«Certaines lois désavantagent encore les couples homosexuels qui ne sont pas mariés en ce qui concerne certains enjeux liés à la planification financière», affirmait Jean Richard, vice-président et expert-conseil principal, Gestion de patrimoine chez BMO Nesbitt Burns, à l’occasion de la publication du rapport.

Iniquité générationnelle

Ce n’est que depuis 2000 que les avantages de la Sécurité de la vieillesse et du Régime de pensions du Canada s’appliquent aux conjoints de fait de même sexe.

Parmi les changements que cela implique, notons l’admissibilité aux prestations du survivant dans le cas des conjoints de fait de personnes décédées, ainsi que le partage d’une partie des prestations entre conjoints.

Le partage de ces prestations se fait en fonction de la durée de la période où ils ont vécu ensemble.

«Pour ce faire, il faut pouvoir évaluer la période de vie maritale des couples. Pour les couples LGBT, comme cela n’est légalement reconnu que depuis quelques années, ils ne bénéficient que d’une plus courte période», précise Daniel Laverdière, directeur principal, Planification financière et Service-conseil, de Banque Nationale Gestion privée 1859.

En quelque sorte, «il s’agit d’une iniquité générationnelle», car elle s’estompera au fil du temps, précise Boyan Ivanov, planificateur financier chez BMO Groupe financier.

Selon lui, les obstacles se situent moins sur le plan légal que sur le plan comportemental. Il cite l’exemple des contestations qui peuvent survenir lors de successions.

«Malheureusement, on observe plus souvent des contestations dans le cas des couples gais, parce qu’il y a encore des gens qui n’approuvent pas cette réalité», précise Boyan Ivanov.

Ainsi, des parents qui n’ont jamais accepté l’homosexualité de leur enfant – ou qui ne sont pas au courant – s’opposent aux dernières volontés de ce dernier lorsque la part du lion de l’héritage est léguée au conjoint survivant, explique-t-il.

Solution : «Il faut laisser moins de place à l’interprétation lorsqu’on fait son testament», conseille Boyan Ivanov.

Il recommande d’intégrer au testament des annexes qui font état «des préoccupations et des problématiques qui peuvent survenir, dont une annexe qui dit que telle personne risque de contester le testament et d’expliquer pourquoi. Cela facilitera grandement les choses pour s’assurer que son conjoint recevra ce qui était prévu», indique-t-il.

Plus riches que la moyenne

Les enjeux financiers peuvent être considérables. Les membres de la communauté LGBT disposeraient d’un revenu plus élevé que la moyenne.

Faute de statistiques précises sur le sujet compilées au Canada, l’étude de BMO s’appuie sur des données américaines. Aux États-Unis, les ménages LGBT ont des revenus largement supérieurs à ceux de la famille américaine moyenne, soit 61 500 $ US, par rapport à 50 000 $ US.

Cet écart découlerait du fait que les couples LGBT vivent très souvent dans les grandes villes, où la population a des revenus supérieurs à la moyenne, et qu’ils sont beaucoup moins susceptibles d’avoir des enfants que les couples de sexe opposé (9,4 % par rapport à 47,2 %).

La même approche

Les couples de même sexe ont certaines particularités, mais aucune ne nécessite une approche particulière de la part du conseiller, souligne Maxime Gauthier, avocat et chef de la conformité chez Mérici Services Financiers.

«Que le couple soit hétérosexuel, homosexuel ou transgenre ne change rien. Il faut leur poser les mêmes questions», dit-il.

Il cite l’exemple des clients homosexuels masculins qui désirent avoir un enfant.

«J’aborde cela de la même façon que pour un couple hétérosexuel qui devrait envisager l’adoption ou le recours à une mère porteuse. Pour moi, il n’y a pas d’approche particulière. Gai ou pas gai, ça ne change strictement rien.»

Maxime Gauthier rappelle que le conseiller ou le planificateur doit être en mesure d’établir un lien de confiance avec ses clients afin de pouvoir recueillir les informations qui lui permettront d’établir les stratégies qui leur conviennent.

«C’est comme lorsque nous allons chez le médecin et qu’il nous pose un paquet de questions qui ne semblent pas, à première vue, avoir de rapport avec le mal que nous avons décrit. Il a besoin de connaître notre situation globale. C’est la même chose pour un professionnel de la finance», conclut-il.