Plus vieux mais pas nécessairement plus sages

Selon Michael Finke, professeur à l’Université Texas Tech, co-auteur de l’étude intitulée Old Age and the Decline in Financial Literacy (L’âge et le déclin des connaissances financières), la capacité de prendre des décisions financières communes tombe d’environ deux points de pourcentage chaque année après l’âge de 60 ans.

Les résultats du test étaient basés sur les réponses à 16 questions qui mesuraient les connaissances de base en matière de crédit, de placements, d’assurances et d’argent. Un exemple : « Si vous voulez réduire le coût de votre police d’assurance, devriez-vous augmenter ou réduire les montants déductibles? »

Selon les scores d’ensemble du test, seulement 59 % des personnes dans la soixantaine ont répondu à toutes les questions correctement, et seulement 30 % parmi celles âgées de 80 ans et plus.

L’étude, publiée en août 2011, indique que c’est à la fin de la quarantaine que les gens en savent le plus en matière de finances et qu’à partir de là, leurs aptitudes diminuent. L’ironie, c’est que selon les résultats du sondage, la confiance d’une personne en ses capacités à prendre des décisions financières semble augmenter avec l’âge.

Aussi peu réjouissante que l’étude puisse paraître, la conscience de la baisse de l’acuité financière, « un aspect naturel et inévitable de l’âge », peut mener à ce que les personnes âgées prennent des mesures prudentes pour compenser ce déclin.

Comme dans d’autres études sur le vieillissement, par exemple celles reliées aux aptitudes à conduire, il semble qu’une fois que les gens ont reçu une preuve tangible qu’elles ne sont plus aptes à prendre des décisions comme elles le pouvaient, elles procèderont avec prudence. Cela peut signifier choisir un chemin différent pour rentrer chez soi, éviter les heures de pointe et ne pas conduire la nuit.

« Je pense que c’est aussi une bonne analogie pour vos propres finances, dit M. Finke. Si vous reconnaissez que le déclin va arriver, vous pouvez en réduire l’impact potentiel. Vous pouvez éviter la circulation, et vous pouvez également éviter les faux pas dans vos finances, en réduisant le nombre des décisions complexes que vous serez forcé à prendre au fur et à mesure que vous prendrez de l’âge. »

Les produits financiers qui tendent à mieux convenir aux personnes âgées incluent ceux qui sont simples, ne demandent pas de surveillance régulière et fournissent un flux de revenus. Un excellent exemple est la rente viagère, dit M. Finke, faisant remarquer que cette dernière fournit un flux de revenus garanti jusqu’à la fin de la vie. « D’une certaine façon, c’est une forme d’assurance contre la démence, parce qu’elle permet aux personnes âgées d’éviter trop d’ennuis au fur et à mesure qu’elles vieillissent. C’est pratiquement comme si on investissait pour elles. »

La longévité est un facteur très important quand on choisit des produits de retraite, dit Jason Round, chef du soutien à la planification financière chez RBC Planification financière à Toronto. « Vous planifiez pour une période bien plus longue. » Loin sont les jours où l’on se livrait à des règles empiriques, comme par exemple, si vous avez 70 ans, vous devriez investir environ 70 % de vos placements dans des obligations.

Selon M. Round, au Canada, la durée de la retraite d’un homme est d’un peu plus de 15 ans et celle d’une femme de près de 20 ans. « Donc, l’idée que tout-à-coup vous allez prendre votre retraite et qu’il vous faudra être beaucoup plus prudent avec vos placements ne va pas marcher. »

Un bon planificateur financier peut éduquer le client et l’aider à comprendre ce à quoi il doit penser. « C’est exactement là où le concept de connaissances financières entre en jeu, dit M. Round, pour aider quelqu’un à dépasser ce qu’il a lu dans les journaux ou entendu dire par ses amis. »

Une de ces considérations est la santé d’une personne et ses implications pour son niveau d’activité et sa capacité mentale au fur et à mesure qu’elle prend de l’âge. Certaines personnes âgées peuvent accepter qu’un membre de la famille ou un collègue en qui ils ont confiance se joigne à la conversation. « C’est alors au conseiller de prendre du recul par rapport aux règles pratiques, dit M. Round. Votre stratégie de placement a besoin d’être personnalisée. »

Michael Berton, planificateur financier principal chez Gestion de patrimoine Assante à Vancouver, déconseille de stéréotyper les personnes âgées. « Nous avons tendance à avoir certains préjugés envers les personnes âgées et présumons que toutes les personnes âgées perdent leur capacité à se rappeler les choses ou à prendre des décisions, dit M. Berton. Cela n’est pas nécessairement vrai. Vous avez besoin de vraiment connaître votre client lorsque vous avez affaire à une personne âgée, et vous devez faire des évaluations régulières de leurs capacités à comprendre ce que vous dites. Parfois vous devez répéter les choses. »

Les personnes âgées tendent à être plus vulnérables aux escroqueries, et un conseiller digne de confiance peut les empêcher d’avoir des ennuis. « L’important est d’avoir accès à une deuxième opinion », dit M. Berton, qui se spécialise dans les services financiers pour les plus de 55 ans. « Si quelqu’un leur demande d’investir dans certaines combines, qui visent souvent les personnes âgées, auprès de qui vont-ils vérifier ce qu’on leur dit? »

La plus jeune génération ferait certainement des recherches dans Google sur l’organisation ou sur le promoteur de ventes pour essayer d’en savoir plus, mais les personnes âgées ne le feront probablement pas.

M. Berton trouve qu’il est difficile de donner aux personnes âgées des conseils de répartition d’actifs. Maintenant qu’ils en sont au stade des retraits de leurs portefeuilles, ils sont surtout préoccupés par la volatilité et le désir de protéger leur portefeuille contre le risque pour faire en sorte que leur pécule dure le plus longtemps possible.

« C’est une question épineuse » de comprendre ce que les gens veulent dire lorsqu’ils se disent prudents ou prêts à prendre peu de risques, dit M. Berton. Il utilise un outil interactif pour évaluer le profil de placement qui convient le mieux aux clients. Le profil est aussi considéré comme un excellent sujet de conversation pour illustrer les divers aspects du risque lié au placement.

La notion d’être « prudent » prend une toute nouvelle signification sur les marchés boursiers actuels. Un grand nombre de Canadiens prennent leur retraite au moment où les rendements des titres à revenu fixe n’ont jamais été aussi bas. « Les gens sont inquiets pour les actions, dit M. Berton. Pourtant, il s’agit probablement, de bien des façons, d’une catégorie d’actifs actuellement à plus faible risque que le bon vieux portefeuille d’obligations. »

Photo Bloomberg