La planète Terre en vert, posée sur une table où des gens discutent.
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Les gendarmes du marché boursier canadien n’ont pas abandonné l’idée d’imposer la divulgation obligatoire d’informations environnementales dans les communications financières des sociétés cotées en Bourse, même s’ils ont suspendu leurs travaux en avril, a assuré le patron de l’Autorité des marchés financiers (AMF).

« On prend une pause, mais c’est clair qu’on va continuer la démarche qu’on avait déjà amorcée », a répondu le président-directeur général de l’AMF, Yves Ouellet, en mêlée de presse en marge d’une allocution devant le Cercle canadien de Montréal, lundi.

Les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) ont annoncé en avril qu’elles suspendaient leurs travaux visant à imposer un nouveau règlement sur la communication obligatoire d’information liée au changement climatique. L’ACVM regroupe les régulateurs provinciaux, dont fait partie l’AMF au Québec.

La décision avait été critiquée par des investisseurs activistes et des groupes environnementaux qui y avaient vu un recul en matière de lutte aux changements climatiques.

Aux États-Unis, l’administration Trump a opéré « un recul qui est significatif par rapport à la divulgation climatique », a expliqué Yves Ouellet. « On a vu au niveau de l’Europe, ils ont pris une pause. Ce qu’on a fait au Canada, c’est la même chose. Il faut se donner un peu de temps pour voir comment les choses risquent de s’enligner aux États-Unis. »

Les ACVM discutent avec les régulateurs en Europe et en Asie afin de voir comment ils s’adapteront à ce contexte. Avec leur pause, les gendarmes boursiers canadiens veulent éviter d’avancer trop vite sans savoir comment s’ajusteront les autres juridictions.

« La dernière chose qu’on voudrait, c’est avancer pour reculer, a dit Yves Ouellet. Il ne faut absolument pas faire ça. Ça irait vraiment au détriment de la cause qu’on veut défendre. »

En attendant, les ACVM incitent les sociétés à utiliser volontairement les normes du Conseil canadien des normes d’information sur la durabilité (CCNID) conçues à partir des critères de l’International Sustainability Standards Board (ISSB). « On leur suggère, a dit Yves Ouellet. On ne les oblige pas. »

Les risques climatiques ne sont pas le seul sujet où les ACVM doivent prendre un pas de recul à cause des décisions des régulateurs internationaux.

C’est également le cas avec la mise à jour des normes internationales visant à assurer que les institutions financières sont suffisamment capitalisées pour encaisser un choc économique.

Le Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF) a annoncé en février la suspension pour une durée indéterminée des changements prévus dans le cadre de Bâle III, qui aurait relevé le minium de fonds propres que doivent détenir les grandes banques canadiennes.

Au cours de sa présentation, Yves Ouellet a déploré la fragmentation du cadre réglementaire international, tandis que l’administration Trump semble vouloir faire bande à part sur des enjeux qui faisaient auparavant consensus.

Les États-Unis semblent vouloir rompre avec une tendance à l’harmonisation des cadres réglementaires à l’international depuis les années 1980, a précisé Yves Ouellet en mêlée de presse.

« Une des caractéristiques essentielles au fonctionnement du secteur financier, c’est un certain niveau d’harmonisation, a-t-il dit. […] Est-ce qu’il y a une position de rupture au niveau des États-Unis ? C’est trop tôt encore pour le dire, mais il y a eu quand même des déclarations assez claires. »