«Le fait que plusieurs de ces sociétés se retrouvent dans le secteur des matières premières n’a pas aidé. Or, au cours des dernières semaines, la chute des titres énergétiques a suivi de près la baisse du cours du pétrole et du gaz naturel», ajoute-t-il.

Rappelons que le secteur des produits matériels et celui de l’énergie comptent respectivement pour environ 28 % et 17 % de l’indice des titres à petite capitalisation S&P/TSX. Ces deux secteurs ont chuté respectivement de 18 % et 26 % entre leurs sommets de l’été et le 15 octobre dernier.

Titres chers

«L’évaluation des titres de petite capitalisation de qualité a tellement grimpé qu’ils sont devenus des titres de capitalisation moyenne. Certains titres sont très populaires auprès d’investisseurs qui n’achètent pas de petites capitalisations habituellement, mais qui veulent en ajouter à leur portefeuille. Les données fondamentales de ces titres sont en général très bonnes, mais leur forte progression en Bourse les a rendus chers», ajoute Ralph Lindenblatt, qui veut que son fonds reste axé sur les petites capitalisations.

La capitalisation moyenne des titres en portefeuille avoisine 800 M$, selon la base de données PALTrak de Morningstar Canada.

En tenant compte de la légère baisse des titres autres que ceux qui sont liés aux ressources, les attentes de Ralph Lindenblatt quant au rendement futur ne se sont que légèrement améliorées. En effet, le nombre d’occasions de placement intéressantes demeure limité.

Or, puisque les données fondamentales des entreprises ne se sont pas détériorées de façon significative au cours de la récente baisse boursière, les titres offrent désormais plus de valeur qu’avant la correction.

De 5 à 10 % de rendement

Ralph Lindenblatt s’attend à ce que les rendements futurs soient conformes aux moyennes annualisées à long terme et se chiffrent entre 5 % et 10 %.

Malgré son recul, le secteur de l’énergie demeure le plus important du portefeuille, avec une pondération d’environ 25 %, et Ralph Lindenblatt a ajouté des titres de ce secteur à diverses positions existantes à la suite de leur récente faiblesse.

«Dans ce segment, nous cherchons d’abord une équipe de direction qui a prouvé qu’elle peut créer de la valeur à long terme pour les actionnaires», précise-t-il. Historiquement, la pondération en titres énergétiques dans le fonds ne s’est pas trop éloignée de celle de l’indice.

Ce n’est pas le cas de la pondération en produits matériels, qui oscille habituellement entre 7 % et 10 % par rapport à 28 % dans l’indice des petites capitalisations S&P/TSX.

«C’est que les titres de ce secteur ne correspondent pas à notre style axé sur la recherche de sociétés gérées par une équipe axée sur la création de valeur, dégageant une bonne rentabilité sur un cycle économique complet, tout en générant des flux de trésorerie disponibles (free cash flow) importants et en affichant un bilan solide,», explique-t-il.

Risques élevés

Il est de plus en plus difficile de trouver des titres offrant de la valeur dans le segment des petites capitalisations en Amérique du Nord, selon Jason Whiting, gestionnaire principal du Fonds de petites sociétés canadiennes Trimark.

«Notre encaisse a graduellement augmenté tout au long de l’année. Ce n’est pas que nous tentions de prédire où va le marché. C’est que les titres figurant sur notre liste de titres potentiels ne sont pas à des cours que nous jugeons attrayants. Certains sont 10 % ou 20 % trop chers, d’autres encore bien plus», constate-t-il.

L’encaisse du fonds a atteint 30 % du portefeuille le 30 septembre dernier, soit son plus haut niveau en cinq ans et un des plus hauts niveaux depuis le lancement du fonds.

Elle était de 19,4 % un mois plus tôt, son niveau depuis le début de 2014, ce qui indique que le gestionnaire était loin d’être en mode achat en septembre. Elle se situait encore à 28 % le 31 octobre.

Jason Whiting pense que les investisseurs s’exposent à plus de risques qu’ils ne le croient. Certains signes en font foi. Les petits investisseurs ont accumulé des dettes sur marge records à un moment où les marchés ont atteint des sommets.

Au même moment, on assiste à une avalanche de nouvelles émissions de sociétés qui révisent leurs bénéfices à la baisse, un phénomène qui n’est pas sans rappeler les événements survenus lors des pics du marché en 2007 et 2000. Cela dit, il est le premier à admettre que des titres déjà chers peuvent le devenir encore davantage.

Inspiré de la ruée vers l’or

La pondération de 19,8 % allouée au secteur de l’énergie est la plus importante. Jason Whiting croit que le prix du pétrole demeurera au-dessus de 80 $, mais son portefeuille est composé de titres de services de cette industrie, à l’exception d’un producteur de gaz naturel.

