«Dans le cadre de ce plan, les directeurs doivent notamment encourager les conseillers à développer un partenariat avec un collègue pour assurer les remplacements durant les congés, les vacances et les imprévus», explique Sylvain Brisebois, premier vice-président et directeur général chez BMO Nesbitt Burns.

Ce jumelage ne doit pas être pris à la légère. Pour assurer une transition harmonieuse, il faut veiller à ce que les habiletés professionnelles des collègues jumelés soient semblables.

«Il faut donc choisir quelqu’un qui a les mêmes permis, la même stratégie de placement et le même type de clientèle», conseille Sylvain Brisebois.

Sinon, le remplaçant risque de ne pas comprendre le portefeuille ou les besoins des personnes servies. Et la probabilité de perdre des clients sera plus élevée.

Faire partie d’une équipe facilitera la transition, puisqu’un coéquipier prendra automatiquement la relève.

«De plus, les membres d’une équipe ont normalement une philosophie de placement semblable et les mêmes méthodes, souligne Jean-Pierre Gélinas, vice-président et gestionnaire de portefeuille à la Financière Banque Nationale. Et dans une certaine mesure, ils connaissent déjà les clients du conseiller qui s’absente.»

Prévenir les clients

Lors d’un remplacement, il est déconseillé de rencontrer les clients de façon précipitée. Certains d’entre eux pourraient s’interroger sur la légitimité du remplaçant.

«Il est préférable de préparer le terrain, croit Sylvain Brisebois. En fait, dès que les conseillers abordent la question des services et de l’équipe avec un client, ils devraient leur dire qu’untel les remplacera lors des congés, des vacances et des imprévus.»

Puis, si le conseiller doit s’absenter pour des raisons de santé, il ne restera plus qu’à l’annoncer aux clients.

Daniel Bissonnette, PDG de Planifax, pense qu’il serait alors préférable de leur envoyer une lettre pour expliquer que le conseiller sera absent de telle à telle date, la raison de son absence et la personne avec laquelle ils pourront communiquer.

De leur côté, Jean-Pierre Gélinas et Jason Gauthier, planificateur financier à la Banque de Montréal, qui ont remplacé un collègue pour une période indéterminée, ont préféré informer les clients au fur et à mesure qu’ils devaient les contacter. Malgré tout, la transition s’est bien déroulée.

Cependant, ces deux professionnels ne prévoyaient pas que leur collègue s’absenterait aussi longtemps. De plus, les clients les considéraient déjà comme des remplaçants légitimes. Ils ont néanmoins veillé à les rassurer.

«Comme les clients sont toujours réticents aux changements, je leur expliquais que la situation était temporaire. Ils se montraient compréhensifs», souligne Jason Gauthier.

Évidemment, servir plus de clients accroît la charge de travail. Non seulement il faut prendre les appels d’un plus grand nombre de personnes, mais il faut aussi faire les suivis.

Comment parvenir à s’occuper de la clientèle d’un autre conseiller sans la pénaliser, et sans pénaliser ses propres clients ?

Le remplaçant doit immédiatement redoubler d’efforts. Jason Gauthier pense qu’il doit augmenter ses heures de travail. En commençant une heure plus tôt et en finissant une heure plus tard, un conseiller peut en effet parler à plus de clients, tout en maintenant un rythme de vie équilibré.

Tout est aussi fonction des méthodes de travail du conseiller. «Comme je gère de façon discrétionnaire, je fixe moi-même les rencontres avec les clients. C’est un procédé semblable à celui qu’emploient les dentistes, qui appellent le client pour son rendez-vous annuel. Alors, je peux travailler à mon rythme», explique Jean-Pierre Gélinas.

Chose certaine, le stress ne doit pas être tel que le conseiller remplaçant doive prendre lui-même un congé de maladie. Il est donc important qu’il n’hésite pas à demander l’aide d’autres conseillers de la succursale ou l’assistance d’adjoints qui peuvent le libérer des tâches administratives.

Être bien documenté

Pour donner un service adéquat aux clients, le remplaçant doit pouvoir accéder aux dossiers, ainsi qu’à l’agenda ou au logiciel de suivi du collègue qu’il remplace. Il doit ensuite prendre le temps de lire ces documents pour établir les priorités.

Si par exemple un placement vient à échéance la semaine suivante, il doit communiquer rapidement avec le client.

Par conséquent, le travail du remplaçant sera facilité si ses méthodes de travail sont similaires à celles de son collègue. Il saura alors d’emblée où trouver telle ou telle information.

Encore faut-il que les dossiers soient bien documentés. «Il est important d’y inscrire beaucoup d’informations personnelles, souligne Jason Gauthier. Il faut savoir si le client passe l’hiver en Floride, si sa fille vend son chalet, etc.»

«De cette façon, en ouvrant le dossier du client, le remplaçant verra le profil d’investisseur, les placements et tout ce qui est intervenu ou qui a été discuté au fil du temps, note Jean-Pierre Gélinas. Il sera alors très facile de faire le suivi.»

Normalement, les employés qui absorbent une charge de travail supplémentaire reçoivent une compensation en conséquence. Toutefois, la façon de rémunérer le remplaçant varie d’un établissement à l’autre.

Ainsi, Jason Gauthier, dont la rémunération est composée d’un salaire de base et d’une prime, a touché une bonification plus importante durant l’intérim, en plus de s’approprier les nouveaux clients.

En comparaison, chez Planifax, les revenus du conseiller, qui travaille à commission, sont partagés avec le remplaçant. Il en va de même pour les nouveaux clients. «Ce partage est géré par le cabinet», précise Daniel Bissonnette.

Chez les courtiers de plein exercice, le conseiller souscrit normalement une assurance qui lui versera une compensation lors d’un arrêt pour maladie ou autre.

«Le remplaçant touche donc l’intégralité de la rémunération, remarque Jean-Pierre Gélinas. Et les nouveaux clients pourraient appartenir à l’un ou à l’autre, selon l’entente convenue entre les conseillers.»

Si l’absence se prolonge

Notons que les modifications temporaires apportées aux tâches du remplaçant ne s’imposent que si elles sont exceptionnelles et de courte durée.

Autrement dit, si l’absence se prolonge au-delà d’un an ou deux, le directeur de la succursale ou du cabinet pourrait inciter le conseiller qui ne peut plus assumer ses fonctions à céder sa clientèle à ses collègues.

«Le directeur de succursale doit évaluer alors s’il ne serait pas préférable pour tous que la clientèle soit cédée à un autre conseiller, explique Sylvain Brisebois. Il doit en quelque sorte démontrer que la prolongation du congé nuit à l’organisation.»

«Le directeur doit aussi tenir compte du fait qu’à la vitesse à laquelle les choses évoluent dans notre domaine, il est difficile pour un conseiller de s’adapter aux changements après une absence trop longue», note Daniel Bissonnette.

Par ailleurs, lorsqu’il devient clair que le conseiller ne reviendra pas (s’il est atteint d’une maladie incurable, par exemple), le directeur doit superviser la transition.

«Il doit réagir rapidement et amorcer la vente de la clientèle, c’est-à-dire son transfert vers d’autres conseillers», précise Sylvain Brisebois.