Une photo-portrait de Mano Malu.
Gracieuseté

Le jury souligne la qualité du parcours de cette « femme talentueuse d’exception qui, malgré les embûches qui ont parsemé son chemin, a gravi les échelons pour devenir une leader hors pair ». L’AFFQ tiendra la 2e édition de sa web-célébration sous le thème « l’Unité, une force essentielle des talentueuses », le jeudi 27 mai prochain.

À l’emploi de la Banque TD depuis 2017, Mano Malu occupe le poste de directrice principale, Crédit commercial, TD Services aux entreprises. Elle supervise trois directeurs de comptes.

Son parcours ne laisse planer aucun doute : le sens du mot « embûche » ne lui est pas étranger.

« En pleine guerre civile… »

Détentrice d’un diplôme d’ingénieure commerciale et de gestion de l’Université catholique de Louvain (1994), Mano Malu arrive au Québec à la fin des années quatre-vingt-dix dans des circonstances difficiles. Elle vient refaire sa vie.

« Je venais du Congo qui était alors en pleine guerre civile. J’étais réfugiée de guerre. Je ne connaissais personne … j’avais zéro réseau », dit-elle.

Embûche supplémentaire, elle est handicapée.

« Je suis devenue paraplégique à 18 ans, à la suite d’un accident de voiture. Cependant, je n’ai jamais vu ma chaise roulante comme un obstacle », souligne-t-elle.

Afin de se construire de nouvelles relations dans un pays neuf situé à plus de 10 000 kilomètres du Congo, elle contacte des organismes d’aide aux immigrants et aux personnes handicapées. Elle fait également du bénévolat.

« Un jour, j’ai entendu parler d’un programme de stages pour personnes handicapées dans une institution financière. J’ai envoyé ma candidature et ce fut le début de ma carrière dans le milieu bancaire. J’ai débuté comme caissière et j’ai gravi les échelons un à un », dit-elle.

Elle constate toutefois rapidement que son diplôme européen n’a pas la valeur espérée et que son avancement en milieu bancaire exige autre chose. « Je me suis vite aperçue que le titre de CFA était celui qui ouvrait les portes », dit cette professionnelle du crédit aux entreprises.

Elle serre les dents et mobilise ses énergies afin de décrocher le prestigieux titre d’analyste financier agréé (CFA) en 2004. « Ce fut exigeant, car j’avais deux jeunes enfants, et je travaillais tout en étudiant. J’ai passé mon troisième examen enceinte de ma fille », témoigne-t-elle.

« Un boy’s club… »

Le monde de la finance serait-il plus exigeant envers les femmes?

« Le monde de la finance est un boy’s club. J’ai dû mettre les bouchées doubles. Je pensais naïvement que performer dans mon travail suffirait. Cela fonctionne jusqu’à un certain point, car les femmes sont très présentes dans les postes de gestion intermédiaires. C’est après que ça se corse et qu’il faut sans cesse démontrer notre valeur. On est loin d’en avoir fini avec les biais inconscients et les questions d’équité, mais je crois que nous sommes sur la bonne voie », estime Mano Malu.

Être Noire a-t-il accru les difficultés sur son chemin?

« Je me fie sur les statistiques qui révèlent clairement un manque de femmes Noires dans le milieu de la finance. Si les femmes doivent mettre les bouchées doubles, les femmes Noires doivent, pour leur part, mettre les bouchées triples pour faire leur place. Mais là aussi, par rapport à l’équité, je crois que nous sommes sur la bonne voie », analyse-t-elle.

Conseil aux jeunes

S’il y avait un conseil à donner à une jeune femme intéressée à évoluer dans l’industrie de la finance, quel serait-il?

« C’est de croire en soi. Évidemment, il fait aimer la finance… en rêver et en manger ! Mais à la base, il faut croire en soi et en son potentiel. Et toujours garder intact le plaisir de se dépasser », affirme Mano Malu.

Notons que Manu Malu est coauteure avec sa sœur Raïssa d’un livre électronique (pour liseuses Kindle seulement) intitulé Physiciens et physiciennes, d’Archimède au 19e siècle.  Ce livre se veut un hommage à son père qui fut professeur de physique nucléaire.