Diplômé de l’Université Yale aux États-Unis, Bruce Kent a commencé sa carrière en 1983 comme conseiller en placement chez RBC Dominion.
Quelques années plus tard, il devient l’un des plus jeunes conseillers à être admis au Conseil du président de RBC DVM, qui récompense les 50 à 60 meilleurs conseillers de la firme en termes de vente.
«J’avais seulement 26 ou 27 ans, et il n’y avait personne de moins de 35 ans au Conseil lorsque j’y suis entré, explique-t-il. On peut dire que j’ai eu beaucoup de chance, puisque ça a vite bien fonctionné pour moi. C’est une chance de commencer dans un domaine où on a de la facilité, car on aura toujours envie d’en faire plus et de travailler davantage.»
Bien qu’il se soit déjà intéressé à l’investissement et à l’économie à l’université, Bruce Kent n’a pas étudié en finances, mais plutôt en histoire. Citant l’écrivain Mark Twain, «l’histoire ne se répète pas, mais elle rime», il rappelle toutefois que les deux domaines sont étroitement liés.
«Certains cycles se répètent sur les marchés. Lorsqu’on étudie les mouvements des marchés au cours de l’histoire, on acquiert une vision à plus long terme et on saisit mieux comment fonctionne l’économie», indique-t-il.
Toujours intéressé par l’histoire, Bruce Kent croit que sa formation lui a donné une perspective plus large.
«Les Américains ont ce qu’ils appellent une «broad liberal arts education», qui permet aux étudiants d’apprendre à écrire et à penser avant de se lancer sur le marché du travail ou de se diriger vers leur future carrière. Au Canada, l’éducation postsecondaire est plutôt préprofessionnelle et on demande à des jeunes de 17 ou 18 ans de choisir tout de suite le métier qu’ils exerceront.»
Indépendant d’esprit
Intrigué par le milieu des affaires depuis son plus jeune âge, «dès 5 ou 6 ans», se souvient-il, Bruce Kent a vu dans la finance et dans l’investissement un défi intéressant.
«J’ai l’esprit de compétition, et c’est un domaine qui est extrêmement compétitif. On peut voir presque immédiatement ce qui réussit dans nos choix de placement. Année après année, on peut voir si on a eu raison ; les résultats sont là chaque fois.»
Cet esprit de compétition, Bruce Kent l’a également développé durant sa jeunesse alors qu’il était nageur de haut niveau. Il a d’ailleurs fait partie de l’équipe nationale lors des Jeux du Commonwealth de 1978, à Edmonton, et avait pour spécialité le 100 mètres et le 200 mètres brasse.
«Grâce à la natation, j’ai acquis l’esprit de compétition et appris à me plier à la discipline de l’entraînement. Aujourd’hui, je ne nage plus et le plus près que je m’approche de l’eau, c’est lorsque je prends ma douche chaque matin. Dans tous les sports que je pratique encore, je suis plutôt médiocre et ça me plaît bien ainsi !» plaisante le conseiller en placement et représentant en dérivés.
Né à Ville de Mont-Royal, Bruce Kent a tenu à revenir à Montréal après ses études aux États-Unis. «J’aime la ville et son bilinguisme, et ce, même si je ne parle pas très bien français ! Revenir ici, c’est un choix que font rarement les anglophones qui quittent Montréal pour étudier à Toronto ou aux États-Unis. J’ai fait exactement l’inverse, ça prouve que je suis plutôt indépendant d’esprit.»
Selon lui, c’est d’ailleurs ce qui fait sa force en tant que gestionnaire de portefeuille : «On ne peut pas réussir dans ce métier si on n’a pas la capacité de penser par soi-même et de prendre ses propres décisions. Il ne faut pas se laisser influencer et suivre la foule».
Dès le milieu des années 1990, Bruce Kent a décidé de convertir sa pratique pour être rémunéré par honoraires, et non plus à commissions. Puis, vers 1998, il a également décidé de n’accepter dans sa clientèle que des comptes gérés sur une base discrétionnaire.
