«On n’a qu’à penser à l’augmentation de l’offre d’aluminium, de nickel, ou celle à venir du cuivre et du minerai de fer, qui vient plafonner le prix de ces matières.

«Toutefois, le meilleur exemple est celui de l’augmentation très rapide de l’offre de gaz naturel qui, combinée à un climat plus doux, a fait dégringoler son prix de 13,58 $ US par mille pieds cubes (kp3) en juillet 2008 à 1,93 $ US en avril 2012.

«Ce prix plancher a encouragé le remplacement du charbon par le gaz ; de plus, l’hiver dernier a été plus froid, de sorte que le prix du gaz a doublé depuis, mais l’offre demeure très forte. Il devrait évoluer entre 3 $ US et 4 $ US par kp3.

«Cependant, dès qu’il dépassera 4 $ US, la production augmentera, imposant ainsi un plafond à ce prix», du moins c’est l’opinion de Scott Vali, gestionnaire du Fonds de ressources canadiennes Signature de Placements CI.

Un prix du pétrole beaucoup plus bas pourrait toutefois changer ce scénario, admet-il.

Car les forages de gaz se concentrent sur les réserves gazières à forte teneur en liquides (liquids-rich gas), dont le prix des sous-produits, comme le propane et le butane, est lié à ceux du pétrole.

Un prix plus bas pour ces dérivés rendrait ces puits moins rentables.

Si plusieurs de ces puits sont fermés, le prix du gaz naturel devrait monter.

Quant au pétrole, il prévoit que les prix d’environ 73 $ US pratiqués sur le pétrole lourd canadien s’approcheront graduellement du prix du pétrole nord-américain au cours du deuxième semestre et en 2014, au fur et à mesure que les contraintes de capacité des pipelines se résorberont.

En attendant, le réseau ferroviaire est mis à contribution pour acheminer du pétrole canadien brut synthétique peu sulfureux (sweet synthetic crude oil) dans l’est du pays. Ce type de pétrole se vend autour de 100 $ US le baril et remplace le produit nigérien équivalent vendu à 111 $ US.

Les occasions sont donc, selon Scott Vali, généralement dans les titres énergétiques plutôt que dans les métaux et minerais. Ce point de vue se reflète dans sa pondération de près de 58 % en titres énergétiques et de 32 % en produits matériels.

Préférence pour le gaz

Cette pondération est assez semblable à celle du Fonds de ressources BMO Guardian, série Conseiller, cogéré par Mark Serdan et Robert Taylor.

Ce dernier est aussi le gestionnaire principal de la Catégorie mondiale énergie BMO Guardian, série Conseiller, qui a dégagé un rendement de 27 % pour l’année terminée le 31 mars, ce qui le place au premier rang parmi les fonds de ressources.

Parmi les titres énergétiques, Robert Taylor favorise aussi ceux qui sont davantage axés sur la production de gaz naturel. «Nous avons été dans un « bear market » pour le gaz naturel depuis cinq ans, pour deux raisons.

«D’abord, l’innovation technologique qui a permis le forage horizontal et la fracturation hydraulique pour libérer le gaz de formations rocheuses a considérablement augmenté l’efficacité de l’extraction et a permis d’atteindre des débits économiques.

«Ensuite, il y a eu aussi une grande indiscipline dans les dépenses d’exploration et de production. Mais nous nous trouvons maintenant à un tournant, alors que ces dépenses baissent et que l’offre se stabilise», explique-t-il.

Il est d’avis que le prix du gaz naturel continuera de monter et que nous sommes probablement au milieu du rebond amorcé après le creux d’avril 2012.

L’une des raisons qu’invoque Robert Taylor pour préférer les titres axés sur le gaz à ceux axés sur le pétrole canadien est que ce dernier devrait continuer de se vendre à un prix inférieur au prix mondial au cours des deux prochaines années, le temps qu’il faudra pour débloquer les goulots d’étranglement dans le système de pipelines. Une autre raison est que le gaz est un produit nord-américain qui n’est pas lié à la croissance en Chine ou ailleurs dans le monde, justement au moment où la croissance mondiale reste lente.

«Nous ne voyons pas de catalyseur positif pour le cours du pétrole hormis une accélération de la croissance mondiale ou un événement géopolitique, mais dans ce dernier cas, la hausse serait de courte durée», estime le gestionnaire.

