Il constate que l’Europe ne réussit pas à trouver de solutions à long terme à ses problèmes et que sa politique de rigueur est plus difficile à faire accepter politiquement que ne le sont les politiques monétaires très laxistes des États-Unis et du Japon, qui mènent à des dévaluations. L’hyperinflation qu’a connue l’Allemagne durant les années 1920 l’empêche de souscrire à cette approche. Entretemps, en dehors de la Grèce, personne ne s’attaque vraiment à la racine des problèmes fiscaux des pays surendettés, et les banques européennes ne se sont pas recapitalisées assez vite.

«Cependant, si la situation se détériore rapidement, je prévois que quelqu’un actionnera la planche à billets en Europe. Sans union fiscale, il est impossible pour l’Europe d’appliquer les politiques monétaires américaine et japonaise. À mon avis, la fin ordonnée de l’euro et le retour des devises nationales pour procéder à ces dévaluations seraient souhaitables. Ce serait un choc, mais les pays de l’Europe du Sud en bénéficieraient. La dévaluation de 20 % en un jour des devises asiatiques en 1998 a eu des effets négatifs pendant un an. Un rebond économique spectaculaire s’en est ensuivi», rappelle-t-il.

Entre-temps, cet environnement difficile a des répercussions sur l’évaluation des titres européens, qui reste inférieure à celle des titres américains. Mark Lin tente d’acheter des sociétés européennes moins chères, mais qui peuvent capter la croissance ailleurs dans le monde. Il sélectionne des titres dont le chiffre d’affaires et le bénéfice peuvent croître de 4 et 10 % par an, respectivement, au cours des cinq prochaines années. Il en trouve surtout dans les secteurs des soins de santé, de la consommation de base et de la consommation discrétionnaire, qui comptent pour 25 %, 19 % et 12,6 % du fonds, respectivement.

La pharmaceutique espagnole Grifols, chef de file dans le domaine des produits de type plasma sanguin, est le 3e titre le plus important en portefeuille, avec une pondération de 4,4 %. On y retrouve aussi la société allemande Frenesius, chef de file dans le domaine de la dialyse, de même que la pharmaceutique Roche, chef de file dans les traitements en oncologie. «Il n’y a pas de substitut pour leurs produits», souligne Mark Lin.

La BCE a été rassurante

«L’assurance qu’a donnée Mario Draghi, président de la Banque centrale européenne (BCE), de faire tout ce qui est en son pouvoir pour préserver la zone euro et la mise en place par celle-ci de mécanismes pour endiguer la crise financière, notamment les LTRO (Long Term Refinancing Operations) et les OMT (Outright Monetary Transactions), ont été les catalyseurs de la reprise boursière en Europe, car ils ont éliminé une grande partie du risque systémique du système bancaire. C’est pourquoi les titres financiers ont si bien performé dans cette reprise», affirme Chuk Wong, gestionnaire du Fonds Valeur européenne Dynamique.

«Jusqu’à l’an dernier, la macroéconomie était le principal moteur du marché européen, et les investisseurs ignoraient les fondamentaux de plusieurs entreprises, de sorte que plusieurs titres étaient très bon marché. Cette dynamique a changé et les entreprises bien gérées ont bien performé», ajoute-t-il.

Il juge qu’aujourd’hui encore, les titres financiers demeurent très bon marché et que le pire est passé : «En raison de l’appui de la BCE, j’ai peine à concevoir que les banques européennes s’effondreront, du moins celles qui sont bien gérées. Elles parlent maintenant de réductions de coûts afin d’augmenter le rendement sur l’avoir. Il y a plus de transparence que dans les banques américaines, où les produits dérivés rendent l’analyse assez complexe. Nous savons exactement quelles dettes souveraines les banques européennes détiennent, ce qui nous permet de déterminer quel pourcentage est toxique et de prédire le pire scénario.»

Les gestes posés par la BCE ont permis une réduction des écarts de rendements des obligations des pays en difficulté et cela a eu pour effet d’améliorer la qualité des actifs des banques, estime Chuk Wong. «Si vous croyez que les obligations souveraines ont une valeur marchande et que le risque systémique a disparu, les banques européennes se négocient à un fort escompte par rapport à leur valeur comptable. C’est là que se trouve la valeur et c’est pourquoi elles constituent environ 22 % du portefeuille.»

