En effet, comme je vous l’ai déjà mentionné dans une chronique précédente, plus l’horizon de temps est court, plus les mouvements de marchés sont aléatoires, donc impossible à prédire avec certitude. Par contre, on peut essayer d’analyser la situation pour savoir si on est dans une situation extrême, qu’elle soit positive ou négative, et tenter d’identifier les endroits plus à risque dans les marchés.

Tout d’abord, en discutant avec mes amis économistes, j’ai appris que la reprise actuelle est relativement jeune par rapport au passé donc, selon certains d’entre eux, on se rapproche plus d’un milieu de cycle d’expansion que de la fin de celui-ci. L’analyse du passé des cycles économiques ne nous donne donc pas d’arguments vers une vente.

Toutefois, on pourrait aussi soutenir que, comme cette récession était différente (crise financière et non cycle d’inventaire), on ne peut utiliser le passé pour analyser la situation présente puisqu’on n’a pas vraiment d’exemple de ce qui se passe normalement après une période semblable.

Pour ce qui est des marchés de la dette, je fais partie de ceux qui ne croient pas que la situation est propice à la génération de rendements suffisant pour compenser le risque sur une base d’investissement. Je comprends que l’on puisse tenter de transiger les hauts et les bas des taux d’intérêt. Toutefois, ce n’est pas ma façon d’approcher les marchés car, selon moi, je n’ai pas d’avantages compétitifs me permettant d’exécuter ce type de stratégie mieux que les autres investisseurs.

Des taux d’intérêt avant impôts et inflation d’environ 2% pour un terme de 10 ans, c’est bien pour l’emprunteur, mais pas pour l’investisseur. Pour ceux qui y ont accès, une stratégie d’achat de prêts bancaires, par l’intermédiaire d’un fond ou d’un FNB, fait du sens car le coupon est plus élevé et compense donc mieux pour le risque. Il faut comprendre que nous vivons dans un régime de taux administrés qui ne reflètent pas les risques fondamentaux des marchés, mais d’autres objectifs plus politiques qu’économiques.
Pour ce qui est des marchés boursiers, il est évident que leur attrait est grand par rapport au niveau des taux d’intérêt. Il faut comprendre que le niveau artificiel des taux administrés a le même impact sur la rémunération du risque pour les actions que pour les obligations. La seule exception est que les résultats des entreprises ont une composante variable par rapport à un coupon fixe pour la majorité des obligations.

Ceci veut dire que la relation entre les taux d’intérêt et les rendements des actions est moins directe que pour les titres à revenus fixes. En terme absolu et par rapport aux évaluations historiques moyennes, on ne peut plus dire que les marchés boursiers sont une aubaine. Par contre, on ne peut pas dire que nous sommes dans une période de bulle d’évaluation. Dans cet environnement, la croissance des marches devrait être plus ou moins en ligne avec la croissance des profits des entreprises. Je favorise donc les actions par rapport aux obligations mais sur une base sélective donc de croissance de profit. C’est donc un marché de sélection de titre. L’endroit le plus attrayant reste les entreprises privées, car elles se transigent à des fractions des prix des entreprises cotées en bourse. Par contre, pour la majorité des investisseurs, cet avantage est détruit par les frais exorbitants qui sont chargés par les fonds de placements privés.

Je crois que l’on doit porter une attention particulière aux devises. Depuis un certain nombre de mois, le dollar américain s’est apprécié de façon spectaculaire contre les autres devises importantes de la planète. L’économie des États-Unis, de par sa taille et à la suite de la délocalisation de sa production, est beaucoup moins sensible aux fluctuations de devises que celle des autres pays.

Il demeure que les rendements ont beaucoup augmenté et souffriraient d’un retournement de situation. Celui-ci pourrait survenir, notamment en raison d’une montée trop importante et trop rapide du dollar américain qui apporterait des tensions politiques et influencerait certainement les différentes politiques monétaires des banques centrales. Que dire de l’impact qu’une montée du billet vert aurait sur les protectionnistes Américains, malheureusement trop nombreux au Congres et Sénat Américain.
 

Ce texte provient du Stratège, une publication de l’Association de planification financière et fiscale (APFF), et a été écrit par Pascal Duquette.