Un homme d'affaire signant sur une tablette électronique.
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« Avec ce qu’on vit, j’espère que les gens vont comprendre combien il est important d’avoir un testament et un mandat d’inaptitude à jour parce qu’on ne connait pas le futur et là on le voit bien », déclare Marie-Josée Houde.

Notaire chez Banque Nationale Gestion Privée 1859, cette experte raconte avoir parlé récemment à des clients de 70 ans qui ne s’étaient toujours pas doté de tels mandats. Un état de fait qui l’inquiète encore plus en raison de la COVID-19.

Ce mandat, qui permet de désigner la ou les personnes qui prendront les décisions concernant le bien-être physique et financier du mandant si celui-ci devient inapte, semble particulièrement opportun en ces temps de pandémie.

Sur le site du curateur public, le gouvernement québécois encourage les citoyens à faire leur mandat rapidement en rappelant plusieurs points simples :

  1. L’inaptitude ne fait pas de discrimination en fonction de l’âge, du sexe ou de l’origine ethnique.
  2. L’inaptitude ne donne pas forcément d’avertissements ou de signes avant-coureurs.
  3. Quand il est question d’inaptitude et de mandat de protection, mieux vaut prévenir que guérir!
  4. Le mandat de protection vous permet de garder un contrôle sur votre vie.
  5. Le mandat de protection vous permet de protéger ceux que vous aimez et de leur éviter bien des soucis.

Sans mandat de protection, en cas d’inaptitude, il faut alors ouvrir un régime de protection qui sera soit une curatelle soit une tutelle, rappelle Marie-Josée Houde.

« Quand on tombe sur un régime de curatelle, c’est vite compliqué. Il faut faire un conseil de famille, il faut nommer un conseil de tutelle. Le curateur public doit surveiller. C’est très lourd ce régime sans mandat », prévient-elle.

En tant que professionnel des finances, il est important que vous parliez de ces mandats à vos clients pour vous assurer que leurs finances seraient entre de bonnes mains s’il leur arrivait quelque chose.

Rappelez à vos clients que cela est important pour eux, mais aussi pour leur famille. Ainsi qu’arriverait-il aux personnes qui sont à leur charge s’il leur arrivait quelque chose?

Un mandat de protection peut être personnalisé, rappelle Marie-Josée Houde. Il est ainsi possible d’indiquer au mandataire choisi d’utiliser certains biens pour subvenir aux besoins de la famille du mandant ou de désigner un tuteur pour leurs enfants mineurs. Le mandant peut également préciser s’il veut être maintenu à domicile le plus longtemps possible ou aller dans une résidence privée de haut de gamme, par exemple. Finalement, le mandat comprend également des consentements aux soins, comme le testament biologique. Le mandant peut ainsi donner des directives au mandataire concernant les soins de fin de vie.

Le choix du mandataire, un point crucial

Le point le plus important dans le mandat de protection est le choix du mandataire, affirme la notaire chez Banque Nationale Gestion Privée 1859. « Quand on parle de mandat d’inaptitude, le rôle du mandataire est double. Il est mandataire à la fois pour la personne et pour les biens. Idéalement, c’est mieux de nommer la personne la plus proche possible de nous », précise-t-elle, en pensant à la fois à une proximité physique et morale.

Cela ne serait effectivement pas pratique dans le quotidien si la personne habitait loin, mais il faut également que le mandataire soit une personne en qui le mandant à toute confiance.

Comme le rôle du mandataire est double (s’assurer du bien-être physique et financier), Marie-Josée Houde suggère de considérer la possibilité de désigner deux mandataires qui pourraient agir conjointement. Un s’occuperait ainsi des biens et l’autre de la personne.

La notaire rappelle également qu’il est possible d’obliger la mandataire à faire une reddition de compte une fois par année, pour s’assurer qu’il remplit bien son mandat.

C’est même souvent recommandé, précise-t-elle.

On peut également décider du type de pouvoirs que l’on veut donner au mandataire. Il est ainsi possible de lui donner les pouvoirs de pleine administration, donc les pouvoirs de vendre des actifs, d’hypothéquer, de prendre une marge de crédit. Ou alors, lui donner des pouvoirs plus restreints. Il faut le préciser, mais la plupart du temps, « c’est mieux de donner des pouvoirs assez larges au mandataire afin qu’il ait les coudées franches pour son mandat », déclare Marie-Josée Houde.

Il est bon aussi de nommer des mandataires remplaçants, car le mandataire désigné est libre de refuser d’accepter cette charge ou pourrait lui-même être devenu inapte entre temps.

Il n’est pas encore trop tard

« Tant qu’on est apte, on peut toujours signer un mandat de protection », rappelle Marie-Josée Houde. Il n’est donc pas trop tard pour envisager de signer un tel document.

Il est ainsi possible de contacter un notaire actuellement, ou un avocat, pour remplir un tel mandat. La Chambre des notaires s’est adaptée au confinement en permettant de remplir des papiers officiels par visioconférence et en permettant la signature électronique.

Évidemment, si aucun notaire n’est disponible, il est possible de remplir ce mandat sur le site du curateur et de le signer devant deux témoins. Toutefois, Marie-Josée Houde estime que c’est mieux de le faire devant un notaire. Car ainsi, le mandat est difficilement discutable, ne peut pas être perdu, car il est enregistré au registre des mandats de la Chambre des notaires et le mandant recevra les conseils et informations essentielles pour comprendre toutes les subtilités d’un tel papier.

« Le notaire a un devoir de conseil, il est là pour accompagner la personne », souligne l’experte.