Un homme d'affaire donnant un bâton de relais à un autre homme d'affaire.
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La planification de la succession n’est pas une mince affaire. L’idée de transmettre l’œuvre d’une vie, soit son entreprise, est parfois très, voire trop, difficile à supporter, note Financial Planning dans un article récent.

« Les conseillers ne veulent pas prendre leur retraite. Le mot retraite est pour eux synonyme de mort », résume ainsi Brooklyn Brock, planificatrice financière agréée et fondatrice de Ellevate Advisors, une société basée à Tulsa qui aide les conseillers financiers à planifier la continuité et la succession.

Toutefois, cette question prend toute son importance particulièrement dans le secteur de la gestion de patrimoine alors que l’âge moyen d’un conseiller en 2022 était de 57 ans, selon une étude de J.D. Power.

Ces chiffres surviennent alors que le besoin de services financiers est sur le point d’exploser en raison du grand transfert de richesse attendu avec la mort des baby-boomers. Ainsi 84 000 milliards de dollars changeront de mains d’ici 2045, selon une estimation du groupe de recherche Cerulli Associates.

Il semble donc évident qu’il est temps pour les conseillers de songer à leur plan de relève, d’autant que lorsqu’ils se prêtent à cet exercice, d’autres soucis peuvent émerger.

Des changements de procédure

Brooklyn Brock se rappelle ainsi de plusieurs cas de succession problématiques. Le premier concerne un conseiller qui a décidé de léguer sa société à ses fils. Loin du bureau, mais pas complètement à la retraite, ce dernier n’a pas respecté les dernières procédures de travail, résultat : un client a porté plainte l’accusant d’avoir vendu un produit sans faire toutes les déclarations requises.

Les fils ont donc voulu le départ de leur père qui refusait de s’exécuter. Il a finalement fallu l’aide d’un professionnel pour comprendre les réticences du père : la peur de ne pas avoir les moyens de prendre sa retraite. Les fils ont donc fait appel à un planificateur financier qui a confirmé que la retraite était possible et le père est parti l’esprit serein.

Se redéfinir

Un autre problème est de savoir quoi faire une fois parti. Beaucoup de gens se demandent « quelle est mon identité en dehors du travail ? Qu’est-ce qui me rend important sans mon entreprise ? », rapporte Brooklyn Brock.

Il est ainsi sain d’avoir d’autres passions et de savoir quoi faire une fois à la retraite. Sinon celle-ci semble être un passage plus ardu qu’il ne l’est réellement.

Il est ainsi essentiel de définir clairement la nouvelle vie à laquelle le retraité peut s’attendre. Le but étant de ne pas voir la retraite comme une fin, mais comme une étape pour réaliser enfin des projets que l’on remettait sans cesse faute de temps.

Fixer une date de sortie

L’une des tâches les plus importantes lors d’une succession est tout simplement de fixer une date limite. Selon les experts, même si cette date est éloignée, il est essentiel de fixer un délai précis pour la transition afin de s’assurer qu’elle a bien lieu.

Un des problèmes que l’on retrouve souvent lors de succession, c’est que finalement le patron décide de ne pas partir.

« Le propriétaire s’est vu retirer certaines choses de son assiette, et il a commencé à apprécier un peu plus son travail. La date de leur départ à la retraite a donc été repoussée, repoussée et repoussée, et maintenant elle est inexistante », rapporte Nick Gertsema, 39 ans, planificateur financier agréé à Saint-Joseph (Missouri), chez Gertsema Wealth Advisors.

Il faut que la personne qui prend la relève sache qu’à un moment tout sera vraiment à elle et qu’elle ne dépendra plus de l’ancien patron.

Apprendre à lâcher prise

Le lâcher-prise est un autre défi pour les patrons. Lorsque vient le moment de céder la place à la relève, il faut être capable de s’ouvrir aussi à leurs propositions et idées. Il n’est pas évident de perdre le contrôle, mais le successeur a besoin d’une certaine marge de manœuvre pour diriger l’entreprise à sa façon, et même pour faire quelques erreurs.

Même si l’on pense que sa façon de faire est la meilleure, il est bon de s’ouvrir également à d’autres méthodes, surtout si l’on compte quitter l’entreprise dans peu de temps.

Le successeur doit avoir la possibilité de s’épanouir dans son nouveau rôle de dirigeant, et les anciennes méthodes ne doivent pas devenir l’ennemi des nouvelles.

Communiquer

Pour qu’une succession fonctionne, il faut une transparence totale sur l’entreprise. Il peut falloir du temps au propriétaire pour se sentir à l’aise avec cela. Pour aider à cela, Brooklyn Brock recommande de passer progressivement aux informations les plus sensibles, comme les évaluations et les bilans de performance.

Pourquoi ne pas non plus faire signer aux deux parties un accord de non-divulgation dès le début des négociations, afin que chacun se sente à l’aise pour être franc.

Il peut aussi être bon de se tourner vers une aide extérieure pour s’assurer que les conversations se déroulent sans heurts. L’important est que chacun puisse réfléchir à voix haute à la succession sur une base régulière avec une personne de confiance.

« S’ils n’en parlent à personne, c’est un signal d’alarme qui indique qu’ils ne gèrent pas leurs émotions, qu’ils vont avoir la frousse parce qu’ils n’y ont pas réfléchi complètement », conclut Brooklyn Brock.