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Être une équipe de conseillers de haut niveau implique l’établissement de priorités dans la façon dont le temps est investi, explique Lynette Lewis, responsable du groupe de conseil en portefeuille pour l’Amérique du Nord chez Russell Investments.

Une façon d’établir ces priorités consiste à segmenter son bloc d’affaires pour identifier les clients prioritaires, rationaliser les produits d’investissement et affiner son modèle de service.

Lors du sommet Croesus Finnovation tenu récemment à Toronto, Lynette Lewis a encouragé les conseillers à penser comme les « PDG de leurs pratiques ». Les équipes les plus performantes consacrent moins de temps à la gestion des investissements et davantage au développement des affaires et à la prospection, a-t-elle affirmé.

« Ces équipes ne font pas de sélection de titres. Elles ont externalisé cela autant que possible », a-t-elle affirmé.

Segmenter votre bloc d’affaires peut faciliter l’identification des clients les plus importants – ceux qui devraient recevoir la majeure partie de votre attention.

« En général, 80% des revenus de la plupart des conseillers proviennent des 20% de clients les plus importants, a-t-elle noté. Si vous pouvez identifier ces clients et surinvestir dans ceux-ci… c’est ce segment qui va générer vos revenus. »

La construction d’un modèle de service basé sur ce type de segmentation exige des conseillers qu’ils créent des attentes claires pour les différents niveaux de clients, a-t-elle souligné. Pour le groupe prioritaire A, cela devrait signifier des points de contact mensuels personnalisés – autrement dit, davantage qu’un courriel de masse ou un billet de blogue.

« Cela doit être conséquent et faire partie de votre promesse de service lorsque vous embarquez un nouveau client », a précisé Lynette Lewis.

Pour les clients de niveau B, le contact personnel peut être trimestriel, et pour le niveau C, il peut se limiter à environ deux fois par année.

« Il s’agit d’être intentionnel sur votre modèle de service et ensuite, si vous êtes une équipe, de distribuer les rôles et les responsabilités de ses membres pour qu’ils s’alignent sur votre modèle de service. C’est à ce moment-là que l’on pourrait constater une croissance plus régulière », a-t-elle ajouté.

Les outils qui permettent aux conseillers de vérifier la répartition globale des actifs sont également révélateurs, a déclaré Lynette Lewis. Le fait qu’une poignée de clients soient investis dans des centaines de titres pourrait être une indication de perte de temps.

« Si vous réfléchissez à la façon dont vous passez votre temps, est-ce que le fait de vous inquiéter de la pertinence de ces titres dans ces comptes est une utilisation précieuse de votre temps en tant que PDG ? Je dirais que non », a-t-elle affirmé.

Kendra Thompson, associée chez Deloitte à Toronto, a également abordé la question de la segmentation de la clientèle lors de l’événement Croesus.

« Plus vous avez de connaissances et de données qui vous permettent de voir les tendances dans votre book, de cerner les tendances qui orientent la vie de vos clients, plus vous avez de chances de bien les rejoindre », a-t-elle confié à l’audience.

Elle a également parlé d’adapter vos modèles de service pour se concentrer sur les clients ayant des besoins complexes et un besoin de conseils pour lesquels ils sont prêts à payer.

« Si vous servez vraiment plus de 200 clients dont le revenu est inférieur à un million de dollars, je ferais une sérieuse évaluation de votre book », a-t-elle commenté.

Cela ne signifie pas nécessairement qu’il faille se départir des clients possédant moins d’actifs ; les entreprises devraient plutôt développer des « continuums de services flexibles » où les clients prioritaires sont orientés dans des relations de conseil dédiées et où les autres reçoivent un mélange de « services en succursale » et de « services robotisés ».

Kendra Thompson a notamment évoqué à cet égard le modèle utilisé à la Bank of America Merrill Lynch. Nombre des clients de détail de cette institution bénéficient d’un service complet, et beaucoup d’autres, des clients intermédiaires, qui reçoivent un service impliquant à la fois la plateforme d’investissement en ligne Merrill Edge et du conseil de la part de conseillers.

« Lorsque vous pensez à ce que les banques canadiennes construisent, cela ressemble beaucoup plus à un Bank of America Merrill Lynch qu’à un Wealthsimple », a-t-elle illustré.

Kendra Thompson a toutefois signalé que les modèles actuels de service aux clients ayant moins de 250 000 dollars investis sont faibles et vulnérables aux perturbations. Il y a peu d’alternatives pour les clients en ce moment, mais cela va probablement changer.

« Il n’existe par réellement de modèles destinés à servir pleinement les clients intermédiaires et plus bas de gamme, contrairement aux clients nantis qui est un secteur très chaud en matière d’innovation, a-t-elle noté. Au cours des trois à cinq prochaines années, cela va changer, et vous aurez du mal à justifier les frais que nous voyons aujourd’hui parce qu’il y aura de bonnes alternatives. »

Les conseillers devraient réfléchir à un seuil de compte beaucoup plus élevé, a-t-elle dit, afin de justifier ces frais.

« Il doit y avoir un souci des réalités actuelles. Vous devrez avoir plus d’argent et plus de complexité dans les situations et la dynamique familiales afin de justifier le type d’honoraires circulant aujourd’hui », a-t-elle ajouté.

Tous les clients sont des femmes de la génération Y

On a beaucoup écrit sur les sensibilités des clients milléniaux et des femmes, sans parler de leur importance pour l’avenir de la gestion de patrimoine. Selon Kendra Thompson, même les conseillers qui s’adressent à d’autres groupes démographiques devraient en tenir compte, car ce qui fonctionne pour les femmes et les jeunes clients est de plus en plus populaire dans tous les secteurs.

Les experts discutent souvent de comportements tels que montrer sa vulnérabilité, comprendre les objectifs humains en plus des objectifs financiers et être plus présents dans les relations lorsqu’ils servent les femmes. Le conseiller devrait être davantage un partenaire qu’un expert cantonné à expliquer l’évolution des marchés.

« Lorsque nous travaillons avec des équipes de conseillers qui servent bien les femmes, nous constatons qu’elles reçoivent souvent des commentaires vraiment positifs de la part des hommes qu’elles servent également », a remarqué Kendra Thompson.

C’est la même chose avec les clients de la génération Y : les modèles de service associés aux jeunes, tels que les plateformes en ligne et la fourniture plus accessible de conseils, trouvent un écho dans toutes les catégories démographiques, a-t-elle déclaré.

Quel que soit le segment ciblé, Kendra Thompson estime que les conseillers devraient se poser la question : « Quels sont les points de friction et les paradigmes que les milléniaux remettent en question dans ce que je fais tous les jours, et comment puis-je être proactif en les abordant afin de ne pas perdre ma pertinence au fur et à mesure que les modèles autour de moi évoluent ? »