Crédit : Christian Mercier

L’Union-Vie, compagnie mutuelle d’assurance a adopté officiellement sa nouvelle image de marque le 19 novembre dernier, troquant le nom d’UV Mutuelle contre celui d’UV Assurance dans le but de se positionner pleinement comme assureur.

Pour la mutuelle fondée en 1889 et dont le siège social se trouve à Drummondville, il s’agit de la plus récente étape dans la transformation de son modèle d’entreprise amorcée il y a trois ans. L’architecte de cette grande transformation est Christian Mercier, qui a été nommé au poste de président-directeur général en décembre 2016.

Recruté par Jacques Desbiens, son prédécesseur à la tête de la mutuelle, Christian Mercier est arrivé dans un contexte rempli de défis, notamment la persistance des bas taux d’intérêt et l’accroissement de la distribution de produits d’assurance par Internet. Sans compter le fait qu’il se «sentait ceinture blanche dans le domaine financier».

«J’ai un parcours assez atypique pour quelqu’un qui travaille dans le milieu de l’assurance, surtout à titre de dirigeant. On voit déjà avec mon profil d’études que je n’ai rien d’un actuaire», lance en riant Christian Mercier. Il est en effet titulaire d’un baccalauréat en sciences politiques de l’Université d’Ottawa et d’une maîtrise en études de la défense du Collège militaire royal du Canada, à Kingston.

Un leader sur le front

Jacques Desbiens cherchait à recruter «un leader qui avait prouvé sa valeur au fil du temps», selon le témoignage de Christian Mercier. C’est à l’extérieur de l’industrie qu’il a déniché son candidat. Lui-même impliqué à titre de lieutenant-colonel honoraire auprès du 6e Bataillon Royal 22e Régiment, il a effectivement croisé la route de Christian Mercier alors que celui-ci était directeur général de la Corporation du Fort St-Jean, en Montérégie.

Natif de la région de Québec, Christian Mercier s’est enrôlé dans les Forces armées canadiennes en 1986, à l’âge de 19 ans, et a amorcé sa carrière au sein du Royal 22e Régiment comme officier d’infanterie. «Un officier d’infanterie évolue sur le champ de bataille. On parle de troupes combattantes, sur la ligne en avant», précise-t-il.

Au fil de sa carrière, Christian Mercier a notamment été déployé à Haïti en 1997 dans le cadre d’une mission de sécurité menée avec les Nations Unies. Il a cumulé des fonctions de commandement et d’état-major au 3e Bataillon Royal 22e Régiment, à l’École d’infanterie, au Centre de recrutement des Forces armées canadiennes de Sudbury, à l’École de combat du Royal 22e Régiment et au Quartier général du 33e Groupe-brigade du Canada.

De 2016 à 2018, à titre de brigadier-général, Christian Mercier a dirigé le 34e Groupe-brigade du Canada, avant d’être promu en septembre 2018 au poste de commandant adjoint de la 2e Division du Canada et de la Force opérationnelle interarmées (Est). Il devenait ainsi «le numéro 2 en importance en matière de commandement de troupes au Québec relativement à l’armée de terre», explique-t-il.

Christian Mercier a quitté le service militaire le 11 novembre dernier, entouré de son épouse et de ses enfants. «C’était significatif de participer au jour du Souvenir. Je suis très fier de ce que j’ai accompli, mais c’était le moment de partir. Cela devenait ambitieux de continuer à servir la Réserve en même temps que je dirigeais une compagnie d’assurance», convient-il.

Trois priorités

«J’ai abordé le défi UV Mutuelle comme une nouvelle mission dans laquelle je m’engageais. Je me disais : « On a 250 000 assurés chez nous, donc on travaille pour ces gens-là »», évoque Christian Mercier.

Il dit avoir réfléchi de nombreux mois avant d’accepter le défi que lui proposait Jacques Desbiens. «Je suis quelqu’un qui est à l’écoute, qui travaille toujours pour favoriser le consensus. En ce sens, je me disais qu’en étant bien entouré, ça pouvait être un défi intéressant dans lequel je pourrais continuer à grandir professionnellement», ajoute-t-il.

