Un homme d'affaire jouant avec une courbe de taux en hausse comme avec une marionnette.
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Les conseillers qui cherchent à maintenir les rendements du côté des revenus fixes des portefeuilles de leurs clients envisagent parfois des solutions alternatives liquides, mais il est crucial de comprendre les stratégies de ces nouveaux produits.

Les alternatives liquides – qui utilisent des placements de fonds spéculatifs incluant des stratégies à long et court terme, le marché neutre et les produits dérivés – sont devenues disponibles pour les investisseurs particuliers au Canada en janvier 2019.

Et pour les conseillers soucieux de générer des rendements suffisants sur les titres à revenu fixe, les alternatives liquides (qui sont proposées sous forme de fonds communs de placement et de fonds négociés en Bourse (FNB)) sont une solution potentielle, selon des intervenants de la conférence annuelle Inside ETFs Canada qui se tenait les 9 et 10 novembre dernier.

Avec des taux d’intérêt proches de zéro, les obligations traditionnelles ne fournissent que peu de lest pendant les turbulences du marché tout en n’offrant pratiquement aucun rendement.

« Nous devons faire face à ce dilemme », soulignait Francis Sabourin, gestionnaire de portefeuille et directeur de la gestion de patrimoine chez Richardson GMP, de Montréal.

Les chances qu’un portefeuille traditionnel 60-40 atteigne les objectifs de rendement des clients sont « extrêmement faibles », a renchéri Marc-André Gaudreau, vice-président et gestionnaire de portefeuille principal chez Gestion d’actifs 1832, de Montréal.

Les conseillers peuvent augmenter la pondération des actions dans les portefeuilles, a évoqué Francis Sabourin, ou « jouer dans le domaine des rendements élevés ou dans celui des entreprises et sortir de la zone de confort de certains clients en termes de revenus fixes ».

Francis Sabourin et Marc-André Gaudreau sont tous deux favorables à l’utilisation de stratégies alternatives du côté des titres à revenu fixe d’un portefeuille – en particulier les produits de crédit à long et court terme qui offrent des rendements non corrélés, sans sacrifier le rendement global d’un portefeuille.

Après presque deux ans de présence sur le marché, il existe maintenant 106 fonds alternatifs liquides au Canada, provenant de 38 émetteurs, avec 10,6 milliards de dollars d’actifs sous gestion, rapportait la modératrice Shana Sissel, directrice des investissements du Spotlight Asset Group, basé à Chicago.

Les stratégies employées par ces fonds peuvent toutefois être radicalement différentes, tout comme leurs performances. Certains fonds neutres se sont envolés par rapport au marché pendant la crise, tandis que certains fonds immobiliers ont connu des résultats bien pires que ceux du marché.

Fin octobre, l’indice des fonds alternatifs de la Banque Scotia était demeuré stable dans une perspective annuelle, tandis que le S&P/TSX 60 était en baisse de 8,69 %. Le S&P 500 avait enregistré un rendement de 1,21% sur la même période.

Selon Francis Sabourin, il est particulièrement important que les conseillers comprennent les produits alternatifs liquides qu’ils recommandent et la manière dont les fonds risquent de se comporter dans différents environnements de marché. Cela peut être un défi dans un contexte comprenant « beaucoup de nouveaux venus », donc sans antécédents, mais estime que cela fait partie du rôle des conseillers de comprendre le processus d’investissement et de l’expliquer aux clients.

« En mars, certaines personnes ont été très contrariées lorsqu’elles ont vu les rendements de leur stratégie alternative ou alternative liquide, a rapporté Francis Sabourin. En fin de compte, ces dernières sont plus difficiles à comprendre pour les clients, et pour les conseillers, elles sont plus difficiles à suivre. »

Les soubresauts du marché survenus en début d’année a pu aider les conseillers à mieux comprendre comment les produits se comportaient en période d’extrême volatilité, souligne Marc-André Gaudreau.

Les conseillers doivent également relever le défi d’intégrer les produits dans les portefeuilles tout en se conformant aux politiques d’investissement des clients. Ainsi, bien que certains produits neutres se comportent comme des titres à revenu fixe par rapport au marché, avec une faible volatilité et des rendements attendus de 3 à 5 %, les services de conformité les classent parfois comme des produits d’actions, note Francis Sabourin.

« C’est l’un des plus grands défis auxquels nous sommes confrontés, commente celui qui utilise des stratégies alternatives en remplacement de revenus fixes, mais pas du côté des actions. Nous aimerions utiliser davantage de ces alternatives liquides – neutres pour le marché ou à long terme – mais elles font partie de la catégorie des actions. »

Un rapport publié au début de l’année par la société de recherche Cerulli Associates, basée à Boston, a souligné les défis auxquels sont confrontés les fabricants d’alternatives liquides sur le marché américain pour expliquer les produits complexes aux conseillers. Le rapport indique que les fabricants devraient développer des produits moins chers et plus faciles à expliquer, en s’inspirant du « manuel de gestion passive ».