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De 1926 à 2016, seulement 1 000 titres, sur les 26 000 qui ont été cotés sur les bourses américaines durant la période étudiée, ont fait mieux que la simple détention d’un bon du Trésor d’un mois, selon une recherche de Hendrik Bessembinder, professeur de finance, Arizona State University, publiée en 2018 (Do Stocks Outperform Treasury Bills | ASU W. P. Carey).

C’est dire que sur une période de 90 ans, une élite de seulement 4% des titres aux États-Unis a produit la totalité de 35 billions US$ de valeur nette créée.

L’inverse de cette proposition vaut la peine d’être précisée : 96% de toutes les actions qui ont paru et disparu dans les bourses américaines ont fait guère mieux que de la pacotille. Vaut mieux détenir une obligation fédérale américaine d’un mois : ça payera autant et sera plus sûr. Une autre chose ressort de l’étude : la surperformance tient surtout aux titres de très grande capitalisation.

« Les résultats aident à comprendre pourquoi les stratégies actives, qui tendent à être faiblement diversifiées, sous-performent le plus souvent », commente le chercheur dans les pages du site Internet de l’Université de l’Arizona. « Seulement 86 titres (0,33% de l’échantillon total) expliquent 16 billions US$ de création de richesse, soit la moitié de la plus-value totale des marchés boursiers, au cours des 90 dernières années. »

Une mise à jour des résultats jusqu’à la fin de 2019 établit que, de décembre 2016 à décembre 2019, en même temps que la plus-value est passée de 35 à 47,3 billions US$, la concentration de la création de richesse a également augmenté. Les titres qui mènent le bal ne sont plus des grandes capitalisations, mais de super grandes capitalisations

Hendrik Bessembinder a fait un suivi de sa recherche en 2019, l’étendant à 62 000 titres cotés dans les Bourses internationales où il a recensé leur performance de 1990 à 2018. Il y constate que 56% des titres américains et 61% de titres mondiaux font moins bien qu’un bon du Trésor d’un mois. Les 44.7 billions US$ de création de richesse des bourses mondiales tiennent à une élite de seulement 1,3% des entreprises cotées.

« Le marché boursier global est capable de générer des rendements à long terme élevés, alors que la majorité des actions individuelles sous-performent les bons du Trésor, en raison d’une forte asymétrie positive, commente Gary Carmell, auteur du site The Philosophical Investor (Bessembinder: A Fascinating But Skewed Study (garycarmell.com). Les quelques actions qui surperforment le marché le font d’une manière telle qu’elles font plus que compenser le grand nombre de perdants. Les rendements positifs importants sont plus fréquents que les rendements négatifs importants. »

John Rekenthaler, vice-président, recherche, chez Morningstar, a revu les chiffres de l’universitaire en se concentrant uniquement sur la période de dix ans allant de janvier 2011 à décembre 2020, période caractérisée par un retentissant marché haussier. Pour son analyse, il a retenu 5 000 titres américains divisés en deux groupes, soit les 1 000 plus gros titres et les 4 000 suivants. Il a comparé leur performance au Morningstar U.S. Stock Index et au Morningstar U.S. Government & Corporate Bond Index.

« Bien que les actions aient battu les obligations au cours de la décennie, avec une marge cumulative énorme de 267 % contre 49 %, seule la moitié des 1 000 plus grandes actions ont battu l’indice obligataire, écrit John Rekenthaler. Par rapport à l’indice boursier, leur pourcentage de gain s’est effondré à seulement 20 %. En d’autres termes, quatre grandes actions américaines sur cinq ont été à la traîne de leur propre indice de performance. »

John Rekenthaler constate aussi que, dans un portefeuille équipondéré des 5 000 plus grandes actions américaines, 14,87% de la valeur totale ne provient que des 500 principaux titres. Cela laisse entendre que, durant la période étudiée, le rendement total a été distribué à travers un plus grand nombre de titres.

L’étude de Hendrik Bessembinder a été utilisée à plusieurs sauces depuis sa parution, surtout par ceux qui jugent que l’investissement est une affaire de repérer les titres champions et de les conserver indéfiniment, sans jamais prendre de profit.

« La vérité désagréable, commente un chroniqueur du Financial Times(Meet the academic who has fired up moonshot investing | Financial Times (ft.com)) est que le secteur de l’investissement a démontré qu’il n’était pas doué pour repérer les stars de la bourse. Pour chaque gestionnaire de fonds qui trouve une telle star, et sur laquelle il construit sa carrière, il y en a des centaines qui restent inconnus. Pour la plupart des gens, acheter le marché dans son ensemble reste la solution la plus logique. »