L’équipe est d’ailleurs l’une des trois priorités, avec les infrastructures et la technologie, sur lesquelles Christian Mercier a choisi de travailler à son arrivée chez l’assureur. C’est sur ces priorités qu’il a édifié son plan de développement. «On compte 70 % de femmes chez nous, et la moyenne d’âge est de 43 ans, de sorte que notre équipe de 194 employés est jeune et dynamique.»

La mutuelle se distingue aussi par le fait que près de 45 % de ses employés pratiquent le télétravail, signale Christian Mercier. «C’est une force pour nous et tout en misant dessus, nous avons cherché à rattraper le retard que nous avions en matière de rémunération.»

Cette approche a donné de bons résultats, estime-t-il. Selon lui, UV Assurance ne ressent pas les effets de la pénurie de main-d’oeuvre observée ailleurs.

UV Assurance a d’ailleurs réorganisé ses effectifs. En plus de procéder à une décentralisation des tâches et des responsabilités, elle s’est donné de la profondeur, dit le dirigeant, en faisant gagner des galons à certains employés. «Nous avions une structure très aplatie», dit-il. Une hiérarchie comprenant quelques niveaux a donc été mise en place.

«Je crois à l’importance d’être très à l’écoute de ce qui se passe sur le terrain. Nous avons maintenant ajouté des chefs d’équipe qui sont en mesure de donner de la rétroaction. Cela nous permet d’être plus agiles et efficaces, et c’est très mobilisateur pour tout le monde», affirme-t-il.

Christian Mercier est d’avis que «le plus gros changement en matière de personnel» est survenu au sein du conseil d’administration, qui est passé à neuf administrateurs et a été renouvelé. «Nous avons eu la possibilité d’aller chercher une diversité de talents qui nous permet d’avoir une complémentarité exemplaire dans tous les domaines de l’assurance, y compris les technologies de l’information.»

De même, le conseil compte dorénavant trois femmes, alors qu’il n’y en avait aucune auparavant, signale-t-il. Christian Mercier ajoute que les gestionnaires et les membres du conseil ont resserré leurs liens, afin de mieux discuter des enjeux.

Bond technologique

Depuis l’arrivée de Christian Mercier, la mutuelle a embauché une cinquantaine de personnes. Toutefois, les locaux actuels peinent à accueillir ces nouveaux employés. «Nos installations de Drummondville regroupent trois générations de bâtiments et les parties les plus anciennes commencent à montrer des signes de vieillesse. Il manque aussi cruellement de place, au point que des employés sont installés dans les corridors», explique-t-il.

Pour pallier une partie du problème, des bureaux ont été ouverts à Boucherville. «Cela nous permet d’abord d’accommoder certains employés de cette région», indique Christian Mercier. Il ajoute que le recrutement d’employés spécialisés s’est trouvé facilité par la proximité de Montréal et de sa Rive-Sud.

La mutuelle a également amorcé en 2019 les travaux de construction de son nouveau siège social à Drummondville, dont l’ouverture est prévue pour juin 2020. Le bâtiment de cinq étages comptera des aires ouvertes, une grande cafétéria et un gymnase.

«Les nouvelles installations vont répondre au besoin immédiat de loger nos gens convenablement. Elles nous permettront aussi de mettre en place toute la technologie voulue, ce qui est difficile dans les installations actuelles», précise Christian Mercier.

En effet celui-ci ne s’en cache pas, le changement le plus significatif survenu au sein d’UV Assurance depuis son arrivée est la mise à niveau technologique. «Nous ne sommes pas allés légèrement sur ce plan.»

Christian Mercier s’est d’ailleurs dit surpris de constater, à son arrivée, l’âge des systèmes avec lesquels l’assureur travaillait. «J’ai cru comprendre que c’est commun dans le monde de la finance et de l’assurance. J’arrivais du monde de la défense nationale, où la technologie est de pointe. Le premier projet qu’on a choisi de réaliser a donc été le remplacement du système informatique patrimonial.»