«Pour utiliser l’analogie de la ruée vers l’or, je préfère les vendeurs de pioches et de pelles aux chercheurs d’or», lance-t-il.

La pondération allouée au secteur des technologies de l’information est de 15,3 %. Le titre de Rovi Corp. compte pour 5,3 % du portefeuille : cette société a mis au point la technologie de la grille qui apparaît à l’écran pour aider à sélectionner une émission.

«Elle a une part de marché de 100 % et prélève un péage d’environ 0,25 $ US par mois par abonné de câblodistribution numérique en Amérique du Nord et en Europe. Elle est à la fine pointe de l’innovation pour les services sur demande. Le marché s’inquiète du renouvellement de la licence pour deux clients importants. Je ne vois pas cette technologie devenir obsolète et je suis plus optimiste que le marché sur les perspectives [de Ravi Corp.] à long terme», admet Jason Whiting.

Le Fonds de petites sociétés canadiennes Trimark a été fermé aux nouveaux investisseurs le 8 octobre dernier.

Profiter de la vigueur américaine

En raison de son mandat centré sur le Québec, le Fonds croissance Québec Banque Nationale (auparavant Fonds croissance Québec Altamira) ne détient aucun titre énergétique et sa pondération dans le secteur des matériaux n’était que de 15,5 % au 31 octobre. Son recul n’a été que de 7,8 % entre son sommet du 3 septembre (48,34 $) et son cours du 15 octobre (44,57 $) dernier.

«Nos titres sont surtout dans le secteur industriel et dans celui de la consommation discrétionnaire, qui comptent respectivement pour 31,4 % et 25,2 % du portefeuille. Nos entreprises en portefeuille sont bien positionnées pour tirer parti du regain de vigueur de l’économie américaine», explique Marc Lecavalier, gestionnaire principal du fonds.

Ce dernier fait valoir qu’un dollar canadien plus faible favorise les exportations.

«Plusieurs entreprises ont profité des dernières années où le dollar canadien était à parité avec le dollar américain pour réduire leur structure des coûts afin de demeurer concurrentielles. Elles le sont d’autant plus avec un dollar canadien qui ne vaut plus que 90 cents américains», ajoute Marc Lecavalier.

Il fait allusion notamment aux entreprises Groupe Canam, Stella-Jones, et à Quincaillerie Richelieu, qui ont toutes aujourd’hui des activités américaines plus importantes qu’il y a cinq ans et sont, par conséquent, mieux positionnées qu’auparavant pour poursuivre leur croissance aux États-Unis.

Croissance en vue

Un critère récurrent dans le choix des entreprises est leur croissance, non seulement interne, mais aussi par acquisitions. La stratégie de croissance doit être bien définie et les entreprises doivent avoir un bilan sain pour la mettre à exécution afin de consolider leur marché.

Dans une période difficile, un bon bilan permet d’acheter des concurrents en difficulté au moment opportun.

«La plupart des titres pour lesquels je suis très enthousiaste sont des groupeurs (market consolidators), comme Groupe d’alimentation MTY, Stella-Jones, WSP Global (anciennement Genivar), TransForce, Alimentation Couche-Tard, Héroux-Devtek, qui a justement fait une acquisition en Europe dans les derniers mois», remarque Marc Lecavalier.

Ces entreprises sont dans les 10 plus importantes positions du portefeuille du Fonds croissance Québec Banque Nationale.

«Elles ont toutes de bonnes perspectives de croissance interne, mais elles sont capables de faire de bonnes acquisitions à des prix raisonnables. Ce sont des acquisitions stratégiques qui permettent d’ouvrir de nouveaux marchés ou d’améliorer la structure de coûts», précise Marc Lecavalier.

Il cite l’exemple du Groupe de jeux Amaya qui a fait l’acquisition de PokerStars, devenant du coup le chef de file du poker en ligne à l’échelle mondiale, ce qui lui procure un avantage concurrentiel indéniable.

PokerStars n’était pas présent aux États-Unis, mais Amaya l’est. Amaya pourrait éventuellement implanter la plate-forme en sol américain à mesure que le jeu est légalisé par les différents États.

«Avec une capitalisation boursière de plus de 4 G$, Amaya est une société que tous les gestionnaires de grande capitalisation se doivent désormais d’examiner, car à 16 fois les bénéfices, ce n’est pas cher pour son potentiel de croissance», juge-t-il.

Deux tiers des entreprises du Fonds croissance Québec Banque Nationale ont une capitalisation boursière inférieure à 3 G$.