Il note aussi que plusieurs usines qui avaient quitté l’Amérique du Nord y reviennent pour profiter de la faiblesse du prix du gaz naturel et qu’elles constituent une source future de demande.

Les titres les plus importants en portefeuille, comme Paramount Resources, Celtic Exploration, Tourmaline Oil et Peyto Exploration and Development, sont axés sur le gaz naturel, mais ils peuvent aussi faire l’objet de fusions/acquisitions par des multinationales de grande envergure. Leur performance est aussi liée au potentiel d’exportation du gaz à l’extérieur du continent dans le futur.

«Le prix du gaz naturel n’a pas à augmenter de façon importante pour justifier de détenir ces titres», défend Robert Taylor.

À l’inverse, il est nettement moins optimiste quant aux titres des minières dont les prix des matières, comme les métaux de base, le charbon, l’acier, dépendent de la croissance des immobilisations en Chine.

«La Chine est en transition : elle réalise qu’elle ne peut plus compter sur de forts marchés d’exportation au moment où les pays développés ont peine à croître. Pour y pallier, elle axe désormais son développement sur la consommation interne afin de réduire sa dépendance envers l’Occident. Ce développement est moins gourmand en ressources que ne l’a été le boom en immobilisations de la dernière décennie», avance Robert Taylor.

Être extrêmement sélectif

Pour Norman MacDonald, gestionnaire du Fonds de ressources Trimark d’Invesco, la période où tous les titres suivaient la montée rapide du prix des matières premières est terminée.

Rappelons que l’indice plafonné S&P/TSX diversifié des mines et métaux a bondi de 1 210 % entre la fin d’avril 2003 et son sommet du début de février 2011.

La sélection de titres est désormais cruciale, et sa sélection supérieure lui a permis de limiter les dégâts.

Ainsi, son portefeuille a progressé de 3,1 % pour l’année terminée le 31 mars 2013, alors que le fonds médian de ressources reculait de 10,1 %.

Pour y parvenir, il dit se concentrer sur la qualité des actifs et la direction de l’entreprise et n’acheter le titre que s’il se négocie à un escompte très élevé de la valeur nette de son actif.

Il cite en exemple Turquoise Hill Resources, qui détient, entre autres, un intérêt de 66 % dans le projet Oyu Tolgoi, situé dans le sud de la Mongolie.

Ce sera l’une des plus importantes mines de cuivre, d’or et d’argent du monde.

Le titre a chuté de 28 $ en février 2011 à 6,50 $ à la fin de mars cette année.

Or, la valeur nette de son actif serait supérieure à 15 $, selon ses calculs.

«Le marché choisit d’ignorer cette valeur actuellement, mais la mine est désormais opérationnelle. Nous ne fondons pas notre choix de titres sur une tendance haussière du prix des métaux. Dans le cas du cuivre, nous basons nos évaluations des titres sur un prix de 3 $ US la livre, ce qui est 13 % inférieur au cours récent de 3,45 $ US, qui semble être un plancher depuis plusieurs mois. Et malgré cela, nous trouvons encore des titres qui se négocient sous la valeur nette de leur actif», souligne Norman MacDonald.

La pondération du fonds en titres de métaux de base oscille autour de 13 %, et celle en titres aurifères est de 21 %.

«Ces derniers n’ont pas profité de la vertigineuse ascension du prix de l’or de 800 $ US à 1 800 $ US en raison de la hausse de leurs coûts de production et des mauvaises décisions d’allocation du capital.

«On n’a qu’à penser à la destruction de valeur qu’a entraînée l’acquisition de Red Back Minning par Kinross Gold. Devant cela, les investisseurs ont fui vers les fonds négociés en Bourse détenant des lingots. Mais maintenant, tous ces faits ont été considérés, et ça ne peut guère aller plus mal pour ce groupe.

«Je vois un fort potentiel de hausse dans ces titres si le prix de l’or se stabilise à son niveau courant et que les sociétés reprennent le contrôle de leurs coûts.

«Ces aurifères se négocient à un très bas multiple des flux de trésorerie, et à un fort escompte de la valeur nette de leur actif», calcule Norman MacDonald.

Les titres énergétiques comptent pour environ 41 % du portefeuille, et ceux des services à cette industrie, pour 9 %.