Ce chantier de modernisation a été amorcé en 2017. La première étape, qui touchait principalement le secteur de l’assurance individuelle, sera achevée à la fin de 2019. Ainsi, la nouvelle plateforme intégrée sera déployée à compter de mars prochain. Elle facilitera à la fois le travail du conseiller et la navigation pour l’assuré, qui aura accès à son dossier et pourra effectuer différentes opérations directement en ligne.

«Pour nous, c’est un bond technologique super important, car on accusait un certain retard par rapport au reste du marché. Nous serons maintenant dans le peloton de tête technologique», lance Christian Mercier.

Il mentionne du même souffle qu’un poste de premier vice-président aux technologies de l’information a été créé et que cela sera suivi du recrutement de quelques spécialistes dans ce secteur.

«Il fallait se donner les outils pour poursuivre notre croissance, mais aussi pour être capables de répondre aux réalités du marché», signale Christian Mercier. Il ajoute qu’UV Assurance s’est aussi dotée d’une petite équipe en cybersécurité. «À mon arrivée, j’ai aussi été surpris de voir que la cybersécurité n’était pas le sujet du jour. Dans le monde de la défense, c’était un enjeu quotidien.»

Croissance interne et acquisitions

Christian Mercier juge qu’UV Assurance «sera bientôt dans une position enviable avec des infrastructures flambant neuves, une technologie de pointe, une équipe dynamique, très agile et engagée dans le succès de l’entreprise».

L’évolution du bénéfice net de la mutuelle depuis son arrivée témoigne à la fois des efforts déployés et de la nécessité des actions entreprises. Pour l’année 2016, la mutuelle a affiché un bénéfice net de 13,6 M$, comparativement à 18,1 M$ en 2015. Un creux a été enregistré en 2017 avec 6,4 M$, puis le bénéfice net s’est redressé à 7,7 M$ en 2018. L’assureur disait à ce moment compter plus de 150 000 mutualistes et près de 250 000 assurés.

À court terme, l’objectif de Christian Mercier consiste à poursuivre la croissance interne au Québec et à l’extérieur de la province. Le marché hors Québec représente 60 % du volume de la mutuelle, selon son évaluation. «On a un permis pour exercer nos activités dans toutes les provinces canadiennes, et notre ambition est de continuer à soutenir notre croissance interne», principalement pour les volets en assurance individuelle et en assurance collective.

Mentionnons que 2018 a été une année record en assurance collective, avec des ventes de plus de 15 M$. Au cours de cette année-là, la mutuelle a acquis M@gik-Net Solutions Technologiques, une entreprise spécialisée en solutions technologiques active dans le secteur de l’assurance collective. Elle gère le portefeuille de plus de 5 000 entreprises, pour un volume total de 350 M$ en primes d’assurance.

Dans le cadre de son prochain bond stratégique, UV Assurance entend d’ailleurs se pencher sur d’autres projets du genre, «que ce soit des acquisitions, des partenariats ou autres», indique Christian Mercier. Il signale avoir déjà quelques discussions à ce sujet.

La mutuelle a consacré la majorité de ses efforts à l’assurance individuelle et à l’assurance collective au cours des dernières années. Elle compte maintenant revoir l’ensemble de ses produits en investissement-retraite.

Si Christian Mercier affirme que son adaptation dans l’industrie financière «a été assez facile et rapide», il admet que son approche «bouscule un peu les gens qui sont plus axés sur les processus intellectuels. Ça m’a amené à adapter mon niveau de dynamisme à l’ambiance générale. Je suis entouré d’actuaires qui me trouvent vraiment très dynamique, mais je pense qu’ils ont grandi et qu’ils aiment bien ça finalement… du moins selon ce qu’ils me disent !» lance-t-il le sourire aux lèvres.