Un homme d'affaire tenant des jumelles.
stocking / 123rf

Plusieurs conférenciers qui ont participé à l’événement Inside ETFs Canada, en juin, à Montréal, ont commenté des tendances et des enjeux que les conseillers devraient surveiller. En voici quatre.

Mieux écouter les clientes

La grande majorité des femmes quittent leur conseiller lorsqu’elles deviennent veuves, indiquent différents sondages sur la question. Cela témoigne que l’industrie des services financiers peut s’améliorer afin de mieux servir les femmes. Celles-ci ont une approche différente de celle des hommes en ce qui concerne leurs finances et elles possèdent une part croissante de l’actif financier des Canadiens, ont mentionné Judy Parodi et Paulette Filion, fondatrices de Strategy Marketing, une firme spécialisée dans le marketing destiné aux investisseuses. Elles ont formulé quelques recommandations aux conseillers et à leurs courtiers.

Les conseillers doivent vraiment écouter leurs clientes, s’intéresser à elles et agir en fonction de ce qu’elles souhaitent. Cela implique qu’ils comprennent le point de vue des deux membres d’un couple. «Bob m’a fait valoir sa vision, maintenant je veux entendre la vôtre», a dit Paulette Filion, simulant une réplique d’un conseiller.

Les femmes souhaitent que les conseillers parlent leur langage, car elles investissent pour atteindre un objectif, et non pas seulement pour obtenir de bons rendements. «Il y a des conseillers qui disent : « Voici ma présentation, qu’en pensez-vous ? » Eh bien, ça nous importe peu», a noté Judy Parodi.

Certaines clientes peuvent parfois manquer de confiance en elles-mêmes lorsque vient le moment d’investir, même si elles sont tout à fait en mesure de prendre de bonnes décisions financières, a soutenu Paulette Filion. Elles ont besoin de quelqu’un qui réponde à leurs questions et les aide à apprendre de manière collégiale et non condescendante.

Trop souvent, lors du décès de son conjoint, la cliente se sent tenue pour acquise par son conseiller. «C’est une toute nouvelle situation. Traitez la veuve comme une nouvelle cliente», a noté Paulette Filion.

Les courtiers ne peuvent pas changer quelque chose qu’ils ne mesurent pas et qu’ils ne suivent pas, a-t-elle souligné. C’est pourquoi les firmes devraient examiner le pourcentage de veuves et de femmes séparées qui quittent leur conseiller et la proportion de références provenant de clientes par rapport à celles issues de clients. Elles peuvent aussi mieux former les conseillers en fonction des besoins des clientes, sonder celles-ci, et valoriser les conseillers qui s’illustrent avec elles.

S’adapter à la personnalisation de masse

Les fonds négociés en Bourse (FNB) adopteront la gestion indicielle personnalisée (direct indexing), d’après Matt Hougan, président du conseil d’administration d’Inside ETFs.

Ce type de gestion donne la possibilité à l’investisseur d’acheter directement tous les titres d’un indice ou une partie des titres en fonction de ses particularités : ses valeurs, son intérêt (ou désintérêt) envers une entreprise précise, son secteur d’activité, etc.

Ce processus peut s’avérer relativement compliqué et demander du temps et des moyens financiers importants. Toutefois, les outils technologiques rendent la chose beaucoup plus accessible. Par exemple, sur la plateforme Just Invest, le client n’a qu’à répondre à une série de questions sur son intérêt à investir dans différents secteurs : armes, pétrole, droits humains, etc.

Il peut demander à exclure certaines entreprises spécifiques ou encore son employeur, dont il possède peut-être déjà des actions. L’algorithme rééquilibre alors son portefeuille en fonction de ses réponses.

«Le profil de risque du client est évidemment évalué pour éviter que l’on ne s’éloigne trop de l’indice. On intègre aussi une optimisation multifacteurs pour s’assurer de le suivre», souligne Matt Hougan.

Les créateurs d’indices, tels FTSE Russell ou MSCI, s’y intéresseraient, ainsi que BlackRock, Google, Amazon et Facebook, a indiqué Dave Nadig, directeur général d’ETF.com.

Penser ESG

L’idée reçue voulant qu’il ne soit pas profitable de choisir des titres en fonction des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) est un mythe, selon Naomi English, directrice générale et chef des solutions ESG chez MSCI ESG Research : «On recense près de 2 000 études qui disent qu’intégrer les facteurs ESG ne nuit pas au rendement, aide à limiter le risque et peut éventuellement générer du rendement supplémentaire. Mais ces études analysent de multiples produits aux stratégies d’investissement différentes, donc cet apport varie.»

Le critère «gouvernance» est celui qui est le plus susceptible de générer les meilleurs rendements, a indiqué la spécialiste.

L’alpha que créent les facteurs ESG est difficile à quantifier, selon Andrew Clee, vice-président, FNB, chez Fidelity Investments. En investissant dans des entreprises qui respectent ces critères, on se positionne dans des sociétés de grande qualité.

Les fonds qui respectent les facteurs ESG peuvent avoir des résultats qui ressemblent à ceux des autres produits traditionnels. L’alpha sera généré sur le long terme, a estimé Jay Aizanman, directeur chez Desjardins Gestion internationale d’actifs : «C’est quand les investisseurs commenceront à punir les mauvaises entreprises [en les désertant] que l’alpha sera généré.»

Surveiller la menace fiscale

En voulant éliminer certains avantages fiscaux des FNB, le gouvernement fédéral risque de favoriser le marché américain des FNB aux dépens du marché canadien, déplorait Steve Hawkins, président et chef de la direction d’Horizons ETFs Canada, lors de l’événement : «Honnêtement, les [autorités fiscales canadiennes] ne savent pas du tout ce qu’elles font.»

Selon lui, les investisseurs canadiens peuvent acheter n’importe quel FNB américain en un clic et ainsi défavoriser l’industrie canadienne des FNB si on lui retirait ces avantages fiscaux. Le dernier budget fédéral prévoit interdire d’utiliser une méthode d’allocation des gains en capital ou du revenu aux détenteurs d’unités demandant le rachat lorsque le recours à cette méthode reporte l’impôt de façon inappropriée ou convertit le revenu ordinaire pleinement imposable en gains en capital imposés à un taux plus faible.

Steve Hawkins espère que les efforts de lobbying de l’industrie éviteront cette situation défavorable. Ce dossier mérite d’être suivi.

Avec Christine Bouthillier