Cela dit, il reconnaît aussi que certains pays européens, comme le Royaume-Uni, flirtent avec une troisième récession en cinq ans et que la demande intérieure est faible. Cela serait positif pour les marchés boursiers, car la BCE continuera d’avoir une politique monétaire laxiste en abaissant les taux d’intérêt. Les liquidités abondantes ainsi créées se retrouveront dans les actions de sociétés bien gérées d’envergure mondiale situées en Europe, dont plusieurs sont des chefs de file et qui sont sous-évaluées. Il rappelle que ces titres, à l’exclusion des banques, ont accru leurs marges bénéficiaires au cours des dernières années. «Ces titres ne dépendent pas de la demande intérieure.»

Il en trouve beaucoup dans le secteur de la consommation discrétionnaire, qui compte pour environ 30 % du fonds. Un bon exemple est le fabricant suisse de mouvements et de composantes pour montres Swatch, qui vend ses produits partout dans le monde.

Un autre est le constructeur automobile allemand BMW, qu’il considère comme un des meilleurs de sa catégorie. La société se développe rapidement dans les marchés émergents et affiche de très bons résultats aux États-Unis.

Des titres attrayants

«L’environnement macroéconomique en Europe continuera d’être déroutant au cours des prochains trimestres et il n’y a pas de solution magique qui puisse résoudre les problèmes européens au cours des trois ou six prochains mois. Mais c’est justement cet environnement morose des trois dernières années qui a déprimé divers multiples d’actions européennes de très haute qualité et présenté des occasions d’investissement attrayantes. Malgré leur remontée, nos titres continuent d’être attrayants», défend Michael Hatcher, gestionnaire du Fonds Europlus Trimark, qui affichait un rendement de 34,9 % pour l’année se terminant le 31 mai dernier.

«Environ 30 % du chiffre d’affaires de la vaste majorité des 25 sociétés en portefeuille est tiré de pays émergents. Ce sont toutes des entreprises de grande qualité, dotées d’avantages concurrentiels et de barrières à l’arrivée de nouveaux venus, avec des marques bien établies et d’excellents réseaux de distribution, comme Nestlé, Adidas ou British American Tobacco», explique-t-il.

Si le secteur de la consommation de base compte pour 26 % du portefeuille, c’est parce qu’on y trouve plusieurs sociétés capables de générer des rendements élevés du capital investi ou dont les flux de trésorerie disponibles représentent une forte proportion des bénéfices.

Un bon exemple est celui de la société Henkel, le titre le plus important en portefeuille avec une pondération de 6,2 %. Michael Hatcher la qualifie de Procter & Gamble allemande. Elle a une forte présence dans le marché des produits ménagers, comme les détergents et les produits d’entretien pour la maison, et dans le secteur des produits de beauté, notamment les shampoings, et enfin, dans les produits adhésifs.

Même si le titre s’est apprécié depuis qu’il l’a acquis il y a presque quatre ans, il le conserve parce qu’il continue de se négocier à un prix inférieur à ce qu’il juge être sa vraie valeur. Un titre doit se négocier à un escompte de 30 % par rapport à ce qu’il estime être sa vraie valeur pour qu’il l’achète.

Azimut Holding, qui compte pour 5,3 % de l’actif du fonds, est une société d’Italie du Nord comparable au Groupe Investors. C’est le gestionnaire d’actif indépendant le plus important d’Italie. Michael Hatcher dit avoir profité de la tourmente financière dans ce pays pour acquérir cette entreprise qui n’a pas de dette et dont l’équipe de direction détient une portion importante des actions.

Les titres de technologie comptent pour 17,2 % du fonds. SimCorp, qui compte pour 5,2 % de l’actif du fonds, est un fournisseur de logiciels spécialisés pour l’industrie de la gestion de portefeuille. «Ils ont la meilleure solution intégrée couvrant tous les aspects des opérations, réduisant ainsi les risques d’erreurs, affirme Michael Hatcher. Il domine dans les pays nordiques et est très présent dans les grands pays européens. Depuis quatre ou cinq ans, il fait des progrès en Amérique du Nord.»