conseil d’administration et leur fournisseur de technologie virtuelle à portée de main. Les entreprises devraient savoir quoi faire en cas de longues questions ou de perturbations, et les actionnaires devraient recevoir autant d’informations à l’avance sur la nouvelle procédure, a-t-il indiqué.

« Cela a tendance à dérailler pour les actionnaires institutionnels et les actionnaires militants s’ils se sentent surpris de quelque façon que ce soit, donc la préparation avant la réunion est cruciale », a-t-il affirmé.

Plusieurs suivent de près les changements temporaires aux assemblées en raison de l’importance qu’ont les banques, a-t-il ajouté.

« Les banques donneront le ton à toutes les sociétés du TSX, il est donc important de bien faire les choses », a souligné Richard Leblanc.

Si elles réussissent, Richard. Leblanc prédit que cela pourrait changer à jamais la façon dont les assemblées générales annuelles se déroulent, même si certaines entreprises comme la Banque de Montréal et la Banque TD s’engagent à revenir à leur format habituel après la COVID-19.

« Je ne serai pas surpris si des conseils d’administration et des équipes de direction passaient au virtuel uniquement, a-t-il indiqué. C’est difficile de revenir en arrière. »