Ainsi, selon le S&P Indices Versus Active (SPIVA) américain, 87 % des gestionnaires de fonds spécialisés dans les grandes capitalisations ont affiché de moins bons résultats que l’indice S&P 500 au cours des cinq dernières années. SPIVA mesure la performance des fonds gérés de façon active par rapport à leurs indices de référence.
Pourtant, bon nombre de sociétés de gestion active prétendent que leurs résultats dépassent ceux des indices de référence.
De l’autre côté, l’édifice de la gestion passive a montré quelques fissures dernièrement. En effet, il est apparu que la popularité croissante des fonds indiciels comportait des risques qu’on ne soupçonnait pas il y a quelques années à peine.
Qu’on en juge. On a constaté qu’au moment de la chute boursière survenue en août dernier, les titres de l’indice américain Russell 2000, composé de sociétés à faible capitalisation, avaient été davantage vendus que les autres. Il est ainsi apparu qu’ils avaient tendance à être surévalués, du simple fait de leur inclusion dans cet indice. Même chose pour les titres composant le S&P 500.
Cette prime d’évaluation, connue depuis longtemps, aurait progressé en raison de la popularité grandissante de la gestion passive, un facteur clé du cycle boursier actuel.
Diversification maximale
Autre constatation : les titres inclus dans plusieurs indices de référence évolueraient plutôt en phase les uns avec les autres. Cela réduit donc la diversification tant recherchée par les tenants de la gestion passive et des fonds indiciels.
Yves Choueifaty, président-fondateur de TOBAM, une société de gestion de fonds établie à Paris et à New York, en a fait un de ses chevaux de bataille lorsqu’il a créé son «anti-benchmark» (AB), un concept qui s’oppose à la gestion passive et privilégie le maximum de diversification.
«Ce que nous cherchons, ce n’est pas de battre les indices, mais d’offrir un maximum de rendement dans l’absolu en privilégiant la plus grande diversification possible», dit-il.
Et comment obtient-il cette diversification maximale ? «Nous essayons d’acheter des actions peu corrélées les unes aux autres», ce que beaucoup d’actions incluses dans les grands indices de référence ne parviennent pas toujours à offrir.
Selon ce mathématicien de formation, les résultats sont au rendez-vous. C’est ainsi que «la stratégie AB Canada cumulée sur trois ans a permis de dégager une surperformance de 13,7 % par rapport à l’indice composé S&P/TSX à la fin d’octobre 2015», affirme Yves Choueifaty.
TOBAM n’offre pas encore de fonds communs de placement au Canada, mais commercialise ses stratégies par l’intermédiaire de deux partenaires canadiens.
Priorité à la répartition
Ceux qui ne peuvent pas s’offrir TOBAM peuvent recourir à d’autres fournisseurs de gestion active ou semi-active, comme c’est le cas des stratégies à bêta judicieux (smart bêta).
C’est ce qu’offrent notamment de nombreux fournisseurs de fonds négociés en Bourse (FNB) au Canada, dont BMO Gestion mondiale d’actifs.
«Parmi les quelque 70 FNB que nous avons mis en marché depuis 2009, nous proposons une bonne gamme de FNB indiciels et de FNB à bêta judicieux, précise Alain Desbiens, vice-président, Québec et Atlantique, FNB BMO. Nous croyons que l’investisseur a tout intérêt à synthétiser plusieurs approches, qu’elles soient actives ou passives.»
«De toute façon, plusieurs études ont démontré que le plus important, c’est la répartition de l’actif, quels que soient les produits utilisés. Cela explique 90 % du rendement d’un portefeuille», enchaîne ce passionné des FNB.
Cullen Roche, fondateur de Orcam Financial Group et auteur de Pragmatic Capitalism, un livre et un site Internet éponyme, est du même avis : «La répartition de l’actif entre actions et titres à revenu fixe est le plus important facteur qui explique les rendements».
Même pour une société d’investissement axée sur les bas coûts de gestion comme Vanguard, la clé du dilemme entre gestion active et gestion passive est simplement une juste combinaison des deux approches dans la constitution d’un portefeuille.
«Lorsqu’il s’agit de réduire ses risques pour maximiser ses rendements, il est bon d’avoir une base composée de fonds indiciels alliée à quelques fonds gérés de façon active – les satellites», pense Jim Rowley, analyste en placements principal au Groupe de stratégie d’investissement de Vanguard.