Le chiffre suscite une satisfaction mitigée. «Huit pour cent, c’est bien, mais j’aurais préféré une croissance dans les deux chiffres», commente Patrick Cloutier, vice-président principal, ventes et au développement des affaires chez Groupe Cloutier.
Le dirigeant de l’agent général de Trois-Rivières constate que la protection contre les maladies graves s’introduit graduellement dans le discours de base du conseiller. «On en parle à ses clients, mais il faut continuer de le faire», dit-il.
Il ajoute que les médias facilitent – bien involontairement, il faut le dire – le travail de prospection des conseillers en sécurité financière. «Les journaux et les émissions de télévision parlent régulièrement de statistiques et d’histoires vécues de cancers et d’ACV. La démonstration des besoins devient claire aux yeux des consommateurs», dit Patrick Cloutier.
Chez iA Groupe financier, la hausse des ventes de protections en maladies graves a été de 7 % en 2015. «Nos ventes s’expliquent par le prix, le design des produits et la popularité de l’option de remboursement des primes», précise Louis-Charles Leclerc.
Rappelons que cette option (ou avenant) prévoit le remboursement de la prime à l’échéance du contrat en cas de survie de l’assuré ou encore, s’il décède pendant le contrat.
«Le remboursement de primes aide à vendre ce produit. Pourquoi ? Parce que le client a l’impression qu’il ne paiera pas pour quelque chose qu’il n’utilisera pas», dit Sylvain Gagné, qui est maintenant consultant après avoir travaillé chez l’agent général BBA Groupe Financier à titre de directeur général associé, ainsi que chez Empire Vie, Axa Canada et RBC Assurances.
Vice-président au développement des affaires de l’agent général Financière S_entiel, Frédéric Perman travaille en assurance de personnes depuis 1995. Il constate également que l’option de remboursement des primes est devenue un argument de vente important.
«C’est au début des années 2000 que les conseillers ont proposé l’assurance maladies graves en faisant valoir les avantages du remboursement des primes», dit Frédéric Perman.
Toutefois, ajoute-t-il, il s’agit là d’une lame à double tranchant, puisque l’option s’adresse surtout aux clientèles d’affaires (d’entreprises) ainsi qu’aux professionnels à hauts revenus comme les médecins.
«C’est un avenant qui coûte cher. De plus, en raison de la limite démographique de ces clientèles, les ventes ne pourraient que plafonner si on mettait uniquement l’accent sur l’option de remboursement de primes», dit-il.
En outre, et c’est là que le bât blesse, cette option pourrait éventuellement disparaître de l’arsenal de vente des conseillers en sécurité financière. La cause : l’interminable crise de rentabilité des produits à long terme en assurance de personnes.
«À cause de la persistance des bas taux d’intérêt et des pressions énormes exercées sur la rentabilité, nous ne croyons pas que l’option de remboursement des primes est éternelle. En fait, tous les assureurs canadiens s’interrogent sur la pérennité des options de remboursement de primes», remarque Louis-Charles Leclerc.
En conséquence, les conseillers devraient en profiter… pendant que ça dure.
«Je ne connais pas d’assureurs qui ont fait disparaître l’option de remboursement des primes ou qui les ont modifiées à la baisse. Par contre, je crois qu’il est temps de tirer parti de cette option, car les taux d’intérêt très bas rendent ce genre de produits très difficiles à supporter pour les assureurs», dit Sylvain Gagné.
Frédéric Perman ajoute une autre mise en garde : le Canada est le seul pays où les primes sont garanties, rappelle-t-il.
Et les primes garanties n’ont rien d’éternel non plus. «Il est possible que ça change !» prévient Frédéric Perman.
L’option de remboursement de primes ne peut évidemment pas constituer l’attrait principal d’un produit d’assurance de personnes.
Louis-Charles Leclerc propose plutôt de mettre l’accent sur les impacts financiers d’une maladie grave au sein de la famille.
«Plusieurs pensent que l’assurance collective pourra combler tous les besoins dans l’éventualité d’une maladie grave, mais ce n’est pas toujours le cas. Par exemple, l’assurance collective ne couvre pas l’absence au travail d’un assuré qui voudrait assister son conjoint ou son enfant touché par une maladie grave».
Pour sa part, Frédéric Perman suggère de focaliser l’effort de vente sur les effets d’une possible maladie grave sur la structure d’une planification financière.
«Il faut bien sûr être en mesure d’absorber le choc financier d’une maladie grave lorsqu’elle se produit. De plus, après une maladie grave, bien des gens décident de vivre autrement, par exemple de changer de carrière ou de travailler moins,» dit-il.
Ainsi, les conseillers devraient évoquer des couvertures de maladies graves qui équivalent à un ou deux ans de revenus après impôts, ajoute Frédéric Perman.
En empêchant la dilapidation du patrimoine, l’assurance maladies graves laisserait ainsi intact fonds de retraite, REER et biens immobiliers, des ressources financières qui sont bien souvent utilisées en première ligne en cas de malheur.