
Simplifier l’expérience bancaire et mieux accompagner les membres : c’est autour de ces priorités que s’est articulée la transformation numérique des services aux particuliers chez Desjardins. Un chantier lancé il y a cinq ans et piloté par Nathalie Larue, première vice-présidente Services aux particuliers au Mouvement Desjardins, qui revient sur les avancées, les ajustements nécessaires et les leçons apprises.
« La première chose que nos membres nous disaient, c’est que c’était quand même un peu compliqué de faire affaire avec nous », observe Nathalie Larue. Ce constat, partagé à travers l’industrie bancaire, a servi de point de départ à une transformation numérique visant à rendre les services plus accessibles et intuitifs.
La volonté d’agir ne se limitait pas à la simplification. « Notre transformation devait aussi être un levier pour mieux servir nos membres au moment qui est important pour eux », ajoute-t-elle. L’expérience client, autant que l’efficacité opérationnelle, a guidé les décisions.
Une approche structurée autour de trois axes
Desjardins travaillait déjà depuis plusieurs années sur le numérique, mais un programme de transformation structuré a été mis en place. « Ce programme visait à améliorer l’expérience client, moderniser nos systèmes et accroître notre productivité », résume Nathalie Larue, qui a d’abord dirigé ce chantier avant de prendre la tête des services aux particuliers.
Une vingtaine de produits, désignés comme « offre cœur » — incluant notamment l’ouverture de compte, la gestion des cartes de crédit ou le renouvellement d’hypothèque — ont été identifiés comme prioritaires. « Ces produits sont ceux que nos membres utilisent le plus régulièrement », précise-t-elle.
Mais rapidement, l’organisation s’est rendu compte que le développement d’outils numériques ne suffisait pas : leur adoption demeurait en deçà des attentes. « C’est une chose de rendre des fonctionnalités disponibles, c’en est une autre de s’assurer qu’elles soient connues et utilisées par les clients. »
Des employés ambassadeurs
Ce constat a marqué un tournant stratégique majeur. « Nous avons compris qu’il fallait impliquer plus activement nos employés en contact avec les particuliers », confie la dirigeante. Desjardins a alors mis en place un programme de « primeurs numériques » qui permettait à ses employés de tester les nouveautés avant leur lancement. « Plus de 20 000 d’entre eux y ont participé et nous ont donné leurs commentaires, ce qui a enrichi nos façons de déployer les outils », précise Nathalie Larue.
Ce mécanisme a aussi permis de faire des employés de véritables relais auprès des membres. « On a besoin de nos 55 000 employés comme ambassadeurs. Je pense que là-dessus, on a particulièrement bien réussi », se réjouit-elle.
Aujourd’hui, les résultats sont tangibles. « Nos taux d’acquisition en ligne sont presque dix points au-dessus de la moyenne de l’industrie canadienne, rapporte Nathalie Larue. Par ailleurs, depuis deux ans, on se classe parmi les trois meilleures institutions financières canadiennes en matière d’expérience client, selon des études internes menées avec des firmes spécialisées. »
Ses efforts ont aussi été salués sur la scène internationale. Deux distinctions ont été remportées au Digital CX Awards 2025, un concours international, notamment pour la meilleure implantation technologique en expérience client numérique au Canada, ainsi qu’une mention spéciale du jury pour l’utilisation exceptionnelle des canaux numériques pour améliorer l’expérience client
« Pour nous, c’est une grande victoire parce que la transformation, on l’a fait pour améliorer notre productivité interne, mais aussi et surtout pour les besoins de nos membres », dit-elle.
L’innovation la plus récente, l’assistante virtuelle Alvie, basée sur l’intelligence artificielle (IA) et intégrée à l’application mobile, permet d’offrir des conseils personnalisés aux membres. « En ce moment, à travers Alvie, nous avons des modèles qui nous permettent de donner des conseils à nos membres », explique Nathalie Larue. Elle cite, par exemple, des alertes envoyées lorsqu’un paiement est à venir, mais que le solde semble insuffisant, ou encore des suggestions d’options de placement quand un apport de fonds est détecté.
Alvie a été désignée comme l’innovation bancaire du mois d’avril 2025 par Qorus, qui regroupe 1200 institutions financières dans 120 pays. L’assistante financière de Desjardins est également finaliste aux prix Octas 2025 dans la catégorie Valorisation des données et de l’intelligence artificielle – Grande entreprise, dont les résultats seront dévoilés le 22 mai.
Un usage croissant de l’IA
Chaque année, environ 2 000 personnes ont été mobilisées pour faire avancer le chantier, tant du côté des affaires que des technologies. Les prochaines étapes de la transformation numérique de Desjardins s’orientent vers « l’utilisation de la donnée, l’analytique, la capacité contextuelle de donner des conseils », selon la dirigeante. L’IA prendra une place importante dans cette évolution avec la mise en place d’un centre d’intelligence artificielle qui permet la mise en commun des talents autant technologiques que les experts de la gestion de risque et de la protection des renseignements personnels, entre autres.
« Pour l’instant, on se concentre sur des applications de l’IA au bénéfice de nos employés, mais on veut continuer le développement de conseils aux membres », précise Nathalie Larue. À ce chapitre, les premiers résultats de l’assistante Alvie sont encourageants : les utilisateurs cliquent sur plus de 50 % des conseils qui sont donnés afin d’en savoir plus, indique-t-elle.
Trois leçons tirées de l’expérience
À la lumière de cette transformation, Nathalie Larue retient trois grandes leçons pour réussir une telle transformation :
- « Ne jamais isoler le chantier numérique : il doit mobiliser les meilleurs talents de toute l’organisation. »
- « Définir clairement les objectifs et les indicateurs de succès, en les partageant jusqu’au conseil d’administration. »
- « Intégrer les objectifs numériques aux mécanismes de gouvernance pour assurer leur pérennité. »