Le monde de l’information à haute fréquence, qui nous bombarde de statistiques faisant bouger les marchés, domine les médias. On voit des « experts » venir expliquer le sens des chiffres annoncés mais, entre vous et moi, il s’agit beaucoup plus de rationalisation que d’information avec du contenu réel. On crée de l’excitation et des transactions. En soit, ceci ne serait pas très grave s’il n’y avait pas autant d’interaction entre les marchés des liquidités et des produits dérivés.

Cette interaction peut se transformer en mouvement directionnel créant un excès de volatilité. Dans ce type de marché, on rémunère plutôt les intermédiaires que les investisseurs et de ce fait, on augmente les coûts du système et donc on réduit les rendements attribuables aux actionnaires stables. Le marché ne joue donc pas aussi bien son rôle ultime d’optimisateur et d’allocateur de capital et devient davantage un casino.

Cela me fait penser aux paris du Super Bowl. Tous sommes d’accord que seul le résultat ultime compte dans ce match final de la saison de football. Toutefois, une quantité impressionnante d’argent est mise sur toutes sortes de paris qui n’ont rien à voir avec le résultat final et qui ne possèdent donc aucun contenu informationnel pertinent. Que ce soit sur le résultat du tirage au sort, sur la durée de l’interprétation de l’hymne national, sur l’identité de la première équipe qui compte ou sur les derniers chiffres du score des deux équipes en fin de chaque quart de jeu. Pourtant, des sommes colossales sont pariées.

Je crois que c’est aussi ce qui se passe dans les marchés financiers. J’entends déjà les critiques crier haut et fort que dans le cas des statistiques financières, c’est différent, car elles contiennent de l’information pertinente. Allez dire ça a Georges Bush senior qui croyait que l’économie était florissante tel que rapportée par les statistiques. En fait, on avait déjà commencé une récession ce qui ne fut confirmée que lors des révisions subséquentes des chiffres.

Résultat: il a perdu ses élections! Fait peu connu, les statistiques officielles sont révisées très souvent et de façon significative sur des périodes qui peuvent aller jusqu’à prés de 3 ans après leur publication initiale. Le contenu informationnel peut donc être tout à fait différent que prévu et induire les gens en erreur : du bruit qui peut se révéler néfaste.

Ma deuxième réflexion porte sur la manipulation des marchés financiers par les autorités. Cette idée m’est venue en lisant une nouvelle sur le marché boursier japonais. On expliquait que celui-ci avait remonté jusqu’au niveau d’avant la bulle des titres de l’Internet. On mentionnait aussi que le plus gros acheteur dans le marché était le gouvernement à travers des fonds négocies en Bourse (FNB).

Lorsqu’on ajoute à ça les interventions quantitatives des banques centrales sur les marchés obligataires, on a droit de mettre en doute le fonctionnement de nos marchés financiers en tant qu’allocateur de capital et les prix qui en résultent. Peut-on faire confiance à des prix qui sont le résultat d’une demande artificielle basée sur des facteurs politiques et non économique?

J’ai toujours cru qu’à court terme les prix du marché pouvaient dévier significativement de la valeur intrinsèque de l’actif sous-jacent. Par contre, à long terme, ces déviations sont corrigées. Donc, si nous soutenons des prix artificiellement, qui paiera le prix lorsque ceux-ci reviendront à un niveau reflétant les valeurs fondamentales? Malheureusement, l’histoire tend à démontrer que ce sera, encore une fois, le petit investisseur.
 

Ce texte provient du Stratège, une publication de l’Association de planification financière et fiscale (APFF), et a été écrit par Pascal Duquette.