«Le Groupe Bruce Kent est formé de 12 personnes et sert 250 familles. Nous trouvons important de limiter le nombre de nos clients pour conserver un bon niveau de service.»
«J’aime utiliser l’exemple des grands hôtels qui donnent un service supérieur à leurs clients en limitant le nombre de chambres offertes, illustre-t-il. C’est la même chose chez nous, nous voulons être les meilleurs sur le plan de la performance et de la qualité du service. C’est impossible avec 1 000 familles.»
Aider les entrepreneurs
Bruce Kent croit également qu’une autre des clés de sa réussite réside dans le choix des bons clients. Il préfère travailler avec des clients qui ont déjà certaines connaissances en placement et qui comprennent sa philosophie d’investissement.
«Parmi mes clients, on ne retrouve pas de joueurs de hockey ou de gens qui ont gagné la loterie. La plupart d’entre eux sont des entrepreneurs ou des enfants de clients déjà existants. Ils partagent nos valeurs et nos principes, et ont confiance dans notre philosophie d’investissement. Ils sont donc capables d’accepter la volatilité à court terme, ce qui nous permet d’adopter une perspective d’investissement à plus long terme.»
Son style de gestion est-il valeur ou croissance ? Pour Bruce Kent, ce sont là les deux côtés d’une même pièce.
«Souvent, dans l’industrie, on va insister sur la différence entre le style valeur et le style croissance, mais comme le dirait Warren Buffett, tout investissement est un investissement de type valeur. L’idée, c’est toujours de placer de l’argent aujourd’hui afin d’en récolter plus demain, et la seule façon de faire ça intelligemment, c’est de bien évaluer ce que vaut une entreprise et les probabilités que ça augmente demain.»
Pour faire les bons choix, il croit qu’une équipe de gestion de portefeuille doit être très disciplinée et appliquer sa méthode d’investissement de façon systématique : «Elle doit s’en tenir strictement à une approche rationnelle. Quels que soient les marchés et leurs fluctuations, elle doit suivre sa méthode. Je crois que cette discipline rigoureuse explique en partie notre réussite».
Il est tout aussi sélectif lorsque vient le moment de choisir de nouveaux collaborateurs pour son équipe. Tout au long du processus de sélection, il s’intéresse aux valeurs et à la personnalité des candidats.
«Je n’ai pas besoin de détective privé pour découvrir ce qui motive la personne que j’ai en face de moi. Il faut quelqu’un qui n’a pas trop d’ego et qui est capable de faire preuve d’humilité. Je demande aussi aux gens qui sont leurs mentors puisque, lorsqu’on choisit les bons modèles, il est plus facile de prévoir ce qu’on sera dans dix ou vingt ans.»
Parmi ses propres modèles, Bruce Kent cite l’investisseur Warren Buffett, mais également l’homme politique américain Benjamin Franklin, le gestionnaire de portefeuille John Templeton, sa mère, une victime de l’Holocauste qui a fui la Hongrie après la Deuxième Guerre mondiale, et Peter Russell, son premier directeur de succursale chez RBC.
En plus de ses activités de gestion de portefeuille, Bruce Kent s’engage aussi dans sa collectivité. Il préside le Yale Club de Montréal où il encourage des élèves à présenter une demande d’inscription à son alma mater.
Il est aussi administrateur de la Fondation communautaire juive de Montréal et il a longtemps été fiduciaire de la Fondation de l’Hôpital Douglas, une institution spécialisée en santé mentale.
«Je crois que lorsqu’on atteint une certaine réussite, on a la responsabilité de s’engager et de redonner à sa communauté. C’est très important pour moi.»
Bruce Kent a reçu son prix lors du Gala de la personnalité financière de l’année 2013, qui s’est tenu le 4 février 2014 au Club Saint-James, à Montréal, devant un parterre de hauts dirigeants de l’industrie financière québécoise.