Drapeau des USA à Chicago avec des gratte-ciel sur fond.
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Les actifs américains, longtemps perçus comme des piliers de stabilité, ne suffisent plus à garantir l’équilibre des portefeuilles, signale Fidelity International dans son rapport de mi-année. La firme appelle à une refonte en profondeur des stratégies d’allocation d’actifs pour faire face à la fragmentation géopolitique.

« Nous entrons dans une phase où les valeurs refuges traditionnelles comme les actifs américains ne peuvent plus porter les portefeuilles mondiaux à elles seules », affirme Henk-Jan Rikkerink, responsable mondial des solutions multiactifs, de l’immobilier et des stratégies systématiques chez Fidelity.

Les investisseurs doivent donc remettre en question leurs vieux réflexes pour faire face à l’accélération des bouleversements géopolitiques et à la dépréciation du dollar américain.

Réorienter les portefeuilles

Fidelity recommande de revoir la répartition géographique pour adopter une approche plus équilibrée, en misant notamment sur les marchés émergents. Les titres brésiliens et mexicains, par exemple, sont jugés particulièrement attrayants : sous-évalués, ils offrent des rendements élevés et bénéficient directement de l’affaiblissement du dollar.

Les obligations des marchés émergents en devises fortes et locales peuvent également être privilégiées, car elles bénéficient d’un affaiblissement du dollar américain.

En parallèle, les devises comme l’euro et le yen japonais gagnent en attractivité en raison de leurs qualités défensives

En Chine, la reprise semble mieux ancrée dans les fondamentaux, tandis que l’Inde et l’Amérique latine offrent également des perspectives de croissance soutenue. Le tout à des valorisations avantageuses.

L’or conserve son statut de valeur refuge. Fidelity prévoit qu’il continuera à bien jouer ce rôle, en particulier si la dépréciation du dollar se poursuit ou si les tensions géopolitiques s’intensifient.

Inflation « made in USA »

Aux États-Unis, les droits de douane avoisinent désormais 14 %, ce qui, selon Fidelity, pourrait faire grimper l’inflation chez les voisins du sud à 3,5 % d’ici la fin de 2025.

La firme envisage deux scénarios dans son rapport, jugés aussi probables l’un que l’autre : soit une reflation modérée, soit une stagflation, où les prix continuent de grimper malgré un ralentissement économique. Dans les deux cas, la firme prévoit que la croissance américaine plafonnera à 1 % cette année.

Cette situation rend le travail de la Réserve fédérale d’autant plus délicat, selon Henk-Jan Rikkerink. Il estime qu’une baisse des taux est peu probable à court terme. Cette incertitude monétaire alimente selon lui la nécessité d’élargir les horizons d’investissement.

Repenser les fondamentaux

« Le président Trump entend relocaliser l’industrie aux États-Unis et réduire le déficit courant via des tarifs douaniers, tout en concluant des accords avec des pays alliés. La Chine, de son côté, tente de renforcer la consommation intérieure et de développer son secteur des services. À long terme, on assistera à une fragmentation accrue des sphères économique, technologique et sécuritaire mondiales », indique Henk-Jan Rikkerink.

Résultat : le rôle traditionnel du dollar américain comme monnaie refuge et comme outil de couverture contre les risques est remis en question. « La diversification a toujours été importante ; elle devient désormais impérative », affirme Henk-Jan Rikkerink.

Le gestionnaire souligne que les portefeuilles sont devenus dépendants des actifs américains au cours des 25 dernières années. La dépréciation du dollar et les mouvements de capitaux risquant de modifier en profondeur la pondération des indices mondiaux, ceux qui sauront anticiper ces changements structurels pourraient en tirer un net avantage stratégique.

Des alternatives au marché américain

Certaines régions, comme la zone euro et le Japon, se démarquent déjà, selon Fidelity. L’Allemagne, en particulier, pourrait bénéficier d’un regain d’intérêt. Le pays a mis en œuvre en 2025 un tournant fiscal majeur, face aux enjeux géopolitiques et aux besoins accrus en matière d’infrastructure et de défense, sans pour autant compromettre sa rigueur budgétaire.

Le yen japonais reste, lui aussi, une valeur de repli solide grâce à sa faible corrélation avec le marché des actions. En parallèle, les marchés immobiliers européens axés sur la rénovation énergétique suscitent un regain d’intérêt, en offrant à la fois rendement et résilience.

Les États-Unis ne sont pas à écarter, mais…

Pour autant, Fidelity ne recommande pas de tourner le dos aux États-Unis. Ses analystes estiment que les actions américaines conservent leur place dans un portefeuille bien diversifié. Ils soulignent que le S&P 500 regroupe des entreprises innovantes, rentables et tournées vers l’actionnaire. Les ignorer serait une erreur, mais miser exclusivement sur elles n’est pas non plus une stratégie viable.

Le rapport de Fidelity pointe les déséquilibres budgétaires américains, qui atteignent des niveaux historiques. Les volumes massifs d’émission de dette accroissent la prime de risque sur les obligations souveraines, qui deviennent moins attrayantes.

Selon la firme, la diversification est donc désormais une condition de survie pour les portefeuilles confrontés à un monde plus incertain et divisé que jamais.